Le report du rendez-vous d'hier augure-t-il d'un pas décisif de la part des partis de la Troïka ? Rien n'est sûr ! La journée d'hier devait être un moment décisif dans les négociations en vue de sortir de la crise. Chacun ayant bien conscience que le temps des pourparlers a assez duré et qu'il est urgent de revenir aux problèmes concrets du pays... Or, une fois de plus, on devait apprendre que le rendez-vous a été reporté au lendemain. C'est donc dans la matinée d'aujourd'hui que le sort de l'initiative de l'Ugtt va se décider, sachant que cette initiative a servi de base commune entre les protagonistes jusqu'à présent. « Pourquoi un tel report ? » est-on d'ailleurs en droit de se demander. Puisque, maintenant, presque toutes les parties se font l'écho de l'impératif d'aller vite. Est-ce les vacances du président de la République à Sousse, comme le souligne Bouali Mbarki, secrétaire général adjoint à l'Ugtt ? Ou est-ce le besoin des partis de la Troïka de poursuivre les concertations dans leur propre camp ? Disons que l'imprévu présidentiel a été pour les partis au pouvoir un... imprévu providentiel ! Ce délai supplémentaire qu'a voulu s'accorder la Troïka avant de répondre à la proposition de l'opposition augure-t-il d'un pas qui pourrait changer la donne ? On peut le penser, sachant que l'Ugtt et ses partenaires, à savoir l'Utica, la Ltdh et l'Ordre des avocats, ont déclaré haut et fort qu'ils reconsidèreraient leur rôle en tant que parrains du dialogue autour de l'initiative de la centrale syndicale. Qu'est-ce à dire ? Cela signifie que ce quartet pourrait se retirer et laisser aux protagonistes le soin de parler directement, avec le risque bien sûr que cet échange sans intermédiaire n'ait pas lieu... Entre le moment où nous couchons ces lignes et celui où le lecteur les lit, tout peut avoir changé. Avec, à la clé, un retour de Ben Jaâfer à l'Assemblée constituante, dans le meilleur des scénarios. De part et d'autre, on observait hier un optimisme très mesuré. M. Mbarki estime pour sa part que les partis de la Troïka font du « surplace » et rechignent toujours à envisager les « concessions douloureuses » dont nous avons besoin pour dépasser la crise : « Il n'y a pas de progrès visible ! », indique-t-il. Autrement dit, c'est le même refus d'inscrire la démission du gouvernement actuel dans un délai précis... Pour autant, le responsable syndicaliste déclare : « On reste positif ! » Du côté de la Troïka, et en particulier d'Ennahdha, on répète qu'on est ouvert au dialogue mais qu'on refuse qu'il soit accompagné de conditions... Ajmi Lourimi, membre du bureau exécutif d'Ennahdha, laisse entendre que les résultats décevants auxquels nous sommes parvenus jusqu'ici sont surtout dus au fait que les adversaires ont cru pouvoir faire chuter le gouvernement, non par le dialogue, mais par la rue... « Personne ne les a empêchés d'occuper l'espace public et d'appeler à la chute d'Ennahdha. Ils ont joué sur le rapport de force : que le meilleur gagne, donc ! », lance-t-il sur un ton provocateur... Et de rappeler les différents rendez-vous de l'opposition à l'occasion desquels celle-ci a cru pouvoir faire pression sur le gouvernement afin de le pousser vers la sortie... Mais le militant d'Ennahdha reconnaît cependant que l'attitude de l'opposition a changé : « Les esprits se sont calmés... » Au-delà de l'objection de principe relative au refus des conditions du dialogue, Ajmi Lourimi rappelle la position de son parti de maintenir un gouvernement doté de toutes ses prérogatives jusqu'à l'achèvement par l'ANC de sa mission, avec l'adoption du texte de la Constitution et celui de la loi électorale... L'idée de démission du gouvernement est acceptée, mais pas avant la fin des travaux de la Constituante. On est loin de la proposition de l'opposition, qui parle d'une démission automatique du gouvernement au bout de quinze jours et de sa transformation, ipso facto, en gouvernement de gestion des affaires courtantes. Si les deux protagonistes devaient, au cours de la réunion d'aujourd'hui, réaliser un progrès qui nous permettrait de sortir de l'ornière, sans doute serait-ce autour de cette question... Il semble en tout cas que tout le monde pousse à plus de souplesse dans la négociation. C'est ce qu'on pouvait retenir en tout cas de la réunion qui a eu lieu entre Béji Caïd Essebsi et Hamma Hammami... Et dont on attend un « écho » de l'autre côté.