Qu'est-ce qui fait courir les Tunisiennes et les Tunisiens vers la Turquie et son ancienne capitale ottomane Istanbul ou Constantinople ! Les avions vers cette destination sont pratiquement « surbookés » et le personnel naviguant et au sol de notre compagnie nationale « Tunisair » mérite bien le prix de la patience pour endiguer le flux parfois indiscipliné des voyageurs surtout en périodes de vacances scolaires et autres. Il faut dire tout d'abord que la muraille plus que virtuelle du « visa schengen » y est pour quelque chose ! Il fut un temps où les facilités de visa permettaient aux Tunisiens de la classe moyenne d'aller en Europe de l'Ouest plutôt qu'en Turquie. C'était l'époque parisienne avec les grossistes de la Rue du Caire puis l'époque romaine avec la via – Libya puis celle de Palerme en Sicile si proche. Mais depuis le verrouillage du « Schengen » le bon petit peuple en quête de voyage alliant la découverte au business – Shopping, a été détourné et récupéré par la Turquie et c'est tant mieux ! Un peuple chaleureux et accueillant auquel nous lie une longue histoire politique et militaire depuis le 16° siècle, ce sont bien les Turcs de Sinan – Pacha qui ont libéré la Goulette des armées de l'empereur espagnol Charles Quint, mais aussi un héritage culturel et même culinaire à l'image des douceurs tunisiennes d'origine turque, sans oublier, l'identité musulmane rationalisée par les réformistes tunisiens et turcs des 19e et 20e siècles. A ce propos Khayreddine Bacha Attounsi a été Wazir Akbar (1er ministre) en Tunisie mais aussi Sadr – Aadham (1er ministre) en Turquie ! Le grand militant politique de la liberté et de la presse nationaliste, Ali Bach Hamba, a été lui aussi exilé à Constantinople en 1912, exproprié de ses biens en Tunisie par décret, de 1913, mais accueilli en seigneur et héros en Turquie. Il fut même directeur des services des renseignements généraux pour l'Afrique du Nord dans le gouvernement turc jusqu'à sa mort à Istanbul en 1918, où il fut d'ailleurs inhumé ! C'est dire la charge passionnelle et la mémoire commune qui lient les deux peuples turc et tunisien depuis presque six siècles. C'est avec une certaine nostalgie mêlée à de la fierté, que ces familles tunisiennes qui voyagent en groupes, découvrent le palais du Sultan Ottman de Top-Capi ou la grande mosquée bleue avec toutes ses reliques sacrées appartenant au prophète vénéré Mohamed. Ces sentiments de ferveur extrême s'étendent à la Turquie moderne à l'héritage du fondateur de la République Turque : Mustapha Kamel Attaturk en 1923 et à son descendant prestigieux Recep Tayyip Erdogan l'homme fort et juste de la Turquie actuelle qui a osé dire « Non » à Shimon Pérès président d'Israël à Davos, et qui mène une politique de modernisation battante et réussie ! La Turquie d'aujourd'hui est un vaste chantier à tous les niveaux. Ses taux de croissance en font le nouveau dragon de l'Asie mineure et culmine à plus de 8% annuellement ! L'infrastructure progresse à pas de géant, la propreté, malgré la démographie pesante des grandes villes, est impeccable. De même des transports publics comparables aux meilleurs d'Europe. Tout cela récompense la discipline et le travail acharné et exemplaire de ce bon peuple turc qui pointe à la porte d'une Europe pourtant réfractaire et injuste ! La Turquie même avec son islamité redoutée à tort, par une certaine classe dirigeante de l'Europe occidentale, démontre, tous les jours son ambition de progrès et de dépassement. M. Cohn – Bendit figure emblématique de Mai 1968 en France, juif d'origine allemande, et actuellement député-vert-européen est peut-être l'un des rares à avoir vu juste quand il réclame avec force l'adhésion de la Turquie à l'Union Européenne et dénonce les deux poids et deux mesures qui font que la Slovénie ou l'Estonie soient traitées si favorablement alors que la Turquie plus développée économiquement et politiquement attend toujours le feu vert de Bruxelles ! Mais la Turquie ne fait pas qu'attendre. Nous assistons à l'émergence d'une nouvelle puissance régionale au Moyen-Orient et en Méditerranée qui donnera bientôt bien des regrets aux Européens… les mauvais décideurs d'aujourd'hui ! K.G