• Reprise accrue des actions de contrôle économique et sanitaire • Les échanges frontaliers terrestres en produits alimentaires seront soumis désormais à une autorisation officielle • Importation des œufs et de la viande rouge afin d'assurer un approvisionnement suffisant pour répondre aux besoins de la demande La Commission nationale pour la maîtrise des prix a organisé, hier, au Bardo, une conférence visant à dresser l'état des lieux de la politique de maîtrise des prix, notamment des produits de consommation de base, à informer l'opinion publique sur les nouveaux mécanismes mis en place, afin d'équilibrer la balance économique et sociale et à sensibiliser tous les intervenants sur l'impératif de mieux conjuguer les efforts pour faire face aux divers dépassements. La conférence a également été l'occasion de mettre en exergue l'importance du contrôle économique routinier mais aussi du contrôle spécifique, axé sur les frontières terrestres. Présidant l'ouverture des travaux de cette rencontre, M. Ridha Saïdi, ministre chargé des Affaires économiques et sociales, a rappelé que le premier trimestre de l'année 2012 a été marqué par un déséquilibre consistant tant au niveau de l'approvisionnement qu'à celui de l'offre/ demande. Un déséquilibre dû, entre autres, au trafic transfrontalier illicite des denrées alimentaires et aux difficultés sécuritaires entravant les actions de contrôle. A l'inflation financière correspondait une stagnation économique. Le ministre rappelle également que l'année précédente a connu une régression économique de l'ordre de -2,2%. Les augmentations salariales sans précédent et l'octroi imprévu de bourses diverses n'a fait qu'enfoncer le clou et déséquilibrer l'équation offre / demande. Pour remédier à cette situation socioéconomique, le gouvernement a mis en place de nouveaux mécanismes chargés de maîtriser les prix, de promouvoir le contrôle économique, surtout au niveau des flux sur les frontières tuniso-libyennes et tuniso-algériennes. Suite à la réunion ministérielle en date du 16 février 2012 et au Conseil ministériel du 19 avril 2012, il a été décidé la création d'une commission nationale pour la maîtrise des prix. Cette commission comprend quatre sous-commissions à fonction exécutive. Il s'agit de la commission de l'approvisionnement et des prix; de la commission de lutte contre le trafic; de la commission du contrôle économique et sanitaire et de la commission de l'information. «Le travail de ces commissions a commencé à porter ses fruits. Il a été, en effet, procédé à l'application des mesures relatives aux prix de certains aliments, comme la pomme de terre, les œufs et les viandes. Nous avons, pour cela, instauré une coordination efficiente avec les diverses parties concernées, comme l'Armée nationale et la douane pour mieux maîtriser la situation sur les frontières terrestres. La coordination a également impliqué la Libye et l'Algérie dans l'optique de déterminer, ensemble, la fixation d'un point frontalier bien précis», indique M. Saïdi. Et d'ajouter qu'un communiqué portant sur la maîtrise des prix a été publié, le 7 mai 2012, et adressé aux structures régionales pour une meilleure sensibilisation sur ce problème. Baisse des prix des produits alimentaires Prenant la parole à son tour, M. Bechir Zaâfouri, ministre du Commerce et de l'Artisanat, a fourni à l'assistance une idée détaillée sur les réalisations de la période qui vient de s'écouler et sur les enjeux à venir. «Ce travail n'est point une campagne ponctuelle mais un travail qui se veut continu. En effet, tout a commencé par la visite tenue le 22 février au marché de gros de Bir el Kasaâ puis celle en date du 19 avril», rappelle le ministre. Il faut dire que l'inflation a enregistré un léger recul à partir du mois de mars pour passer de 5,7% à 5,4%. La première visite à Bir El Kasaâ a permis de maîtriser les prix de près de 70% des produits alimentaires. Mais en avril, elle a encore augmenté avec un taux de 5,5%. Ce n'est qu'à partir du 19 avril que les prix ont commencé à baisser. Le ministre du Commerce et de l'Artisanat a évoqué