Certains s'étonnent et d'autres s'inquiètent — déjà — sur le sort de notre compétition. En réalité, nous payons les pots cassés d'un football qui marche sur la tête... Examinons d'abord l'état des lieux. Il nous aidera à comprendre tout ce qui se passe à l'heure actuelle dans nos stades et dans notre football. Héritage du passé il est vrai, mais aussi résultante de trois années post-révolutionnaires où la question sportive n'était pas dans le discours des décideurs politiques et autres qui se sont plutôt occupés de partager le gâteau. Celui qui existe et celui à venir, contraignant le ministre de la Jeunesse et des Sports à se battre tout seul contre un système et des hommes «pourris» par des années de laisser-aller, de petits et de grands trafics. Et, s'il est vrai que la révolution n'a pas arrangé les choses, il n'en est pas moins vrai que certains personnages se sont engouffrés dans le paysage pour le «polluer» davantage et consacrer un statu quo qui fait du tort à l'image d'un football qui n'a jamais été aussi bas. Aujourd'hui plus que jamais, nous avons l'impression (et pas seulement) que la situation échappe à tout le monde et que notre football est un peu ce corps flottant dans l'espace et qui peut s'écraser n'importe où et à n'importe quel moment. C'est ainsi que le ministère n'arrive pas à contrôler la fédération; que la fédération n'arrive pas à contrôler les clubs et les arbitres; et que la Ligue ne contrôle rien et que les clubs sont débordés par les supporters... Le tout dans une confusion qui n'annonce rien de bon. Pis encore, plus on s'approchera des verdicts et plus la situation deviendra incontrôlable. Et ce n'est pas la police ou la garde nationale qui pourront indéfiniment jouer aux pompiers et contrôler les débordements de toutes les parties prenantes de notre football. Aujourd'hui plus que jamais, fédérations, Ligue et clubs doivent assumer leurs propres responsabilités, d'autant qu'ils ont les outils pour le faire. Les outils, ce sont les lois, les règlements et les sanctions qu'on n'applique pas parce que les intérêts et les enjeux sont ailleurs. Les résultats, toujours les résultats, même si, à l'arrivée, ils ne sont guère fameux. Voyez un peu ce qui se passe en équipe nationale, alors que le CSS n'a fait que sauver la face d'un football qui dégringole dans les classements mondiaux et même continentaux. A défaut de cela donc, on se bat pour des miettes locales : un titre ou pour éviter la relégation. A ce jeu, tous les coups sont permis, sous l'œil passif et parfois complice de la FTF et de la Ligue qui donnent l'impression d'être occupées par autre chose. Etat des lieux, disions-nous. Examinons-les avec plus de détails. Rapports ministère-FTF C'est nouveau et cela pourrit véritablement l'ambiance de notre football et de notre sport en général. Car il ne faut pas oublier qu'un autre conflit larvé oppose également le ministre des Sports au président du comité olympique qui a, du coup, instauré une liaison stratégique avec le président de la FTF, et ce, contre l'avis et la volonté des autres membres du Cnot. Ce que reproche le ministre à Al Jary? L'absence d'un projet, d'une politique et de choix clairs et de résultats. Ce qu'il reproche au président du Cnot? Un peu la même chose, en plus d'une gestion très personnelle de ce prestigieux organisme. L'état des infrastructures Notre football manque cruellement d'un outil de travail. Avec des terrains et des stades inadaptés et à risques. Comment voulez-vous, dans ce cas, parler de football quand les gradins sont vides, quand les joueurs ont du mal à exécuter le geste technique le plus simple ou alors quand les entraîneurs n'arrivent pas à faire appliquer un schéma tactique pour cause de mauvais état du terrain?! Clubs en faillite Prenons les deux clubs les plus riches du championnat. Sans l'apport personnel de Hamdi Meddeb et Slim Riahi, Espérance et Club Africain seraient aujourd'hui en faillite avec une ardoise de plusieurs dizaines de milliards. L'Etoile y est depuis quelque temps, alors que le CSS n'est pas mieux. Ne parlons pas des autres clubs qui vivotent et qui n'arrivent plus à payer joueurs et cadre technique et qui accumulent le passif. Instabilité technique Nous ne cesserons jamais de le répéter. Avec cette absence de visibilité et un mandat de deux ans pour les bureaux directeurs, aucun club tunisien ne peut parler aujourd'hui de projet technique. Projet technique ultérieurement sanctionné par une instabilité chronique au niveau des entraîneurs. Au lendemain de la 11e journée, EST, ESS, CSS, ST, ASM, OB, CSHL, JSK, USM (2 fois) ont déjà changé d'entraîneur. ST, Gafsa, CAB, EST et CA s'apprêtent très probablement à le faire. C'est loin d'être terminé, puisqu'à l'approche des verdicts, le mouvement risque de s'accélérer ultérieurement. L'arbitrage Avec une pyramide inversée et un arbitrage dépendant, il faudra s'attendre au pire. Dans les championnats qui se respectent, le corps de l'arbitrage est indépendant. Viennent ensuite la Ligue puis la fédération qui s'occupe de la promotion du football et de l'équipe nationale. Du côté de chez nous, nous avons les clubs qui font la loi au sommet de la hiérarchie, puis la FTF, la Ligue et enfin l'arbitrage qui est à la merci de tout ce beau monde. D'où la gabegie qui prévaut actuellement pour la simple raison que l'arbitrage n'est ni indépendant ni protégé. Livrés à eux-mêmes et contraints de faire de l'équilibrisme entre clubs, FTF et Ligue, nos arbitres sont acculés aux calculs et contraints à l'erreur. Bref, notre football marche sur la tête. Et rien n'indique qu'il remettra les pieds sur terre!