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Instaurer un système de gestion des crises naturelles
Interview - M. Kamel Ayadi, fondateur du Centre de réflexion stratégique sur le développement du Nord-Ouest
Publié dans La Presse de Tunisie le 17 - 02 - 2012

L'importante vague de froid qui a sinistré la région du Nord-Ouest, isolé et affecté les populations locales, surtout rurales, ne va pas être oubliée de sitôt. La période post-intempéries est redoutée par les scientifiques et techniciens plus que l'épisode d'isolement des bourgs et des familles par les neiges. Les inondations soupçonnées surtout si les conditions climatiques ne vont pas s'améliorer font craindre le pire et suscitent nombre de questions sur la gestion actuelle de la crise et sur les solutions envisageables pour éviter de nouveau ce genre de catastrophe qui est en définitive plus humaine que naturelle. Interview.
Comment évaluez-vous la situation dans le Nord-Ouest et dans la zone de Aïn Draham en particulier et quels sont, selon vous, les risques encourus après ces importantes chutes de neige ?
La situation est très critique et les dégâts importants, notamment pour les habitants qui étaient déjà en situation de précarité. Certains ont presque tout perdu : la maison et les quelques têtes de bétail qu'ils possèdent. Des maisons ont lâché sous le poids de la neige et d'autres menacent de céder dans les prochains jours. L'autre problème qu'il convient de ne pas sous-estimer et de prendre en considération avec beaucoup d'attention c'est la santé de ces personnes qui sont exposées à diverses maladies. Les dégâts concernent également l'infrastructure qui a été sérieusement atteinte et on craint que son état soit aggravé sous l'effet des glissements de terrains qui ont commencé. A cela, il faut ajouter un risque majeur susceptible de déborder hors de la zone de Aïn Draham et de toucher d'autres villes du Nord-Ouest, ce sont les inondations accompagnant la fonte des neiges. Il faut s'attendre à un important ruissellement et comme le sol est déjà saturé en eau, ces écoulements vont arriver aux barrages de la région, Bouhertma et Béni M'tir, qui ont déjà atteint plus de 95% de leur capacité de stockage. Le ministère de l'Agriculture a pris des mesures pour alléger ces barrages du surplus d'eau, lequel arrive en fin de parcours au barrage Sidi Salem-Oued Zarga. Or, celui-ci aussi n'est pas loin du maximum de sa capacité. Il faut souhaiter que les conditions climatiques s'améliorent réellement dans les prochains jours, qu'il n'y ait pas de pluies fortes ou persistantes, car dans le cas échéant, c'est le débordement de Oued Medjerda qu'il faudra craindre ce qui pourrait atteindre Medjaz El Bab et Jedaïda, notamment. Ce qu'il faut savoir, c'est que les ingénieurs et techniciens du ministère de l'Agriculture maîtrisent les techniques nécessaires pour faire face aux phénomènes conséquents à la fonte des neiges, mais c'est l'infrastructure de stockage des eaux existante qui a des limites.
Quelles sont, selon vous, les solutions envisageables dans le court, moyen et long terme?
Dans l'immédiat, il faut s'atteler à gérer au mieux la situation. En même temps que les opérations de secours de la population, les techniciens du ministère de l'Agriculture sont mobilisés pour veiller sur l'évolution de la situation des eaux bien que les marges de manœuvre soient limitées. Cela dit, un plan d'intervention s'impose dans le court terme pour apporter les secours et l'assistance nécessaires aux populations locales qui risquent de se retrouver sans rien dans les prochains jours. A cette occasion, le Centre de réflexion stratégique sur le développement du Nord-Ouest appelle le gouvernement à créer, dans les plus brefs délais, une commission technique nationale d'évaluation et d'investigation sur les conditions de gestion de cette crise afin de tirer les enseignements nécessaires et de prendre les précautions qui s'imposent pour le futur. Ce travail est important pour identifier les défaillances car il faut tirer les leçons des expériences malheureuses et coûteuses comme celle-ci. Cette fois, les gens n'ont pas été alertés, ils ont été bloqués pendant deux jours sur les routes, personne ne les a avertis des risques de coupures des routes. Il ne s'agit pas de jeter les responsabilités sur qui que ce soit mais il faut comprendre ce qui s'est passé réellement et se préparer pour que ce genre de crise ne se répète pas. C'est à partir de ce genre d'expériences que les gouvernements, dans le monde entier, sont jugés, autrement dit des leçons qu'ils peuvent en tirer et des corrections qu'ils sont capables d'apporter pour prémunir à l'avenir notre société de ce genre de catastrophe. Cette action d'évaluation à laquelle des experts indépendants et des représentants de la société civile prendraient part, loin de toute instrumentalisation politique, est d'autant plus nécessaire que toutes les études montrent que la Tunisie est entrée dans une phase où la fréquence des catastrophes a augmenté. Deux mois en arrière, il y a eu des inondations dans le Nord-Ouest. Cette évaluation devra déboucher sur la mise en place un système d'alerte, de prévention et de gestion des catastrophes. Un système efficace qui permet d'alerter correctement les populations, et ne pas diffuser un simple communiqué, et de mettre en œuvre tous les scénarios possibles allant de l'évacuation de la neige avec les engins adéquats jusqu'au scénario extrême qui consiste à évacuer la population. Là aussi, il faut des moyens adéquats d'évacuation, des moyens de communication ainsi que des structures d'accueil. L'évaluation servira enfin à capitaliser l'expérience qui a été acquise sur le tas, cette fois. Ce travail d'évaluation peut aussi aboutir à la création d'une structure publique dans le Nord-Ouest qui sera consacrée à la prévention et à la gestion des catastrophes. Cette structure pourra s'inspirer des expériences internationales et proposer une ingénierie adaptée à ces régions dont les normes et critères de constructions et d'adduction de l'eau par exemple sont spécifiques à leur relief. A mon avis, il est temps de tirer les leçons et les conclusions nécessaires. Les souffrances de la région de Aïn Draham ne vont pas s'arrêter avec la fin des chutes de neige, contrairement à ce que croient beaucoup de personnes. Je voudrai également indiquer qu'il est temps de revoir le plan directeur des eaux du Nord et de programmer la construction de nouveaux barrages.