le problème de la régression de l'approvisionnement de certains produits comme la pomme de terre. Le 22 février 2012 à Bir El Kasaâ, l'approvisionnement en pomme de terre n'était que de 35 tonnes alors qu'il était en 2011 de 92 tonnes. «La commission a fixé un prix maximal de 750 millimes le kilo et a importé quelque trois mille tonnes pour réguler le marché. Il est également question d'importer 40 mille tonnes pour satisfaire les besoins exceptionnels du mois de Ramadan», souligne le ministre. Pour ce qui est de l'approvisionnement en tomates, il a également chuté pour ne compter en avril que 50 tonnes alors qu'il a enregistré quelque 133 tonnes en 2011. Quant aux fruits, l'approvisionnement connaît un certain soulagement avec 250 tonnes enregistrés le 18 avril contre 105 en 2011. Le ministre indique qu'il sera procédé à des consultations portant sur l'importation des bananes. Le domaine des produits laitiers connaît, quant à lui, une nette amélioration. L'abondance de l'offre permet, en effet, de préserver l'excédent. «Un projet sur l'assèchement de l'excédent du lait est evisagé», note M. Zaâfouri. S'agissant de l'approvisionnement en œufs, le ministre a indiqué que le trafic clandestin des œufs vers la Libye pose un réel problème, dans la mesure où 5.000 unités sont exportées clandestinement chaque jour. D'où l'impératif d'importer quelque 25 millions d'œufs et de compléter ainsi un stock national insuffisant car ne dépassant pas 19 millions d'œufs actuellement. Les efforts se conjuguent, par ailleurs, pour importer des viandes rouges en provenance de l'Inde. Situation oblige, puisque l'offre décline à cause, sans doute, du trafic des produits alimentaires via les frontières terrestres. Le ministre rassure sur la qualité des produits qui seront importés notant qu'une équipe de vétérinaires et de spécialistes s'est déplacée sur les lieux pour s'assurer de la qualité et de la conformité des produits aux normes sanitaires. Quant aux volailles, le ministre a indiqué que l'approvisionnement en dindes est de 56 tonnes et que le prix du poulet a chuté pour atteindre 3D900 dans certaines régions. Il y a lieu de noter, par ailleurs, que la commission nationale pour la maîtrise des prix a décidé de réinstaurer le principe de l'exportation terrestre réglementaire, et ce, en imposant le système d'autorisation sur l'exportation de certains produits comme les oignons, les poivrons et autres. Le ministre du Commerce et de l'Artisanat a prévenu qu'à la moindre atteinte aux agents de contrôle économique, des poursuites judiciaires seront engagées à l'encontre des éventuels agresseurs. «En Mars et avril, nous avons enregistré 10 agressions sur les agents de contrôle. Et en mai, nous en avons enregistré 11, ce qui est inadmissible», renchérit le ministre. Il a également indiqué que le contrôle sanitaire sera axé sur 9 souks importants mais aussi sur tous les souks dans toutes les régions. Ce travail permettra aux agents d'émettre des rapports journaliers qui seront examinés par la commission. Ce travail acharné a permis de marquer des points positifs dans un contexte délicat, préoccupant tant le gouvernement que le citoyen. En 2011, la régression du taux d'approvisionnement a été de 18%. Actuellement, elle ne compte que 8%; un résultat atteint grâce à la pression accrue sur les circuits parallèles. Projet de stockage des eaux pluviales au profit du Cap Bon L'intervention de M. Mohamed Ben Salem, ministre de l'Agriculture, a traité du problème de l'approvisionnement du marché en produits agricoles. Le ministre a montré du doigt la chute remarquable des prix de certains produits, notamment le piment, —qui a atteint selon ses dires 130 millimes le kilos au marché de gros—, la jugeant comme un indicateur d'un impact négatif sur l'économie. «Il faut équilibrer la balance et ne pas favoriser les extrêmes. Si les poivrons se vendent à 130 millimes, l'agriculteur ne prendra pas la peine, en 2013, de cultiver ce produit, car son rendement ne lui permet même pas de couvrir ses charges», s'exprime-il. Il a indiqué que la production agricole