La violence politique est un problème contre lequel la société civile a beaucoup lutté. Pourtant, toutes les actions qui ont été menées n'ont pas été suffisantes pour stopper un phénomène qui, loin de faiblir, a gagné en ampleur. Une journée de dialogue a été organisée hier à Tunis par la Fondation pour le futur, pour permettre aux acteurs de la société civile de faire un travail d'introspection et de réfléchir sur des solutions de sortie de crise. De janvier 2011 à décembre 2012, 4.997* associations ont été créées. Au moins 400 d'entre elles opèrent dans le domaine des droits humains, c'est-à-dire dans tout ce qui se rapporte à la citoyenneté et au droit en général. Tous les organismes de la société civile ne se valent pas dans la pertinence et l'efficacité de leurs actions, mais force est de constater qu'après la révolution, ils ont été, dans leur ensemble, plus présents que jamais sur le terrain et dans les salles de conférences, pour combattre les injustices de toutes sortes et promouvoir la démocratie et la paix sociale. Pour lutter contre la violence politique, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (Ltdh), par exemple, enregistre les cas de violence et les dénonce, soutient les victimes, notamment devant les tribunaux, organise des journées de réflexion et fait pression auprès des autorités pour trouver des solutions. L'association Liberté et équité, elle, mène un travail d'investigation sur le terrain, pour dénoncer des faits à travers ses rapports, diffusés au niveau national et international, et mène des actions en justice. A chaque association sa manière de lutter, toutes les méthodes sont nécessaires et se complètent. Mais aujourd'hui, il en faut plus pour lutter efficacement contre la violence politique, car le phénomène prend tous les jours un peu plus d'ampleur. Pour Abdessatar Ben Moussa, secrétaire général de la Ltdh, on gagnerait à ce qu'il y ait plus de sensibilisation dans les écoles pour diffuser la culture des droits de l'Homme. Il faudrait aussi qu'on mène des campagnes pour mettre en garde contre les dangers de la violence, qu'il y ait davantage de dialogue avec ceux qui la pratiquent et, enfin, qu'il y ait plus d'associations qui se portent partie civile. L'homme de droit préconise également la coopération entre les associations et le réseautage. Il a en outre annoncé que des journées de travail, ouvertes à toutes les associations intéressées, seront organisées par la Ltdh durant le mois d'avril, pour créer un observatoire national de lutte contre la violence et rédiger un pacte qui devrait être signé par tous les partis politiques. Si le travail collaboratif entre associations est un principe sur lequel tout le monde s'accorde, certains intervenants ont exprimé leur crainte quant au risque d'incompatibilité ou de mésentente entre les organismes ayant des références idéologiques différentes. Radwan Masmoudi, président du Center for the Study Of islam and Democracy, a insisté sur le rôle de la société civile qui est avant tout d'unir et de rassembler, et qu'il était nécessaire, pour qu'elle y arrive, de dépasser cette peur entre islamistes et laïcs. La polarisation de la société à travers la peur, que certains politiques ont fabriquée et instrumentalisée, n'a fait que propager la haine entre les Tunisiens. Tant de chemin a été parcouru depuis la révolution, mais il en reste encore beaucoup, semble-t-il, pour apprendre ou réapprendre le vivre-ensemble. *Chiffres tirés de l'étude sur les organisations de la société civile en Tunisie, réalisée par la Fondation pour le futur (2013)