La journée d'avant-hier a été sinistre pour la ville de Tataouine et pour toute la Tunisie. Un mort et 9 blessés constituent le bilan d'une manifestation qui a eu lieu jeudi dans cette région, menée principalement par les membres de la Ligue populaire de protection de la révolution, réclamant l'assainissement des directions régionales par l'éviction des symboles de l'ancien régime. Une manifestation qui a mal tourné et qui a fini en affrontements, causant la mort de Lotfi Naguedh, secrétaire général régional de l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (Utap) à Tataouine et coordinateur du mouvement Nida Tounès dans la même ville. Suite à ces événements, des cadres de Nida Tounès, d'Al Massar et d'Al Hizb Al Joumhouri se sont exprimés hier lors d'une conférence de presse. Issam Chebbi, membre de l'Assemblée constituante et porte-parole d'Al Hizb Al Joumhouri, a donné les grandes lignes de la conférence dans son intervention. Il a qualifié le défunt de «la première victime de la violence politique», en pointant directement du doigt la Ligue populaire de protection de la révolution comme étant le premier responsable de la violence, à cause de la manière dont elle a appelé à la manifestation, et en appelant à son tour à la dissolution de ses représentations régionales. Outre la condamnation, Issam Chebbi a annoncé l'organisation, dès que possible, d'obsèques nationales pour Lotfi Naguedh. Tout en rappelant que ce membre de Nida Tounès a fait l'objet de menaces dans les jours qui ont précédé la manifestation. Il a affirmé l'indignation des trois partis face aux déclarations du porte-parole du ministère de l'Intérieur, Khaled Tarrouche, selon lesquelles Naguedh serait mort de mort naturelle,à savoir des suites d'un arrêt cardiaque et face au contenu du communiqué de son ministère sur le sujet, stipulant que le défunt «ne porte aucune trace de violence», «alors que les faits et les preuves disent le contraire», avance Issam Chebbi. Des raisons parmi d'autres qui poussent cette Troïka de l'opposition à exiger une deuxième autopsie, à Tunis et par des professeurs aux compétences reconnues, ainsi que la démission du ministre de l'Iintérieur, Ali Larayedh. Les organisateurs de la conférence s'appuient dans leur version sur les déclarations de témoins oculaires et sur des vidéos de l'incident. Ridha Belhaj, porte-parole de Nida Tounès, a qualifié le sort subi par Lotfi Naguedh de meurtre prémédité, tenant compte, selon ses dires, du contexte d'incitation à la haine et à la violence qui a accompagné l'appel à la manifestation d'assainissement fait par la Ligue populaire de protection de la révolution et des menaces qu'il a reçues. Cette tournure de l'événement, a-t-il ajouté, entrave le processus de transition démocratique, surtout en l'absence de réactivité de la part des institutions de l'Etat. Quant à Ahmed Brahim, du parti Al Massar, il a expliqué la manière pratique dont la Ligue pourrait être dissoute: «C'est une association et elle obéit à la loi des associations qu'elle a enfreinte en incitant à la haine», a-t-il avancé, en ajoutant que cette revendication vient à la suite d'un cumul d'incidents malheureux. Maya Jribi d'Al Joumhouri est allée dans ce sens dans ses déclarations : «Une succession d'événements dangereux nous pousse à demander la dissolution de cette ligue désormais hors la loi en plus de la démission du ministre de l'Intérieur». Les membres de l'Assemblée constituante Khemaïes Ksila et Samir Bettaieb ont joint leurs paroles à celles des intervenants qui les ont précédés pour attirer l'attention sur les conséquences fâcheuses de la violence et pour assurer que leurs partis n'y auront jamais recours. «C'est une violence contre toute la Tunisie», a déclaré Samir Bettaieb avant d'appeler à un front national pour y faire face. Les trois partis qui ont organisé la conférence ont enfin déclaré qu'ils seront présents dans la rue et pacifiquement le 23 octobre pour prouver leur refus de la violence et leur appartenance à la Tunisie avant tout. Issam Chebbi a d'ailleurs clos la conférence en annonçant qu'une grande réunion se tiendra dans l'après-midi de la même journée à Al Hamra, pour la constitution d'un front national, politique et civique.