La «confrérie sfaxienne» se radicalise et renforce les rangs des «faucons» du mouvement. Un nouveau casse-tête pour Rached Ghannouchi ! Alors que son patron Rached Ghannouchi semble de plus en plus enclin à jouer l'apaisement, allant jusqu'à... faire un saut à Paris pour rencontrer Béji Caïd Essebsi, Ennahdha s'oriente paradoxalement vers une radicalisation de ses positions. Avec, à l'appui, une nouvelle montée fulgurante de l'aile dure du mouvement. En effet, de Sadok Chourou à Abdellatif Mekki, en passant par l'inévitable Habib Ellouz, on est sordidement catégorique, comme l'attestent ces trois «non» : non à la démission du gouvernement, non à la dissolution de l'ANC et non à Nida Tounès. Ellouz, dont la rigidité n'est plus à démontrer, a poussé «l'audace» au point de dire que «certaines positions du Cheikh Rached ne reflètent pas les orientations fondamentales du mouvement» et que «ceux qui espèrent d'autres concessions de notre part peuvent déchanter». Le même Ellouz, encore lui, a osé prendre publiquement la défense du groupuscule sanguinaire d'Ansar Echaria, tranchant avec la fermeté de son camarade Ali Laârayedh qui a déclaré ce mouvement «organisation terroriste». Surgirent soudainement ces trois questions inévitables: Ghannouchi a-t-il perdu le contrôle de sa troupe ? Pourquoi, certaines de ses déclarations et positions sont devenues si facilement contestées par les siens ? Les faucons ont-ils achevé de prendre le dessus sur les colombes ? Le réveil sfaxien «La dernière montée en puissance de l'aile dure, affirme-t-on dans les coulisses du mouvement, a été, en grande partie, motivée par le réveil tonitruant de l'élite sfaxienne d'Ennahdha devenue désormais de plus en plus récalcitrante, parce qu'insatisfaite des nouvelles orientations hésitantes du mouvement». Il est vrai que la confrérie sfaxienne, jusqu'ici clémente et docile, est de plus en plus contestée par les sympathisants de la région qui lui reprochent un laxisme persistant, en dépit de sa belle «forteresse». Celle-ci est composée, comme on le sait, de dirigeants nahdhaouis de renom, dont les poids lourds Habib Ellouz, Sadok Chourou, Abdellatif Mekki, Moncef Ben Salem et autres Ayadi et Laâdhari. Bien évidemment, le «sursaut d'amour-propre» amorcé récemment dans la capitale du Sud a été mis à profit par l'aile dure du mouvement qui semble résolue à opter pour davantage de radicalisation au nom de la défense du prestige, aujourd'hui chancelant, du parti. Dilemmes En revanche, «l'orage sfaxien» semble avoir été vu d'un mauvais œil par Rached Ghannouchi qui, selon des sources au fait de l'actualité du côté du QG de Montplaisir, n'a pas caché sa déception face à ce qu'il considère comme «un moyen d'affaiblir les rangs du mouvement dans un contexte politique si difficile». Un nouveau casse-tête donc pour le Cheikh, après celui, non moins embarrassant, de la «petite révolte» que mène aujourd'hui la nouvelle vague des jeunes nahdhaouis, à coups de protestations sur la toile et dans les coulisses du Conseil de la choura qui leur sert de base arrière.