En général, c'est de père en fils ou de mère en fille que se transmettent les traditions, le talent, le savoir-faire. Ici, curieusement, c'est la fille qui, semble-t-il, a ouvert la voie de l'écriture à sa mère. Jeune plume prodige, Yasmine Karray, 14 ans, a fait l'événement en matière d'édition. A-t-elle inspiré sa mère, ou lui a-t-elle donné le goût de la chose écrite? Le fait est que Lamia Karray vient de publier simultanément deux ouvrages sur des sujets brûlants d'actualité : Le Hijab et Révolution, et après. Lamia Karray qui est docteur ingénieur en science et génie des matériaux de l'Ecole des mines de Saint-Etienne, membre du Mouvement Français de la Qualité, a fondé une entreprise de mise en place de systèmes de qualité. Dans «Le Hijab, devoir islamique ou coutume préhistorique ?», elle pose et se pose les fameuses questions qui fâchent tant de nos jours : quelle est l'origine du voile, quelle est son histoire, quel est le secret de sa propagation, et est-il réellement une prescription islamique ? Incitant le lecteur à se forger une opinion toute personnelle à partir d'éléments précis et documentés, elle présente une analyse objective, étayée d'informations et de références indiscutables, loin des sentiers battus et des idées toutes faites. Le voile, le saviez-vous, est d'origine sumérienne, 4.000 ans avant notre ère, et avait une signification sociale, et non religieuse. Il a été rendu obligatoire au Moyen-Orient au XIIe siècle avant notre ère, à l'époque Assyrienne. Il faudra attendre Saint Paul et la chrétienté pour que le voile prenne une connotation religieuse. Analysant les trois appellations utilisées dans le texte saint du Coran, Hijab, Jilbab et Khimar, Lamia Karray cite les versets où on les retrouve, et s'attache à comprendre, et à nous permettre de comprendre pourquoi certains y voient une ordonnance islamique pour le port du voile, et d'autres pas. Elle conclura en présentant les points de vue des penseurs traditionnalistes, ainsi que celui des penseurs progressistes, laissant à chacun la liberté de son choix. Son second ouvrage, un fascicule condensé et sans prétention, l'auteur essaie de répondre aux questions que tout le monde se pose : «Révolution... et après?». Que sera la Tunisie face à son avenir ? Comment préserver ses traditions religieuses et culturelles tout en demeurant ancrés dans la modernité ? Comment harmoniser pluralisme politique et pluralisme culturel et religieux ? Partant du principe que «ce qui se conçoit bien s'énonce clairement», Lamia Karray commence par définir les termes de notre lexique actuel, et les différentes terminologies de ce qui peut sembler une évidence, mais ne l'est pas toujours : démocratie, laïcité, état de droit, hiérarchie. Puis elle étudiera les positions relatives entre politique et religion du point de vue des islamistes et du point de vue des laïques. Et après s'être placée des différents côtés pour poser les questions essentielles : «Est-il nécessaire que l'Etat soit laïque pour que les libertés soient préservées ?», «La laïcité ne risque-t-elle pas de nous éloigner de l'Islam ?», «Pourquoi l'éventualité d'un pays islamique et moderne n'est-elle pas envisageable ?». Elle pose la seule vraie question : Quelle est la voie la plus adéquate pour la Tunisie. Au lecteur d'y répondre.