Ahmad Foued Nejm, à qui le film est dédié, est un témoin vivant de l'histoire contemporaine de son pays. Son combat a commencé depuis l'occupation anglaise, pour se poursuivre pendant les règnes de Abdennasser, de Sadate et de Moubarak. C'est d'après le propre journal du poète égyptien Ahmad Foued Nejm qu'est né le scénario d'El Fagoumi, signé Issam Chammaâ. Cet auteur est également le réalisateur du film qui porte le même nom et qui a vu le jour en 2011, dédié aux martyrs de la révolution égyptienne. Cette révolution n'est qu'une bataille dans la guerre que le poète mène depuis sa jeunesse. Agé aujourd'hui de 83 ans, Ahmad Foued Nejm est un témoin vivant de l'histoire contemporaine de son pays. Son combat a commencé depuis l'occupation anglaise, pour se poursuivre pendant les règnes de Abdennasser, de Sadate et de Moubarak. Entre fiction et documents d'archives, l'écriture et la réalisation de Issam Chammaâ s'approchent plutôt de l'adaptation libre. Ahmad Foued Nejm devient ainsi Adham Nessr, rôle campé par Khaled Saoui, et son compagnon de route, Cheikh Imam Issa, est dans le film Cheikh Hamam Moussa, interprété par Salah Abdallah. La trame est ponctuée par les événements marquants de l'histoire de l'Egypte, qui passe de révolution et espoir de changement, à défaite et désillusion, avant que le cœur du pays ne batte de nouveau. Cette dynamique est portée par la diversité du peuple, où les intellectuels, de tous bords politiques, côtoient les gens simples. Le terrain commun est souvent la pauvreté et les difficiles conditions de vie, mais surtout les rêves de gloire de la nation. Dans cette précarité est né Nejm, orphelin de père, amoureux des livres au point que sa mère, ne pouvant subvenir à ses besoins, a dû l'inscrire dans un orphelinat pour qu'il puisse continuer à aller à l'école. Au début du film, on découvre Nejm récitant ses poèmes dans la rue. Un élan de générosité qui le caractérise. Cette scène le présente tel que le voit l'auteur du film, tel qu'il a choisi de l'écrire et de le filmer. Pour Issam Chammaâ, Nejm est l'homme simple, spontané, fils du peuple et proche de tous. C'est aussi un être intelligent socialement. Il a le don de savoir s'adresser et toucher tous ceux qu'il rencontre, autant les plus hauts gradés de la police que les amis proches et les femmes. C'est ce même don qui lui fera dire des mots magiques, exprimer toute la complexité de la réalité qui l'entoure, à travers des rimes simples et symboliques, telles des fables des temps modernes. L'auteur de Masr yamma ya bahiya (que tu es belle, Egypte) est souvent au cœur du combat politique et social. Il ne compte plus ses passages en prison. C'est là qu'il écrira, par exemple, son poème Morr et kalam (les mots amers). Son inspiration vient de tout ce qu'il vit. Dans le film, on découvre les circonstances dans lesquelles sont nés chaque poème et chaque texte auxquels la musique de Cheikh Imam Issa a donné une autre vie, une autre dimension. L'intégration de ces chansons —autrement arrangées et interprétées par Ahmad Saâd— dans les scènes du film, renforcent son rythme et le sauvent parfois de la monotonie. C'est, en somme, un film nostalgique et sans prétention, dont le principal propos semble affirmer l'aspect continu de l'acte révolutionnaire. Et comme le dit si bien le Che, auquel Nejm a dédié le poème Guevara mat (Guevara est mort), «un révolutionnaire ne démissionne jamais».