Ahmed Foued Nejm, symbole encore vivant « El Fagoumi » de Issam Chamaâ, actuellement à l'affiche sur les écrans de la capitale, est un film de fiction dédié à une figure emblématique de la poésie égyptienne contemporaine Ahmed Foued Nejm. Agé de 83 ans, le poète a vécu toutes les époques de la royauté à la révolution en passant par les différentes présidences qui se sont succédé à la tête de l'Etat égyptien. Témoin vivant, son combat a donc commencé avec l'occupation anglaise et s'est poursuivi durant les règnes de Jamal Abdennasser, Anwar Sadate et enfin Hosni Moubarak. Inspiré très librement de la vie d'Ahmed Foued Nejm, le film raconte l'histoire d'Adham Nessr campé par Khaled Saoui et de son ami chanteur et compositeur Cheikh Imam qui devient dans le film Cheikh Hamam Moussa interprété par Salah Abdallah. Etayé de quelques documents d'archives pour appuyer la véracité des faits, « El Fagoumi » passe en revue certains événements marquants de l'histoire de l'Egypte et des mutations qui s'en suivirent. Intellectuels, artistes et simples gens se côtoient sur le terrain de la pauvreté et des conditions de vie difficile mais ils restent portés par l'espoir de gloire de leur nation, mais ce n'est que chimère. Le film retrace le parcours de Issam Chemma, fils du peuple qui se caractérise par sa simplicité et sa spontanéité. Proche des gens, il sait communiquer avec eux et créer des liens affectueux. Les vers qu'il déclame sont inspirés d'une réalité complexe qu il entoure de mots symboliques exprimant la souffrance autant que le bonheur des petites gens. Engagé, l'auteur de « Masr yamma ya Bahiya » a dù passer par les geôles pour ses prises de position contre les gouvernements en place. C'est en prison qu'il écrit l'un de ses poèmes les plus marquants « Mour el Kalem » (les mots amers). Le film nous montre les conditions dans lesquelles ces poèmes ont été rédigés puis composés par Cheikh Imam. C'est Ahmed Saâd qui interprète les chansons et sauve le film d'une certaine monotonie. Il n'est pas aisé de réaliser une biographie surtout lorsqu'il s'agit d'un personnage encore vivant. Le mérite du réalisateur est de rendre hommage à un des symboles de la révolution égyptienne car Ahmed Foued Nejm a commencé son combat très tôt. Poète de la rue, cet orphelin de père a appris à lire et à écrire dans un orphelinat. Doué, il s'est mis à écrire des vers pour dénoncer l'injustice à l'égard des faibles et des déshérités. Issam Chamaâ n'a d'autres prétentions que de rendre justice à un homme qui fut longtemps marginalisé et mis dans l'ombre à cause de ses idées. Aujourd'hui, au rythme de la révolution tout devient possible et l'auteur de « Guevara mat » (Guevara est mort) poème dédié au Che reprend ses droits dans le paysage culturel et médiatique égyptien. C'est ce que fait le film et ce n'est déjà pas si mal.