L'initiative était à prendre; et depuis longtemps. Elle l'a été voilà seulement cinq ans, mais la voici déjà devenue une réalité bien ancrée dans le calendrier des principaux événements culturels et festifs du pays. Il s'agit du festival international de la mosaïque. Né en 2005, il a pour berceau la localité d'El Jem. Et ce n'est pas un hasard. Il n'y a qu'à visiter le musée archéologique de l'endroit pour se rendre compte que cette forme d'expression artistique est très profondément ancrée dans l'ancienne Thysdrus et qu'elle y a atteint des sommets dans la perfection technique, la profusion et la diversité des thèmes qui y ont été traités. Il n' y a, d'autre part, qu'à se promener en ville et dans ses environs pour mesurer l'ampleur de l'essor que connaît cette activité re-née sur la terre ancestrale après une éclipse de plus d'un millénaire : des dizaines d'ateliers qui emploient plus de 500 artisans et dont certains travaillent exclusivement pour l'exportation. Il s'agit donc bien d'une renaissance et non d'une résurgence sans lendemain. Né dans la foulée des travaux de restauration de pavements antiques dans les sous-sols du musée du Bardo où se sont formés sur le tas les premiers artisans mosaïstes dès le milieu des années 60 du siècle dernier avant l'introduction de cette spécialité dans les cours de formation professionnelle, le phénomène a pris de la consistance au cours des deux dernières décennies et ne se limite pas à la seule ville d'El Jem. Des ateliers ont éclos en bien d'autres endroits, notamment du côté de Carthage. Mais ce sont nettement les Lejmis qui se sont le plus investis dans ce nouveau créneau au point d'en faire une activité économique de premier plan, pourvoyeuse en devises à hauteur de 4 millions de dinars par an ! Il n'est donc que justice que leur ville en devienne la capitale une fois par an. Mais vitalité n'est pas nécessairement synonyme de pérennité. Surtout en notre ère de changement rapide dans les modes et le savoir-faire. En témoigne le secteur du textile qui s'est effondré en bien des endroits faute d'avoir su s'adapter au rythme de l'évolution dans les goûts et les techniques. A l'échelle artisanale où l'impératif recherche/développement est hors de portée des opérateurs, il était important de fournir une assistance de ce type à l'ensemble de la profession afin de lui permettre de faire face à toute concurrence et de se positionner favorablement sur les marchés intérieur et extérieur. L'association Art et Jeunesse d'El Jem, fondée en 2000 pour participer avec les autres composantes associatives à la dynamisation de la vie culturelle et ludique de la cité, a pris sur elle de servir de relais à l'action de l'Office national de l'artisanat dans ce domaine en l'inscrivant dans une manifestation de plus grande ampleur qui se prolonge trois jours (du 14 au 16 mai prochain) et qui combine ambiances festives et séances prospectives. La mosaïque dans la décoration de l'espace Au programme, donc, et dans le cadre grandiose du Colisée, une grande exposition de tableaux de mosaïques de participants (artistes-artisans, écoles, sociétés) de la ville d'El Jem mais aussi d'autres régions de Tunisie et de l'étranger (notamment d'Italie et du Liban), confection d'un panneau de mosaïque géant et, clou de l'édition, tableaux vivants de jeux de gladiateurs exécutés par une troupe professionnelle française sur l'arène de l'amphithéâtre romain. Parallèlement, se tiendra une conférence internationale sur le thème : La mosaïque, identité artisanale locale et secteur prometteur de développement. L'accent sera mis cette année sur la place de la mosaïque dans la décoration de l'espace contemporain. Outre l'éclairage savant, ces séances apporteront aussi la quintessence de l'expérience pratique menée par des opérateurs tunisiens et étrangers. L'exploration de nouvelles manières de faire s'étendra aussi au domaine technique : matériaux, procédés, usages, etc. Des recommandations sont attendues à l'issue de cette conférence. Parions qu'elles dépasseront les vœux pieux pour trouver un prolongement durable sur le terrain. Ce sera le meilleur moyen de contribuer à faire d'El Jem une destination touristique à part entière au lieu du simple point de passage qu'elle est aujourd'hui. Le pari est déjà en partie gagné puisque les «légionnaires» français laisseront derrière eux une cohorte tunisienne puisque, là où ils se produisent, ils s'engagent à former des jeunes non seulement aux techniques de combats mais également à celles de fabrication des divers accessoires (costumes, armes, etc.)