Par Habib BEN YOUNES * Clio et Melpomène, comme par hasard muses de l'histoire et de la tragédie, qui encadrent notre Virgile national sur la célèbre mosaïque du Musée du Bardo, ne savent plus, d'ailleurs comme leur sept sœurs, à quel « saint » ou plutôt à quelle « direction » se vouer. En effet le ministère de la Culture vient d'enrichir son organigramme par une « direction générale du patrimoine », dont les prérogatives sont plus importantes que l'ancienne direction. Au moment où la « communauté patrimoniale » s'attendait à la résolution du problème du statut régissant l'organisation et le fonctionnement de l'Institut national du patrimoine, qui tel Sisyphe revient au point de départ après un semblant de consensus, nous voyons apparaître un nouveau né dont la conception fut si bien camouflée, que sa publication eut l'effet d'un camouflet pour beaucoup de gens comme l'atteste la lettre envoyée par la direction générale de l'I.N.P soutenue spontanément ou pas par quelques syndicats de l'institution. Rappelons que la Tunisie, pays dont la richesse et la diversité patrimoniales n'est plus à démontrer, est l'un des rares pays en Afrique, afin de rester dans un cadre continental, qui n'a pas jusqu'ici une définition juridique de ce que peut être un « musée », par conséquent un statut des musées. Ce débat et combat engagé depuis plusieurs années ne semble encore pas déranger, outre mesure, du moins à notre connaissance, compte tenu de l'absence d'un quelconque écho sur ce sujet. Nous avons donc été interpellés par la présence, au sein de cette nouvelle direction ministérielle, surtout par l'apparition d'une direction des musées. Direction avec toute sa hiérarchie administrative (directeurs, sous directeurs et autres chefs de service dont je vous épargne le nombre), qui semble avoir, ou presque, les mêmes prérogatives que la division du développement muséographique de l'I.N.P qui comprend, elle aussi, toute sa hiérarchie administrative. Ainsi donc, qui fera quoi, avec deux directions au sein d'un même ministère qui assurent, du moins sur le papier, les mêmes fonctions, pour les mêmes musées, collections et autres personnels. Imbroglio disent les uns, que disent les autres ? Je l'ignore. C'est un cas d'étude qui, nous l'espérons, sera bientôt éclairci. Cependant, une question se pose, désormais, à propos du futur statut de l'I.N.P, s'il voit le jour bien sûr, faudrait-il y maintenir une direction des musées et quelles seraient ses compétences, après cette nouvelle création ministérielle ? De par ma petite expérience professionnelle dans le monde des musées, je donne «ma langue au chat». J'espère, sincèrement, que la vision et la politique du ministère sont claires en ce sens pour le bien et l'avenir de ce secteur aussi sensible que spécialisé. Reste maintenant à résoudre le problème du statut de l'I.N.P, qui comprend, pour le moment, sept syndicats, le dernier le numéro 7, étant un syndicat du personnel d'un site archéologique, une première à mettre à l'actif de cette institution. Sera-t-elle en mesure de « pondre » un statut qui contentera toutes les parties ? Aurons-nous bientôt une loi sur les musées et nouvelle version, plus efficace et réaliste de la loi de la protection du patrimoine ? Nous l'espérons, mais pour le moment « wait and see », diraient nos deux muses, c'est une tragique histoire d'autant plus que le chiffre sept ne porte plus bonheur sous nos cieux. * (Archéologue, muséologue)