Lors d'une conférence de presse tenue hier à Tunis, à la clôture de la consultation nationale pour prévenir et éradiquer la torture et les mauvais traitements, organisée du 8 au 10 février, M.Gerald Stabrock, secrétaire général de l'Organisation mondiale contre la torture (Omct), a rappelé que la Tunisie a ratifié, le 29 juin 2011, le protocole facultatif à la Convention des Nations unies contre la torture. Ce traité est entré en vigueur en Tunisie le 28 juillet 2006. Débattant de la date de la ratification de ce protocole, l'intervenant a précisé qu'à l'époque du régime déchu, la question de la torture était taboue. D'où plusieurs atrocités commises à l'intérieur des établissements pénitentiaires, qui sont demeurées sous silence. Aujourd'hui que l'actualité socio-politique du pays n'est plus la même, a-t-il ajouté, l'on s'attend à ce que la Tunisie fasse montre de plus de transparence et de plus de respect des droits de l'Homme. M. Stabrock a indiqué que les établissements pénitentiaires tunisiens ont constitué, des années durant, le cimetière par excellence des droits de l'Homme. Le défi consiste aujourd'hui à désigner des inspecteurs indépendants pour visiter les prisons, les postes de police et les autres lieux de détention, afin de réduire le risque de torture et de mauvais traitements. Abondant dans le même sens, l'intervenant a affirmé que la Tunisie, premier pays maghrébin à rejoindre les 62 Etats qui ont ratifié le protocole facultatif à la Convention contre la torture, entrée en vigueur il y a cinq ans, a besoin d'un mécanisme national de prévention. Lequel mécanisme doit être créé, en vertu du traité onusien, au plus tard une année après la ratification. Soit le 28 juillet 2012. Cela, en raison du fait que la création d'une institution efficace prend du temps. D'où la nécessité d'ailleurs de concevoir un processus qui prépare la mise en place d'une telle institution. S'attardant sur la création de ce mécanisme indépendant, le représentant de l'Organisation mondiale contre la torture a ajouté qu'elle doit faire suite à un processus de consultation «ouvert, non exclusif et transparent, faisant intervenir un large éventail d'acteurs, y compris la société civile». En outre, la loi d'accession au protocole facultatif stipule que le ministre de l'Intérieur et le ministre de la Justice sont chargés de la formation du mécanisme national de la prévention. Cependant, la participation de l'Assemblée Constituante, de la société civile et du reste des acteurs clés est à la fois primordiale dans sa mise en place et garante de son efficacité. S'agissant de la forme que peut prendre le mécanisme national de prévention contre la torture, le conférencier laisse entendre qu'elle peut être diverse, en fonction du contexte national, évoquant certains exemples tels que la nouvelle institution spécialisée dans la prévention de la torture (la France, le Sénégal), l'Institution des droits de l'Homme (le Mali, les Maldives), l'Institution nationale des droits de l'Homme avec la participation de la société civile (le Danemark, la Slovénie) et, dans le cas du Royaume-Uni et de la Nouvelle-Zélande, un collectif de plusieurs institutions. Mme Esther Schaufelberger, responsable des programmes pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord au sein de l'Association pour la prévention de la torture (APT), insiste pour sa part sur le fait que l'éradication de la torture est tributaire de l'effort de toutes les forces vives du pays. Ce faisant, il faut commencer, admet-elle, par la réhabilitation du personnel des établissements pénitentiaires nationaux. Et ce, en leur assurant une formation allant de pair avec les besoins qu'ils affichent, y compris sur le plan psychique et social.