Œil pour œil et le monde entier est aveugle, disait Gandhi. Il n'y a guère d'équité dans le registre de l'horreur. Il y a toujours une ignominie au bout des vengeances, si justifiées aux yeux de leur auteur fussent-elles. Lors de sa visite de trois jours en Israël, Silvio Berlusconi, président du Conseil italien, a tenu un discours ambivalent. En politique, cela engendre de bien douteuses équivoques. Ses propos devant le chef du gouvernement israélien ont été aux antipodes de ceux tenus devant le président de l'Autorité palestinienne. On a beau retourner les deux discours dans tous les sens, rien n'y fait. Toujours la même problématique qualification. "Quand la guerre prend la place de la paix, quand la violence prend la place de la raison, l'humanité disparaît. Les relations entre les hommes qui devraient toujours rester intactes disparaissent, a-t-il affirmé dans sa conférence de presse avec Mahmoud Abbas. Donc, comme il est bon de pleurer pour les victimes de la Shoah, il est bon de montrer de la douleur pour ce qui s'est passé à Gaza", a-t-il ajouté. Devant la Knesset à Al Qods, Berlusconi tient des propos pratiquement opposés aux premiers. A l'en croire, la guerre menée par Israël contre les populations civiles de la bande de Gaza l'an dernier était de la "légitime défense justifiée". Même le rapport onusien dit rapport Goldstone, qui accuse l'armée israélienne de crimes de guerre au cours de cette offensive, est pris à partie. D'après Silvio Berlusconi, ledit rapport "incrimine Israël pour sa réponse légitime" aux tirs de roquettes des militants palestiniens. Voilà, tout est dit, ou presque. En tout cas, la chose et son contraire. On s'ingénie à dénicher dans les propos un fil conducteur, quelque lien de cause à effet. En vain. En tout état de cause, cette double posture frise l'invraisemblable. Tel le renvoi dos à dos des tirs de roquette artisanale palestiniens, qui ont blessé moins de cinq Israéliens, et les lourds bombardements israéliens soldés par plus de 1.400 tués Palestiniens et des milliers de blessés, Les manœuvres politiques ont des raisons que la raison ignore, s'empresse-ton de conclure. Or, pour reprendre une lettre de Flaubert, "la bêtise consiste à vouloir conclure. Nous sommes un fil et nous voulons savoir la trame"… Tout compte fait, les propos de Berlusconi ne sont pas si incohérents qu'ils ne le semblent au premier abord. La règle d'or chère aux dirigeants occidentaux (USA et Europe de l'Ouest en prime) consiste à blanchir Israël en dernière instance et dans tous les cas de figure. Quitte à endosser préalablement, en guise de diversion, quelques critiques vis-à-vis d'Israël. On comprend dès lors le désarroi des Palestiniens. Eux pour qui l'Europe est l'interlocuteur privilégié, voire le répondant attitré, face l'indissoluble couple tragique Israël-USA. On se demande après coup à quoi sert la norme internationale, la légalité non moins internationale et les principes de droit et d'équité. Seraient-ils d'aventure de simples paravents de fortune, voire l'arbre qui cache la forêt ? Seraient-ils à ce point altérés et corrompus ? Et qu'on ne s'étonne surtout pas, après coup, du peu de cas que font les jeunes de cette même légalité internationale. Loin de faire montre d'extravagance, ils subissent le plus naturellement du monde l'air du temps.Attention les enfants regardent… Les adultes, ceux qui sont aux commandes surtout, gagneraient à mûrir cette évidence. Elémentaire mon cher Watson.