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«Tant qu'il n'y a pas de loi des musées, il n'y aura pas de contrôle possible»
L'entretien du lundi : Tahar Ghalia, conservateur en chef du Musée du Bardo, président de la Commission nationale du Patrimoine
Publié dans La Presse de Tunisie le 09 - 01 - 2012

Quarante trois musées, archéologiques, historiques, ethnologiques, géologiques, écologiques, océanographiques, militaires, dépendent de sept ministères à travers toute la Tunisie. Ceci ne tenant compte que des musées nationaux, et régionaux, et non des musées privés qui commencent à se développer. Quant on y regarde de plus près, on se rend compte que l'on ne sait pas grand-chose, au fond, de ces musées dont on parle tant. Quelles sont les lois qui les régissent, comment se créent-ils, quelle est leur spécificité, qui les finance, qui les contrôle, quel est leur programme?
Toutes ces questions, et bien d'autres encore, ont été posées à M. Tahar Ghalia, directeur par intérim de la division de la muséographie à l'Institut national du patrimoine, membre du Conseil scientifique, et Conservateur en chef du Musée du Bardo, et Président de la Commission nationale du patrimoine.
On parle beaucoup, en ce moment, de choses que l'on connaît assez mal finalement : les musées. Combien y a-t-il de musées en Tunisie?
Tahar Ghalia : 43 musées archéologiques, historiques, ethnologiques, géologiques, écologiques, dépendant de sept ministères différents, et couvrant tout le pays. Une trentaine d'entre eux relèvent du ministère de la Culture, et sont gérés par l'Institut national du patrimoine, et l'Agence nationale du patrimoine en ce qui concerne l'accueil et la billetterie. Encore que, et il faut le savoir, il n'y a pas, à ce jour, de loi des musées, ou de cadre juridique régissant ces institutions
Quel a été le premier musée créé, et quel est le dernier né?
Le premier a été le musée de Carthage, créé en 1875 par les Pères Blancs. Ce n'était pas un musée national, mais un musée de la chrétienté. Le premier musée national a été celui du Bardo, créé en 1885, et inauguré en 1888. Ce musée bénéficia d'un statut de quasi autonomie jusqu'en 1907. A près l'Indépendance, tous les musées furent regroupés au sein de l'ancien Institut des archives, devenu plus tard l'Institut national du patrimoine
Le dernier musée ouvert est celui de Kesra, mais c'est un musée qui ne satisfait ni les spécialistes, ni les habitants de la région. Il n'a ni personnalité, ni spécificité, et son programme scientifique et culturel ne reflète pas le patrimoine de ce village berbère antique. C'est donc un musée dont il faut revoir la vocation
Comment finance-t-on un musée, entreprise pas forcément lucrative?
Un musée est lancé par une décision politique, ou la volonté d'une région. C'est ainsi que dans les années 60, 70, il y a eu de nombreux musées régionaux ouverts : ce sont là, autant de vitrines du patrimoine régional. Mais ces musées connaissent actuellement de nombreux problèmes de gestion
Un musée est financé par un budget de l'Etat. Une grande partie du financement est octroyée par l'Anep en tant que budget de soutien. La majeure partie de ces fonds allait jusque-là au paiement des salaires temporaires, car n'ayant pas de statut juridique, ces musées ne pouvaient recruter du personnel régulier. Aujourd'hui, ce sujet est clos, et le problème résolu. La situation de ces temporaires est régularisée. 250 CDI —contrats à durée indéterminée— ont été signés sur le Titre 1. Ces contrats leur donnent des avantages, des droits et aussi des devoirs. La situation est beaucoup plus claire pour les musées et les sites. Car ce personnel est réparti entre les musées, et les sites, entre les différentes directions ou entités régionales qui vont les gérer.
Les musées privés qui se sont développés à un certain moment relèvent-ils d'un certain contrôle du ministère ou de l'INP?
Tant qu'il n'y a pas de loi des musées, il n'y a pas de contrôle possible. Il y a une procédure : les promoteurs déposent un dossier qui doit répondre à un cahier des charges, faire une demande au ministère qui le transmet pour avis à l'INP. Nous encourageons beaucoup ces initiatives. C'est ainsi qu'il y aura bientôt un futur musée de la céramique dont nous attendons beaucoup car il redonnera vie et fonction à un monument : la Karaka.
Ceci dit, tout n'est pas toujours facile pour ces musées qui manquent souvent de médiatisation. Je vous en donne pour exemple le musée de Djerba, superbe réalisation qui, cependant, connaît beaucoup de problèmes du fait de son manque de médiatisation.
Deux grands projets d'aménagement sont en cours actuellement. D'autres sont en gestation. Pouvez-vous nous en parler?
Deux grandes ouvertures sont, en effet programmées : celle du Bardo, et, plus tard, celle du musée de Sousse. D'autres projets sont à l'étude : Sidi Bouzid et Kairouan, sachant que pour ouvrir un musée, il faut que son programme culturel et scientifique soit défini pour trois ans.
Rakkada, à Kairouan, pêche par son éloignement. D'autre part, c'est un palais, difficilement convertible aux normes de la muséographie moderne. Cela demeurera donc le centre pour les manuscrits islamiques, avec le laboratoire qui existe déjà, et qu'il faudra développer. Rakkada servira également de réserves pour les énormes collections de Kairouan. Cependant que le centre d'interprétation, qui se trouve devant la grande mosquée, accueillera les collections archéologiques, de Rakkada, certes, mais aussi celles de Sabra Mansouria.
