«L'état d'urgence économique est un cadre qui doit permettre de prendre des décisions exceptionnelles et temporaires pour traiter cette situation exceptionnelle dans laquelle nous sommes», souligne-t-on à l'Utica Faut-il décréter l'état d'urgence économique ? Les discours des représentants des hommes d'affaires et les communiqués de la centrale patronale ainsi que les autres organisations des entrepreneurs ne laissent aucun doute que la réponse est positive et sa mise en application est urgente. Et ce, malgré le taux de croissance de 3.6% enregistré en 2012 et le taux de 4% prévu cette année dans le cadre du budget de l'Etat. Décréter l'état d'urgence dans un contexte de croissance économique semble pour certains sans fondement. Pour en savoir plus , on a contacté Nafaâ Ennaïfer, président de la commission économique de l'Utica. Tous les indicateurs ne cessent de sombrer depuis la révolution , soutient-il. «Les taux de croissance insuffisants, la fragilisation de plusieurs secteurs d'activité, notamment le tourisme, l'industrie textile, la baisse de l'investissement intérieur et extérieur, le dérapage des dépenses publiques de subvention et de fonctionnement, dont les salaires de la fonction publique, l'aggravation du déficit budgétaire de l'Etat, la hausse de l'inflation à des niveaux records, la baisse de la productivité du personnel et la hausse des coûts de production et la prolifération du commerce parallèle et de l'économie informelle», énumère-t-il. Rien ne va plus alors pour les entreprises tunisiennes. Cerise sur la gâteau, le port de Radès a été bloqué durant cinq longues journées. Et les répercussions seraient ressenties à court et moyen terme sur tous les secteurs de l'économie. L'état d'urgence se justifie pour maintenir la continuité de l'activité économique, dans un premier temps, afin de conserver les recettes et les emplois, et se préparer pour une réelle relance de l'économie nationale, dans un deuxième temps. « L'état d'urgence économique est un cadre qui doit permettre de prendre des décisions exceptionnelles et temporaires pour traiter cette situation exceptionnelle dans laquelle nous sommes. ». Et d'ajouter : «un comité mixte de gestion serait constitué de représentants des ministres de l'Intérieur, du Commerce, de l'Industrie, des Finances, du Transport, des Affaires Sociales, l'Utica, l'Utap et l'Ugtt». Décret-loi, liberté de travail et productivité La mission de ce comité mixte s'articule autour de huit axes. Le premier axe porte évidement sur le plus prioritaire pour les entrepreneurs, la visibilité. Pour ce faire, l'Utica a proposé de « fixer définitivement la date les échéances électorales, créer le consensus autour des questions sécuritaires, sociales et économiques tant au cours de la phase transitoire qu'après les élections et faire approuver les textes de lois urgents d'ordre économique et social, par décret-loi, afin d'alléger la charge de l'ANC». Pour cette dernière, les débats idéologiques autour du code de l'investissement et du Partenariat public/privé est une illustration de l'ampleur du temps perdu. En deuxième rang, ce comité de gestion de l'état d'urgence se pencherait sur la restauration de la confiance des partenaires étrangers de la Tunisie, investisseurs et clients donneurs d'ordres. Dans ce cadre, l'industriel recommande de porter au rang de « priorité nationale absolue» la continuité des opérations d'approvisionnement, d'importation et surtout des exportations. «Il faut garantir tous les mécanismes d'application, et pénaliser toute entrave à cette priorité », renchérit-il. Parallèlement, il est opportun de lancer une campagne de communication à ce sujet. En troisième lieu, la proposition de l'Utica met l'accent sur la qualité des services publics, notamment la collecte des ordures, l'entretien de la voirie et du mobilier urbain, les prestations de l'Administration, les services postaux, ainsi que l'optimisation de la gestion des ports, des aéroports et des prestations logistiques. Pour garantir la continuité de l'activité, M Ennaïfer ajoute avec insistance : «Il faut mettre un terme aux blocages des usines et l'atteinte à la liberté du travail et à la sécurité des personnes». Et de préciser : «c'est la culture du travail et de la compétence qui doit régner». Au terme du cinquième axe, la centrale patronale soutient la thèse selon laquelle « le développement passe par le labeur et la contribution de tous à la création de la richesse, et non par la distribution de richesses que seule une partie des citoyens a créées ». Ainsi, la productivité est le vecteur de performance des entreprises qui verseraient par la suite des salaires conséquents et des recettes budgétaires. Dans la même lignée, il est crucial de rompre la spirale d'augmentation et de révision des salaires... Cette lutte contre l'inflation ainsi que la création de richesses pour tous est tributaire de «la prise de conscience de tous quant à l'extrême gravité des activités informelles sur l'économie et sur l'Etat, fiscalité, emploi précaire, commerce de produits dangereux, destruction de l'économie organisée».