• 73 députés présentent une motion de censure Soixante-treize députés de diverses formations politiques, dont quelques uns d'Ettakattol et du CPR, ont annoncé hier après-midi leur intention de présenter une motion de censure contre l'actuel gouvernement. Pour être votée, la motion de censure requiert la majorité absolue, 109 voix en l'occurrence, et dans ce cas, le gouvernement serait considéré comme démissionnaire. Arithmétiquement, la probabilité de voir cette motion adoptée est extrêmement faible. Les 73 députés s'étaient retirés de la séance plénière de l'Assemblée en milieu d'après-midi, dans un brouhaha indescriptible et en entonnant l'hymne national. Peu avant 15h00, l'agitation était déjà à son comble à la Constituante. Les médias présents en force et les députés étaient réunis en grand nombre, les bruits de coulisse annonçaient de l'orage, il éclata un peu plus tard dans la grande salle. Face à la fermeté de Ben Jaâfar qui a refusé de bousculer l'ordre du jour prévu de la plénière pour introduire l'affaire Mahmoudi dans les débats, la séance fut suspendue dans les éclats de voix, l'émotion et l'hymne national. Le chef du gouvernement auditionné le 29 juin Si l'on se souvenait de la torpeur envahissante de l'Assemblée au temps du régime déchu, on ne peut que se réjouir de cette bruyante vivacité. Mais entre interpellations entre le président et les députés, coupures de micro et gesticulations incontrôlées, le cafouillage était à son comble associé à un air de manque de retenue, voire de tenue. Quoi qu'il en soit et après une suspension de la séance, le président annonce qu'une plénière se tiendra finalement ce vendredi 29 juin en présence du chef du gouvernement Hamadi Jebali. Ils étaient 7 blocs parlementaires, hormis Ennahdha et une partie du CPR, à avoir requis l'inclusion de l'affaire Mahmoudi à l'ordre du jour. Demande rejetée. La dernière tentative a été faite par les chefs de groupes parlementaires qui se sont réunis in extremis avant la plénière avec le président Ben Jaâfar qui «ne voyant pas l'urgence» a campé sur sa position. «Nous ne sommes pas des fantoches», accuse Selma Baccar, députée El Massar, dans une déclaration à La Presse. «Quelle est notre valeur en tant que représentants du peuple, s'interroge-t-elle, le pouvoir suprême est devenu la dernière roue de la charrette. La présidence de la République a annoncé qu'elle a saisi l'ANC, le président Ben Jaâfar affirme qu'il n'a rien reçu. Nous ne sommes pas les dindons de la farce. Ils n'ont qu'à venir et s'expliquer». Quant à Habib Kheder, rapporteur général, député Ennahdha, il nous a répondu qu'à sa connaissance, la saisine de l'ANC par la présidence n'est pas parvenue, et même si cela avait été le cas, précise-t-il, «le règlement intérieur, selon l'article 20, stipule qu'à notre tour nous devons saisir le tribunal administratif, lequel à son tour convoque une plénière, et émet un jugement, tout cela n'a pas été fait. Il s'agit du règlement de l'organisation des pouvoirs publics. La petite constitution ne nous attribue pas d'arbitrer dans ce litige sans l'avis du tribunal administratif». Propos conformes en tous points au texte de l'article 20, soit dit en passant. Le doyen Fadhel Moussa, président de la commission de la justice civile, administrative, financière et constitutionnelle, et référence reconnue en droit constitutionnel, relève dans une déclaration à La Presse, qu'«une grave crise politique se manifeste à travers des déclarations virulentes des deux présidences et que cela donne une mauvaise image du pouvoir exécutif dans notre pays». «Je m'étonne, dit-il, qu'une question majeure comme celle-ci ne soit pas discutée par l'Assemblée constituante, l'article 20 lui confère ce rôle d'intervention qui apparemment a été actionné par le président de la République. L'Assemblée doit discuter et la procédure semble avoir été engagée. C'est une affaire grave, indépendamment de la position qu'on peut avoir». In fine, il est clair pour tout le monde que Baghdadi Mahmoudi ne reviendra pas en Tunisie. L'extradition est un acte irréversible. La seule autorité qui peut prendre possession de l'ancien Premier ministre libyen est la Cour pénale internationale. Mais cela semble exclu. Pour ce qui concerne les affaires tuniso-tunisiennes, un scénario d'une sortie de crise honorable pour tout le monde serait-il en train de se préparer ? Quelques signes avant coureurs semblent l'indiquer ; Ennahdha a publié hier après-midi un communiqué conciliant, mettant l'accent sur «son attachement à la sauvegarde du statut du président de la République et l'importance de son rôle crucial dans la réussite du processus de la transition démocratique de la Troïka « «au pouvoir à leur tête, le président de la République, Dr Mohamed Moncef Marzouki». Hier les différents responsables de la présidence de la république et la présidence du gouvernement étaient injoignables toute la journée, portables éteints, les secrétariats déclarant qu'ils étaient en réunion. Nous avons également appris que des consultations auprès d'experts réputés en droit administratif et en droit constitutionnel étaient effectuées par la présidence. Peut-on supposer donc que le scénario d'un compromis est en train de se concocter ? Affaire à suivre donc...