Premier indicateur du renouveau du cinéma et de la télévision turcs : ils ont battu en brèche la suprématie des feuilletons américains, puisque les productions turques se positionnent en deuxième rang, selon la presse française. Dans une récente étude publiée par des agences françaises de l'audiovisuel, il est fait état de l'invasion massive des séries turques et des drames télévisés sur le marché international. La Turquie est devenue le deuxième producteur de séries télévisées après les Etats-Unis. Ce raz-de-marée s'explique, en fait, par les défis que les cinéastes turcs ont intelligemment et habilement relevés en s'adaptant conformément au modèle occidental. Un pari qui a enlevé tous les suffrages et qui s'est transformé en une presque overdose, dont les téléspectateurs ne peuvent ni ne veulent plus se passer. Dans une version doublée en six ou sept langues dont le chinois, l'anglais, le russe et l'espagnol, la version arabe en dialecte syrien est parfaite en tous points de vue. Ce qui n'est pas du goût des Egyptiens qui ont tiqué sur ce détail fort révélateur du succès des séries turques. Ce renouveau du cinéma et de la TV en Turquie, on le doit aussi à un facteur historique : les idées avant-gardistes et novatrices impulsées par Mustapha Kemal, l'homme qui, dès le début du XXe siècle, s'est farouchement opposé aux diktats des vainqueurs, occidentaux, de la Première Guerre mondiale. Le mérite d'Ataturk a été l'abolition du «Califat» et surtout la laïcisation du système, avec l'imposition de l'alphabet latin en 1928, qui a permis à son pays de s'ouvrir sur l'Europe. Pour revenir au triomphe des séries dramatiques turques, on doit signaler le fait que cette grande puissance — qui, dans le passé, a fait vaciller toute l'Europe, Charles Quint, le roi d'Espagne, en sait quelque chose —, regorge de festivals qui se déroulent dans toutes les grandes métropoles du pays et principalement à Istanbul où se concentre le plus gros de ces manifestations culturelles, à l'instar d'Ankara, Izmir et Antalya. Aujourd'hui, les chaînes arabes jusque dans les pays du Golfe et du Maghreb, à l'exception des égyptiennes, pour des raisons que l'on devine aisément, diffusent pour le grand plaisir de leurs publics les fictions turques. Dans cette bataille de l'audimat, l'intérêt et l'engouement de ces séries dramatiques rencontrent une audience largement favorable.