Entamée le 16 mars à Thala, la première édition des Journées des droits et des libertés s'est clôturée en beauté et en musique, le 25 mars au Colisée. Après un passage par la ville du Kef, la manifestation s'est installée à Tunis pour une série de projections à la maison de la culture Ibn Rachiq, avant d'offrir au public un spectacle musical sous le signe de l'Afrique et de la liberté. Gultrah Sound System de Tunisie, Darg Team de Palestine, Smockey du Burkina Faso et Didier Awadi du Sénégal ont attiré une grande foule au Colisée, composée de Tunisiens, d'Africains et d'invités venus du monde entier pour le Forum Social Mondial qui se tient à Tunis du 26 au 30 mars. Cette foule a dû passer un mauvais quart d'heure, entassée, avant l'ouverture des portes. Un retard de livraison et d'installation du matériel son a retardé le début du concert, prévu pour 19h00. Cet épisode a très vite été oublié avec les premières notes de musique, livrées par les rappeurs de Darg Team, venus de Gaza. Sous les cris et les applaudissements des jeunes, brandissant le drapeau palestinien, caressant le rêve de la libération de cette terre occupée et morcelée, ils ont chanté Falastine horra (Palestine libre), parmi d'autres titres de leur répertoire, essentiellement consacré à la cause de leur pays. L'une de ces chansons, Ounadikom (je vous interpelle), est dédiée à l'activiste italien Vittorio Arrigoni, assassiné le 15 avril 2011 à Gaza. Ounadikom est un mix entre leur rap et le refrain de la chanson qui porte le même nom du Libanais Gaâbour. La soirée a connu son apogée avec l'arrivée sur scène de Gultrah Sound System, groupe composé de Halim Yousfi au chant et à la guitare, Wissem Ziadi au violon, Slim Abida à la basse, Tarek, groovemaster à la batterie et Malek Ben Halim et Amine Nouri aux percussions. Avant de commencer leur show, ils ont invité sur scène Oussama Bouajila de Zwewla, qui risque la prison pour avoir dessiné un tag sur un mur à Gabès. Ce jeune a appelé à l'entraide entre jeunes et artistes et à se battre pour la liberté. Les Gultrah n'étaient pas les seuls à porter des pulls Zwewla en signe de solidarité pendant le concert. Une caravane devait partir, hier soir, vers Gabès pour manifester aujourd'hui, pendant le procès d'Oussama Bouajila. La musique des Gultrah Sound System puise dans les roots (racines), avec des paroles en dialecte tunisien et des compositions inspirées des sons africains et méditerranéens. Le message transmis par leurs chansons parle à une jeunesse qui rêve de lendemains meilleurs, faits d'égalité et de justice dans le monde, tout en pointant du doigt les problèmes de la société dans laquelle ils vivent. Parmi leurs titres les plus connus, Dada Icha où ils taclent l'Amérique de « Ras el ham » (sources de malheur), alors que c'est l'Afrique qui subit les conséquences et les malheurs. Ils ont ainsi préparé l'entrée en scène du Sénégalais Didier Awadi, dont le projet musical est tout autant engagé en faveur du renouveau de l'Afrique. Les refrains de ses chansons sont parsemés de « dictateurs », « voleurs» et autre « tueurs » mais aussi de « liberté », d'« union » et de Dégage, titre d'une chanson dédiée à la Tunisie et interprétée en duo avec un artiste tunisien. Sans transition, le Burkinabé Smockey est monté sur scène et a pris le micro pour partager avec Didier Awadi une chanson en hommage au leader Thomas Sankara (1949-1987) « dont l'assassin est encore au pouvoir au Burkina Faso », a-t-il tenu à rappeler. Cet artiste, opposant connu dans son pays, le dit haut et fort dans ses chansons. Comme les groupes qui l'ont précédé sur scène et comme le public qui s'est déchaîné pendant toute la soirée, il a choisi la musique pour s'exprimer, et l'art comme arme pour dénoncer les freins au développement de l'Afrique. Espérons que dans un avenir proche, la contagion passera de la musique au politique, pour que le rêve devienne réalité!