Les soldes d'hiver cette année n'ont pas attiré comme d'habitude la grande foule. Les ventes dans les magasins de vêtements et de chaussures sont moins bonnes que la même période pour l'année dernière. Les consommateurs ne semblent pas être séduits par les réductions de 20 %, 30 % et 50 %. Ils ne sont pas frappés par la fièvre acheteuse. La crise que vit actuellement le pays n'épargne pas les soldes. «Les gens sont inquiets. Avec l'augmentation des prix des viandes, des fruits et des légumes, le Tunisien moyen arrive difficilement à arrondir ses fins de mois. Cette année, les consommateurs sont très hésitants. Les dernières années, les gens profitent des périodes des soldes pour acheter plusieurs articles. Cette année, nous avons remarqué que les clients se contentent d'acheter un ou deux articles seulement», explique Maha, vendeuse dans une boutique de prêt-à-porter féminin. Après une longue tournée auprès des boutiques du prêt-à-porter, nous avons remarqué que le marché local est envahi par des articles turcs et chinois. Les points de vente qui proposent une production locale connaissent une grande concurrence. Une concurrence considérée déloyale par plusieurs propriétaires de boutiques et surtout en ce qui concernent les produits chinois qui ne sont pas compétitifs non seulement en prix mais en qualité. «Il faut dire que la concurrence des vêtements importés de la Turquie ne pose pas un problème puisque leurs prix de vente sur le marché local sont assez élevés. Mais, le sérieux problème du secteur du prêt-à-porter tunisien est la concurrence illégale des produits chinois dont la qualité est médiocre. Le marché est bourré de ces produits. Le confectionneur tunisien fait face à une marchandise chinoise qui ne respecte pas la réglementation douanière et dont les circuits de distribution sont difficiles à cerner», explique M. Najib Sahnoun, président de la chambre syndicale régionale de prêt-à-porter. Cette concurrence persévérante dans le secteur du textile a poussé certains confectionneurs à réduire leur production ou à fermer leurs ateliers. Certains ont passé à la sous-traitance pour de grandes marques locales. «Plusieurs confectionneurs se sont retirés du marché. Personnellement, j'ai passé à la sous-traitance. C'est moins rentable. Je ne me trouve pas dans ce marché où les hommes d'affaires responsables de la contrebande ne sont pas jugés. Ils multiplient leurs recettes. Et c'est le consommateur tunisien qui est victime. Le secteur du prêt-à-porter tunisien est largement touché par cette concurrence illégale. Je souffre lorsque je vois des sociétés de confection nationales qui possèdent les Iso internationaux se trouver en difficultés face à des gens qui ne respectent pas les normes internationales. C'est l'économie nationale qui sera détruite par ce marché parallèle», ajoute M. Sahnoun. C'est le prix très séduisant des produits chinois qui attire le consommateur. La qualité reste la dernière exigence pour un Tunisien moyen qui vit une lutte quotidienne pour gagner son pain quotidien. «C'est moins cher. Personnellement, je n'ai pas remarqué une différence entre les produits chinois et les autres marchandises. Partout où vous allez, vous rencontrez des étalages qui proposent ces produits. J'achète parce que mon porte-monnaie ne peut pas faire face aux prix assez élevés proposés dans les grandes surfaces», explique Mme Fatma, une ménagère. Pour lutter contre le phénomène de la contrebande, les confectionneurs locaux parlent d'une révision sérieuse du code de la douane et pourquoi pas mettre un prix de référence pour les produits importés par des experts en textile. En ce qui concerne l'importation de la matière première pour les unités de production nationale, M. Sahnoun parle de la possibilité d'enlever la taxation douanière. Pour sauver le secteur, le président de la chambre syndicale régionale du prêt-à-porter à Sfax souligne la nécessité de juger les douaniers corrompus. Un autre problème du prêt-à-porter tunisien a été identifié par M. Sahnoun. «Le secteur souffre de manque de main-d'œuvre qualifiée. Le secteur du textile peut embaucher 35 % en plus. Le paradoxe, c'est que plusieurs secteurs souffrent d'une pénurie en main-d'œuvre qualifiée alors que des milliers de personnes sont en chômage».