Un autre grand projet concerne également le réaménagement du palais beylical de Kassar Saïd?
Effectivement, ce palais, qui a succédé à celui du Bardo comme résidence beylicale, était voué à devenir le musée de l'époque moderne. Mais le bâtiment souffre de graves pathologies. Il sert actuellement de réserves pour les collections d'art moderne, soit quelque neuf mille tableaux, mais il recèle également les réserves ethnographiques de l'Institut national du patrimoine, les dépôts de tout ce qui est livres et matériel, ainsi d'ailleurs que le parc automobile. Il faut réhabiliter la toiture du palais, revoir entièrement le système électrique.....Pour engager ces travaux, une étude doit être faite, pour laquelle nous avons obtenu un financement. Et il faut, bien sûr, dégager le palais pour pouvoir intervenir. Aussi faut-il construire des dépôts sur un terrain voisin, et éventuellement utiliser les réserves de la nouvelle cité de la Culture, pour y entreposer les collections de tableaux. Kassar Said pourra ainsi être conçu comme l'annexe du Bardo, et s'inscrire dans la suite de sa visite grâce à sa proximité. C'est là, bien sûr, un projet à long terme
Il semblerait que l'un des points faibles de nos musées réside dans le déficit de communication, et qu'une stratégie soit en cours d'élaboration à ce sujet
Depuis le mois de mars dernier, l'Unesco a lancé un plan d'action en ce qui concerne la Tunisie et l'Egypte, deux pays au patrimoine exceptionnel, et qui vivent des moments importants de leur histoire. Une mission a été envoyée dans notre pays pour nous aider à élaborer une stratégie claire de communication et de marketing. L'Unesco nous aide par un appui logistique en experts qui collaborent à la formation du personnel. Un séminaire a réuni, au mois de juillet, les conservateurs de différents musées, des groupes de travail se sont constitués. On est parti d'un constat : nous avons beaucoup de musées, et peu de public.
Les nouveaux musées, ceux de Nabeul, de Chemtou, sont déserts. Seuls drainent du monde les anciens «produits» : Carthage et le Bardo. Ces groupes de travail étudient actuellement les programmes scientifiques et culturels, la stratégie de communication, l'accueil, le public scolaire... Nous avons décidé de former des équipes de Front office: une quarantaine de jeunes diplômés chômeurs ont été recrutés, spécialistes du patrimoine, mais aussi gestionnaires, designers. Ils travaillent en équipe sur la médiation culturelle, l'accueil, la conception de produits dérivés....Ils seront au Bardo, puisque c'est le premier qui ouvre, puis à Sousse, et plus tard dans les autres musées
Parlons, justement de l'ouverture prochaine du musée du Bardo : ce sera un grand moment?
Nous espérons, en effet en faire un évènement médiatique aux retombées internationales. Cette ouverture est prévue au mois de mai prochain, à l'occasion du mois du patrimoine. Ce sera un événement scientifique, culturel et festif. Il sera marqué par une exposition temporaire sur l'histoire de la création du musée, son rôle de conservatoire du patrimoine, vieux rêve de Kheireddine à une époque où le débat sur l'identité nationale battait son plein. On présentera des archives dont le fonds d'archives Poinssot, prêté par l'Institut national de l'Histoire de l'art français, mais aussi des pièces prêtées par le Louvre.
Une nouvelle exposition permanente présentera des pièces inédites, et offrira un ensemble exceptionnel de sculptures et de mosaïques
Un concert musical de grande qualité permettra de célébrer cet évènement, et si l'on croit savoir qu'Anouar Brahem aurait confirmé sa participation, on chuchote qu'un grand nom du chant lyrique serait pressenti, peut-être Andréa Boccelli.
Vous avez retrouvé, à l'occasion de cette ouverture, une vieille et belle tradition : celle des associations des amis de musées
Gérer un musée, et l'image d'un musée nous a semblé le moment opportun de faire renaître l'ancienne Association des amis du Bardo. Celle-ci avait, à l'époque, aidé à constituer les collections par les dons de ses membres parmi lesquels on peut citer Si Hassan Hosni Abdelwahab, ou encore le Baron Derlanger. Le bureau actuel sera présidé par le docteur Saadedine Zmerli, il comprend des universitaires, des archéologues, des juristes, des journalistes, des architectes, des spécialistes du tourisme, des cinéastes... Cette association jouera un rôle important. Elle a déjà des ramifications internationales car un groupe de soutien du musée du Bardo s'est constitué à Paris grâce à l'action d'un mécène ami de la Tunisie, Christian Giacometto. Et nous avons réussi à mettre sur pied un projet avec TV5 Monde. En collaboration avec la Télévision tunisienne, cette chaîne tournera un film de 52 minutes sur les principaux sites archéologiques tunisiens. Ce film sera projeté en soirée, et tous les droits seront cédés à la Tunisie
Pour tous ces ambitieux programmes, est-ce que vous bénéficiez d'aides et de soutiens autres que ceux de l'Etat?
L'Unesco, la Banque mondiale nous aident énormément, par leur expertise et leur soutien concret. Des musées amis comme ceux du Louvre, ou encore celui de Karlsruhe en Allemagne, nous aident également en ouvrant leurs ateliers de formation à nos jeunes : l'atelier de sculpture et de restauration pour le premier, un atelier de médiation culturelle pour le second. Et nous sommes sûrs que cette ouverture du Bardo attirera beaucoup d'initiatives


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