A la base de cette exposition singulière une rencontre entre deux artistes de la même génération : le Tunisien Nja Mahdaoui et le Milanais Agostino Ferrari de laquelle est né un projet : «Signes de rencontre» présenté du 3 au 29 février au Centre national d'art vivant du Belvédère en collaboration avec l'Institut italien de culture en Tunisie. De prime abord, on peut dire que l'exposition est remarquable de par la valeur de ses artistes généreux et de la qualité prestigieuse de leurs œuvres exposées. Le duo s'est démené pour réaliser à quatre mains le jour du vernissage une performance qui montre à quel point la convergence des styles et l'ouverture des expériences picturales de l'un et de l'autre contribue à enrichir l'œuvre et à lui donner une dimension enrichissante. Agostino Ferrari, qui expose pour la première fois en Tunisie, élabore ses compositions à partir de techniques mixtes. Il utilise le collage et surtout le signe dans une perspective à la fois visuelle, esthétique et émotionnelle. On décèle dans ses œuvres des signes en mouvements, une forme de lettre « m » symbolisant le “m” de la matrice mère ou Milan. On ne sait. En tout cas, elle se dégage d'une fente exprimant sans doute les profondeurs abyssales de la mémoire de l'artiste. Mais au-delà de sa valeur sémantique, l'œuvre de Ferrari est avant tout un moment de peinture jouissif où l'on retrouve le geste ample, l'association des couleurs difficile, l'espace à la fois ouvert et fermé et le mouvement furtif des signes qui donnent une dynamique à l'ensemble. On pense surtout à Inerno-Esterno et Oltre la soglia partagent la même écriture picturale, mais se différencient au niveau des couleurs. Ici un bleu, là un jaune ou un rouge, des couleurs basiques appliquées sur des formes révélant les contours d'une partie de la carte géographique de l'Italie. Le rejoignant dans cette exposition, le grand dessinateur et calligraphe Nja Mahdaoui, formé en Italie, il a consacré toute sa carrière à explorer la calligraphie arabe en lui donnant ses lettres de noblesse. Trois œuvres réalisées en 2009 sont exposées aux côtés de celles de Ferrari dont elles sont totalement opposées. Car si Ferrari utilise le signe abstrait pour élaborer une certaine forme de signification, Mahdaoui, quant à lui, part d'une calligraphie qu'il dépouille progressivement de sa signification pour en faire un motif de décoration. Le public est invité à cette fête picturale en contribuant à apposer sur une grande toile (500 x 120 cm) un signe, un graffiti, un mot, une lettre, une image, enfin une trace qu'Agostino Ferrari a laissée ouverte et inachevée et que les visiteurs de l'exposition sont invités à compléter. Outre cette performance, un court documentaire est également prévu dont le tournage a eu lieu lors du vernissage. Matteo Bernardini, metteur en scène italien, s'est chargé de la prouesse cinématographique qui sera montrée en Italie au printemps 2012. Pour compléter le projet, un catalogue sera réalisé en cette circonstance. Une trace supplémentaire pour cette exposition exceptionnelle. Courez-y.