«L'universel et le particulier dans la pensée et la création», tel est le thème du colloque international organisé, hier au Kram, dans le cadre des activités culturelles de la 28e édition de la Foire internationale du livre de Tunis. A l'ouverture du colloque, M. Boubaker Ben Frej, directeur de la Foire, a indiqué que le thème choisi illustre la volonté de s'ouvrir sur les autres cultures et de conforter les valeurs de la diversité culturelle. C'est que, a-t-il dit, la Foire s'emploie à promouvoir la culture tunisienne, ses créations et ses symboles, tout en s'ouvrant sur l'Autre. Qu'est-ce que créer aujourd'hui dans un monde transculturel? En quoi les nouvelles technologies ont elles un impact sur l'interférence des arts ? Telles sont quelques-unes des questions soulevées dans le cadre de ce colloque qui a réuni des personnalités culturelles de tous horizons. Venus d'Orient et d'Occident, les participants ont discuté avec leurs collègues tunisiens des problèmatiques culturelles contemporaines et ont tenté d'esquisser des analyses alternatives pour un nouveau développement culturel. Les notions de diversité culturelle et de mondialisation sont au cœur de la réflexion engagée par ce colloque. En effet, au temps de la globalisation, les particularismes tendent à s'effacer sous la menace d'une standardisation culturelle qui prend la forme d'un nivellement des cultures, façonnée par la toute puissance des nouveaux médias et l'instantanéité de la diffusion de l'information à l'échelle mondiale. Dans cette société du savoir, l'universel et le particulier sont constamment en relation dialectique. Cette nouvelle situation génère de nouveaux concepts comme la «glocalité», mais suscite également des fusions et des tensions. Dans certains cas, le métissage des cultures est à l'ordre du jour: cela débouche sur des œuvres où l'universel et le particulier se fondent l'un dans l'autre. Dans d'autres cas, ce sont des situations de rejet, voire d'affrontement qui naissent. En effet, les particularismes ou les singularités entrent en résistance et essaient de s'affirmer face à ce qui est perçu comme la culture dominante. Dès lors, si les uns appellent à l'entrelacement des traditions au sein d'une interculturalité assumée, d'autres voix s'inquiètent de la standardisation grandissante de la pensée et de la création. Plusieurs exemples précis seront analysés par les participants à ce colloque. Ils portent sur la socialité culturelle, le rapport des particularismes à l'universalité, les horizons nouveaux de la création ou encore la naissance de passerelles vers l'universel. Traduction : un facteur de rapprochement des peuples Les communications faites lors de la séance de clôture ont été axées sur la traduction et son rôle dans le rapprochement des individus et des peuples, en tant qu'outil idéal pour connaître la culture de l'autre. Dans ce contexte, les intervenants ont mis l'accent sur la nécessité de s'attacher à l'identité et à l'authenticité pour atteindre, par la suite, l'universel, conçu comme le prolongement du local. D'autres intervenants ont évoqué l'impact de l'image dans la compréhension de la culture de l'autre et de ses préférences, faisant remarquer que l'image est une arme à double tranchant: elle peut donner une idée positive sur l'autre comme elle peut générer des préjugés et des idées fausses. Les participants à ce colloque ont souligné la nécessité de connaître la langue de l'autre pour mieux dialoguer avec lui et mieux saisir la teneur et la profondeur des expressions créatrices véhiculées par la musique, le cinéma, le théatre, la littérature, etc. Ils ont affirmé que la diversité culturelle est une réalité palpable dans le monde et qu'il faut recourir au dialogue culturel pour conforter le brassage civilisationnel et atteindre l'universel. Penseurs, écrivains et universitaires dialoguent, deux jours durant, mêlent les apports de leurs disciplines pour dresser un état des lieux de cette question d'une grande actualité. Une quinzaine de participants analysent, ainsi, cette dialectique de l'universel et du particulier dans la pensée et la création à travers le prisme de tous les arts. Les trois séances de cet important colloque sont respectivement présidées par Fethi Triki (philosophe), Mohamed Mahjoub (philosophe) et Charbel Dagher, un chercheur libanais versé dans les questions de l'esthétique. Avec ce colloque, la Foire du livre souligne sa vocation intellectuelle et son caractère de forum où se rencontrent les penseurs de diverses traditions.