connaît, actuellement, une croissance notable, en comparaison de l'année 2009 et l'année 2010; une croissance qui frôle les +20%. Le ministre rappelle que l'approvisionnement en produits agricoles est plus que jamais touché par le trafic frontalier mais aussi par la consommation des Libyens résidant en Tunisie et dont le nombre est estimé à 500 mille âmes. «Plus encore: 770 millions de dinars ont été versés sous forme d'aides sociales, de projets mais aussi pour alimenter le programme Amel pour la lutte contre le chômage; chose qui influe forcément sur la capacité d'achat du Tunisien», explique le ministre. M. Ben Salem propose l'élaboration d'accords de partenariats avec l'Algérie et le Maroc dans l'optique de promouvoir l'export des produits agricoles. Il saisit l'occasion pour informer sur un projet agricole en vue, qui consiste en le stockage des eaux pluviales hivernales pour alimenter la région du Cap Bon en eau d'irrigation et en eau potable. Ce projet intervient comme alternative au canal qui lie La Medjerda au Cap Bon et qui ne parvient pas, en été, à répondre comme il se doit aux besoins du Cap Bon en eau. Le ministre évoque par ailleurs le problème de la consommation de l'huile d'olive. En effet, notre pays produit chaque année quelque 180 mille tonnes d'huile d'olive. Le Tunisie n'en consomme que 30 mille tonnes. « Je trouve inadmissible qu'un pays qui produit l'une des meilleures huiles d'olive au monde importe de l'huile végétale qui se vend à 6dt. Pour inciter le Tunisien à consommer l'huile locale, nous lui avons mis à sa disposition des variétés d'huile d'olive extra à seulement 3dt600», ajoute le ministre. M. Ali Laârayedh, ministre de l'Intérieur, a indiqué que les efforts se poursuivront pour mener à bien cette mission. Pour ce faire, les actions de contrôle sur les frontières terrestres seront renforcées afin de vérifier la nature des marchandises en question. Le contrôle concernera également les camions se dirigeant vers les régions du nord-ouest et du sud. Le ministre de l'Intérieur n'a pas manqué d'appeler les consommateurs à se méfier des produits introduits clandestinement sur le marché et dont la provenance est inconnue. Il rassure les consommateurs sur la pérennité de ce programme, notamment durant la saison estivale mais aussi durant le mois saint. Prenant la parole à son tour, M. Ridha Kezdeghli, conseiller chargé de l'information auprès du chef du gouvernement, a donné un aperçu sur la sous-commission de l'information, relevant de la Commission nationale pour la maîtrise des prix. Cette sous-commission a pour finalité d'alimenter les médias en informations actualisées sur le programme de la maîtrise des prix. Une finalité qui ne peut être atteinte sans une volonté confirmée de la part des parties concernées dont les médias pour la transmission de l'information juste. L'orateur a indiqué que la communication avec les Tunisiens est possible via le compte facebook «ensemble pour faire baisser les prix» ,via le site web officiel du ministère du Commerce et de l'Artisanat www.commerce.gov.tn, mais aussi à travers le numéro vert 80 100 191. Clôturant la séance plénière, M. Hamadi Jebali, chef du gouvernement, a indiqué que le thème de cette rencontre constitue un thème délicat, puisqu'il touche «le panier du Tunisien», soulignant qu'il y va de la dignité du citoyen puisqu'il n'y a pas de dignité dans la précarité. Il a également insisté sur le renforcement du pouvoir d'achat par le biais de la maîtrise des prix, notamment ceux des produits élémentaires. Le chef du gouvernement a rappelé que le gouvernement a pris plusieurs mesures prioritaires, dont la consolidation des actions de contrôle économique et sanitaire, l'encouragement à la production, l'éradication des phénomènes du trafic et de la spéculation, la maîtrise des circuits de distribution ainsi que la promotion du système de stockage des provisions. M. Jebali a salué les résultats enregistrés récemment grâce au travail de la Commission nationale pour la maîtrise des prix, aux commissions annexes ainsi que l'impact du communiqué en date du 7 mai 2012.