Elles se sont donné rendez-vous, hier, en fin d'après-midi au niveau de la Place Bab Saâdoun dans la capitale pour célébrer à leur manière ce jour du 13 août, date commémorative de la promulgation du Code du statut personnel (CSP), il y a de cela 57 ans. Plus d'un demi-siècle déjà, la femme tunisienne craint de voir ses acquis de plus en plus menacés. 18h pile, des milliers de femmes de toutes les tranches d'âge et de toutes les catégories sociales, venant de tous bords, se sont massivement rassemblées sous un même étendard, celui de la patrie. Avec pour objectif commun; la défense des droits, la liberté et l'égalité entre les deux sexes. En un mot, la citoyenneté dans son acception la plus large. Et la grande marche féminine pacifique commençait, ainsi, à bouger, parcourant l'avenue du 20-Mars, en plein centre-ville du Bardo, pour rejoindre, en fait, la grande place du sit-in du Départ, devant le siège de la Constituante. Un peu plus d'une heure de marche, les participantes n'ont cessé d'exprimer haut et fort leur refus d'une éventuelle main basse sur leurs droits vitaux ou une certaine confiscation de leurs acquis hérités depuis l'aube de l'Indépendance et renforcés au fil des ans. Au fur et à mesure de l'édification de la Tunisie moderne, celle de Bourguiba, le père émancipateur de la femme tunisienne, comme elles ont vivement scandé à gorge déployée. Jeunes et moins jeunes, elles étaient accompagnées des hommes, côte à côte, brandissant des banderoles multicolores portant plus d'un slogan. « Les femmes de mon pays, des femmes et demie », « Mes droits et ma Tunisie sont des lignes rouges.. », « La Tunisie au cœur, mon droit est un dû et non une faveur », « Libre, indépendante, l'Islam est ma religion, l'arabe est ma langue.. », ainsi que d'autres slogans hostiles au mouvement Ennahdha et à son président. « Le peuple veut la chute du gouvernement », « Ni peur, ni terreur, le pouvoir appartient au peuple », telle était l'autre vague des slogans que les manifestantes ont tenu à répéter non-stop pour faire entendre leurs voix et proclamer ce qu'elles avaient sur le cœur. Un refrain de mots et d'expressions à chaque fois repris sur fond de cris et de youyous qui se faisaient entendre de loin. Et l'hymne national donnait, solennellement, l'impression d'une fête de grande envergure multidimensionnelle, porteuse d'une culture éclairée, loin d'une idéologie machiste. Pour elles, le combat est aussi décisif qu'existentiel. Au fil du parcours, la foule grossissait pour envahir entièrement l'artère principale du 20-Mars. Et les slogans, à n'en plus finir, résonnaient sur la grande place, où les sit-inneurs du Départ campent sur leur position, revendiquant la dissolution de l'ANC et la chute du gouvernement. Les vendeurs de drapeaux et d'autres produits de consommation y ont trouvé une aubaine à ne pas rater. Mais là-bas, tous ont été unanimes sur un gouvernement de salut national censé commander la prochaine étape transitoire. Par ailleurs, l'on a appris de la TAP que l'avocate Leïla Ben Debba et son collègue Abennasser Laouini ont été verbalement et physiquement agressés par un agent de police, alors qu'ils étaient en train de participer à la manifestation pacifique d'hier au Bardo.