Il vaut mieux être réaliste et parler davantage d'équilibres budgétaires Face à un moment clé de l'histoire du pays, les Tunisiens doivent se réveiller pour se poser les bonnes questions . Le prochain gouvernement doit, en effet, se poser les questions suivantes : quelles seraient les priorités économiques? Comment procéder pour sauver la barque avant le naufrage ? Quels secteurs à cibler et quelles démarches à suivre ? Eclairage de deux éminents économistes. Tel que l'entend Yacine Ben Smaïl, la relance d'un appareil productif déjà en panne devrait figurer parmi les priorités du prochain gouvernement. Autrement dit, un nouveau pacte productif doit avoir lieu. Ce nouveau pacte productif passe, selon le même économiste, par le relèvement de la production, préférable à l'augmentation des charges sans production en contrepartie. Pour lui, seul un choc de compétitivité peut permettre de lutter contre le chômage et le désendettement. Ce pacte productif doit avoir pour pendant, ajoute le même interlocuteur, un pacte social garantissant davantage de flexibilité à l'emploi et à la sécurité sociale. Le nouveau pacte productif est selon lui la condition essentielle pour enrayer l'inégalité croissante résultant de l'hyperprotection des uns compensée par l'exclusion des autres, à commencer par les jeunes. Afin d'accélérer le redressement de l'économie nationale, l'économiste préconise de réviser le Code d'incitation à l'investissement afin de mieux l'adapter aux besoins des investisseurs locaux et étrangers, à même de le rendre plus attrayant. Il appelle, de surcroît, à garder stables les prix des carburants afin d'impulser la productivité des secteurs dépendant étroitement des produits énergétiques. Une politique économique réussie nécessite selon lui l'association des économistes pour participer activement à la conception et à la définition de ses grandes lignes. Des problèmes structurels L'économiste Mohamed Mabrouk a, quant à lui, la ferme conviction que le prochain gouvernement n'aura pas de baguette magique capable d'enfanter des miracles économiques. Tel qu'il l'entend, il vaut mieux être réaliste en parlant beaucoup moins de croissance que d'équilibres budgétaires. Car les problèmes de l'économie nationale sont, selon ses propres explications, beaucoup plus structurels que conjoncturels. D'autant plus qu'il faut compter des années pour ne pas dire des décennies pour opérer les réformes nécessaires. L'économiste préconise ainsi de focaliser l'intérêt sur les facteurs garants des équilibres budgétaires, tels que la transparence et la rationalisation des dépenses de l'Etat. Dans l'objectif d'un meilleur traitement des problèmes économiques lancinants, l'économiste Mohamed Mabrouk, appelle à mieux sceller le secteur public et le secteur privé. Tel qu'il l'appréhende, l'Etat ne doit pas rester les bras croisés, il est plutôt appelé à prendre l'initiative en montant de grands projets qu'il doit sciemment gérer. S'agissant des secteurs à cibler en premier lieu par le prochain gouvernement, l'économiste évoque avant tout le secteur agricole. Il estime que la sécurité alimentaire est un défi majeur mais un objectif réalisable pour la Tunisie. Il suffit pour ce faire d'optimiser l'exploitation des terres domaniales, de s'orienter davantage vers le dessalement des eaux et de mieux tirer profit des énergies renouvelables. Verdir l'appareil productif est, au demeurant, le mot d'ordre du redressement de l'économie nationale pour un pays agricole, selon M.Mabrouk.