Le relief montagneux et accidenté de la région de Aïn Draham ne constitue-t-il pas un obstacle au développement de l'infrastructure routière, du réseau de distribution de l'eau potable, du réseau électrique et du réseau d'assainissement ? Si oui, quelles solutions peut-on préconiser pour que cette région ne soit pas victime de son relief et de la rudesse de son climat?
Il est vrai que le relief de la région constitue quelque part un obstacle au développement de l'infrastructure en la rendant coûteuse, mais en considérant ce relief comme un atout, il peut être à l'origine du développement. L'expérience a été tentée avec succès au Liban, en Jordanie et en Italie, par exemple. Aïn Draham recèle des richesses pouvant servir au développement de l'écotourisme, au tourisme local. Une période de neige comme celle-ci aurait pu être exploitée pour redynamiser le tourisme dans la région si celle-ci disposait de l'infrastructure nécessaire, des services de qualité et des activités de loisirs et de distraction. De ce fait, il faut regarder cette région sous un autre angle et garder à l'esprit qu'elle constitue un patrimoine, qu'elle représente les poumons de la Tunisie et son château d'eau en recevant le niveau pluviométrique le plus élevé, à savoir 1.500 mm par an. Les atouts de la région dépassent les volumes d'investissements nécessaires à la valorisation de ces richesses. D'ailleurs, ce relief n'a pas empêché la Steg de déployer un réseau électrique desservant plus de 90% de la population rurale. Ce qui manque le plus c'est l'infrastructure routière. Il n'y avait pas de volonté pour l'améliorer. Aïn Draham est une région mal desservie et son infrastructure est sujette aux glissements de terrain car le sol est argileux. Bien que la cause majeure des glissements de terrain soit due à la nature du relief et des sols argileux, il existe tout de même des solutions techniques à ces glissements moyennant des investissements plus importants et une maintenance régulière.
Vous êtes le fondateur du Centre de réflexion stratégique pour le développement du Nord-Ouest. Quels en sont les objectifs et où en êtes-vous actuellement ? Concrètement, comment comptez-vous agir pour aider autant que possible le gouvernement à trouver les solutions qui s'imposent à l'un des premiers objectifs de la révolution, à savoir le développement régional ?
L'idée principale qui a présidé à la création du Centre c'est de pouvoir fédérer les compétences de la région en vue d'amorcer une réflexion profonde sur le développement régional en général et celui du Nord-Ouest en particulier. Au cours des derniers mois, nous avons essayé d'identifier les actifs de la région (le stock des richesses) et de faire une lecture des anciens plans de développement en vue de repérer les défaillances et dégager des pistes de réflexion. Nous sommes ainsi parvenus à quelques conclusions. Cette région peut réellement être une locomotive de développement et atteindre un niveau de croissance supérieur au niveau moyen des dernières années (5%). Elle regorge de richesses mal exploitées. La première est l'eau: 75% des eaux de surface se trouvent dans le NO, 40% des richesses forestières, 60% de la production de blé. Sans compter les autres potentiels en matière de développement du tourisme écologique et de l'agriculture biologique. Pourtant, comble du paradoxe, la région se situe au bas de l'échelle des indicateurs de développement. Alors, qu'est-ce qui ne va pas ? L'équipe du Centre a constaté que la région n'attire pas les investissements privés. Pendant les dix dernières années, la part de chaque individu en matière d'investissements privés est de 600 dinars en deçà de la moyenne nationale. Dans le Nord-Ouest, il y a 0,24 entreprise privée pour mille habitants, alors que ce chiffre peut être multiplié par 5. C'est là un des éléments d'explication du niveau élevé du chômage et de la pauvreté. Cependant, la région dispose d'un grand potentiel d'investissement en matière d'industries de transformation agricole, minière et de substances utiles comme le marbre. Or, les produits bruts sont extraits de la région, mais la transformation se fait ailleurs. Ce qu'il faut c'est plus d'équilibre entre les régions dans la répartition de ces industries. Le peu d'intérêt des investisseurs pour cette région peut s'expliquer par l'état de l'infrastructure, c'est pourquoi le développement de cette dernière est un préalable au développement économique de la région, tout autant que, d'ailleurs, la promotion des services de base (santé, éducation...) et la qualité de vie. Ce sont là des axes sur lesquels les membres du Centre sont en train de réfléchir tout en essayant de développer une stratégie de marketing territorial. Il ne suffit pas d'avoir des infrastructures et des potentialités mais il faut les faire connaître et œuvrer pour augmenter l'attractivité de la région.


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