C'est aujourd'hui que doit se tenir le grand rassemblement à La Kasbah, annoncé par le Front populaire et auquel ont été appelés partisans et militants de l'opposition, toutes sensibilités confondues, afin de « mettre fin au renversement du processus du dialogue national». Lors d'une conférence de presse tenue, hier matin à Tunis, son porte-parole Hamma Hammami, a exprimé sa détermination à aller jusqu'au bout. Et d'ajouter que la reprise du dialogue n'aura lieu que «sous conditions», sur fond d'engagement sérieux. Il s'agit, en particulier, de l'accord préalable au sujet de la personnalité qui occupera le poste de prochain chef de gouvernement, de l'annulation des derniers amendements apportés au règlement intérieur de l'ANC — que certains ont considéré comme un «coup d'Etat parlementaire » —, ainsi que de la révision des nominations administratives. «Nous n'accepterons jamais les demi-solutions, où les attitudes et les positions ne sortent pas de l'équivoque», déclare-t-il. Car, selon lui, l'expérience a révélé les manœuvres du parti islamiste et son obstination à accaparer le pouvoir. Pas plus tard qu'il y a quelques jours, a-t-il rappelé, le chef du gouvernement, Ali Laârayadh, a réaffirmé cette position. «Aucun respect pour les dispositions de la feuille de route et ses trois processus, gouvernemental, constituant et électoral. Le locataire de La Kasbah s'accroche à son poste, disant que le gouvernement actuel n'est pas issu de l'opposition pour que cette dernière le pousse à partir», a-t-il affirmé, avant de déclarer que, cette fois-ci, le dernier mot reviendra au peuple, à la rue si besoin est : «Il est grand temps de s'unir en toute cohésion pour arrêter cette dictature rampante» Aujourd'hui, la mobilisation est de mise. Le Front populaire ne cédera pas aux pressions : «Demain (aujourd'hui), nous resterons sur nos positions. Nous ne reviendrons pas sur notre décision». Cette réponse est venue suite à une information qui lui est parvenue au beau milieu de sa conférence : le ministère de l'Intérieur aurait rejeté la demande de rassemblement présentée par le Front, alors qu'il avait accordé son autorisation au préalable. Le ministère justifierait son refus en invoquant la prière du vendredi. Ce que Hamma Hammami considère comme un «prétexte» pur et simple, voire une nouvelle tentative de manœuvre. Membre du Front, Lotfi Ben Aïssa a présenté, pour sa part, une lecture critique de la crise économique dont souffre le pays. Il a focalisé son intervention sur le budget de l'Etat pour l'exercice 2014, le qualifiant de catastrophique et de «contre-révolutionnaire». Un budget qui, selon lui, ne cherche qu'à protéger les équilibres financiers et à consacrer davantage l'économie libérale et le capitalisme sauvage. Car, a-t-il souligné, ces choix d'orientation générale opérés dans ce contexte difficile ne pourront qu'alourdir les charges des ménages, appauvrir la classe moyenne et faire chuter de plus en plus son pouvoir d'achat. Le rôle de l'Etat providence demeure ainsi effacé, a-t-il analysé. Et de poursuivre que ce budget en mal de prévisions, qui prétend s'inscrire sous le signe de « la rationalisation des dépenses», cadre plutôt avec une politique d'austérité et de pression fiscale qui vise principalement la classe moyenne. Entrant dans les détails de la loi de finances, Mongi Rahoui, leader du Front, a indiqué de son côté que les estimations établies sont fausses. Cela dit, ajoute-t-il, toutes les ressources à mobiliser dépassent les prévisions, a-t-il jugé. Précision du ministère Le ministère de l'Intérieur a démenti hier avoir annulé l'autorisation obtenue par le Front populaire pour un rassemblement aujourd'hui à La Kasbah. Dans un communiqué, le ministère explique qu'il accorde le droit de manifester à l'avenue Habib-Bourguiba et Place de La Kasbah de 15h à 18h avec obligation de respecter l'horaire indiqué. Ces précisions interviennent suite aux informations qui ont circulé hier concernant le retrait de l'autorisation obtenue par le Front populaire pour organiser un rassemblement à La Kasbah.