La manifestation artistique «Art solidarité liberté», initiée par le Syndicat des métiers des arts plastiques en collaboration avec l'Institut arabe des droits de l'Homme, a entamé sa marche lundi dernier au palais Abdellia, là où les embrouilles ont commencé lors du dernier «Printemps des arts» et bizarrement, rappelons-le, le jour de la clôture. La symbolique des lieux que les artistes, à travers cette action, tentent de se réapproprier mais surtout la gravité des faits qui ont succédé à cette fameuse édition 2012 du festival ne semblent pas avoir, malheureusement, encouragé la présence physique des artistes solidaires. Rappelons que ce rendez-vous vient en réaction à la vague de menaces et de violences perpétrées à l'encontre de certains artistes tunisiens en confirmant l'union des artistes dans tous les domaines et leur solidarité contre tous les procès et tout ce qui prend pour cible la liberté de création et d'expression. Le lancement de cette action s'est fait malheureusement dans une ambiance assez tendue, justifiée d'un côté par la présence, pour le moins timide, des artistes et autres personnes solidaires (dans tous les domaines!). En effet, hormis quelques-uns des artistes qui exposent (69 participants) leurs photographies réalisées dans le cadre de la campagne de solidarité avec l'artiste Nadia Jelassi qui, rappelons-le, avait été accusée de trouble à l'ordre public pour avoir «osé» évoquer une scène de lapidation, et a dû subir les humiliations d'une épreuve anthropométrique, l'on déplorait l'absence de tous ceux qui avaient pris part à cette campagne ou mieux encore tous ceux qui se sentent concernés par la liberté de l'art et de l'expression, plasticiens, hommes de théâtre, cinéastes, membres de la société civiles, etc. Pourtant, à son lancement, la campagne avait suscité un grand soutien de la part de la société civile et des artistes et avait drainé un grand nombre de participants (531) qui, à chaud, avaient mimé le geste de l'artiste en se prenant en photo avec une règle ou un objet de mesure. Ce ne fut pas le cas, malheureusement, lundi dernier, pour «Art solidarité liberté»! A croire que, nous autres Tunisiens, l'on n'est programmé que pour les réactions immédiates et que l'on n'a pas assez de souffle pour confirmer, dans le temps, nos prises de position et nos revendications, car il ne s'agit pas là uniquement de solidarité mais surtout d'union, pour faire face à toutes les menaces qui —même prenant, parfois, l'allure de lâches méthodes de manipulation de l'opinion publique en prenant pour cible encore et toujours l'artiste, le poussant à déserter la cité et à reprendre sa caverne— demeurent condamnables ici, maintenant et toujours. L'ambiance tendue était due, d'un autre côté, au coup de théâtre de la direction de Abdellia qui, suite à l'intervention, paraît-il, de représentants de la municipalité de La Marsa, quelques minutes avant le lancement de la manifestation, a cru bon d'enlever l'affiche de l'événement accrochée à l'entrée du palais, prétextant son côté provocateur. Sur l'affiche, il n'y a pourtant ni barbus, ni bustes, ni nus à moins qu'il y ait des «arbrophiles» que la vue d'un arbre sur lequel on a accroché un mètre-ruban peut choquer! Bref, en réaction à cela, les organisateurs outrés ont convoqué un membre du cabinet du ministère de la Culture qui a promis de remettre l'affiche! L'exposition photographique se poursuit jusqu'au 18 novembre avec, pour clôturer l'événement, l'intervention de certains artistes et autres personnes ciblés par cette vague de violences, l'on cite Nadia Jelassi, Sghaïer Ouled Ahmed mais aussi le doyen de la faculté de La Manouba, Habib Kazdaghli.