Les 306 agents et cadres des forces de sécurité intérieure révoqués réclament justice et équité tout en accusant le ministère de laxisme... Quelque deux cents agents et plus de la sécurité intérieure licenciés se sont rassemblés, hier matin vers 10h00, devant le ministère de l'Intérieur pour leur troisième jour de sit-in. Brandissant le drapeau national, les manifestants ont appelé leur ministère à les écouter en scandant des slogans et ont réclamé haut et fort leur réintégration. Alors que les journalistes ont été interdits d'approcher les sit-inneurs qui ont campé devant la porte du ministère donnant sur l'avenue Bourguiba, on a pu rencontrer quelques-uns des protestataires. Mohamed Ben Sassi, gardien de la paix, la quarantaine, a affirmé que les sit-inneurs, tous licenciés injustement, d'après lui, ne réclament que justice et équité. «Nous sommes des victimes de la politique post-révolutionnaire. Notre revendication était de réformer le système et de l'assainir des corrompus et autres, et voilà qu'on a opté pour notre licenciement rien que pour démontrer que nous sommes dans nos torts. C'est injuste car nous n'avons rien fait de répréhensible ni en accomplissant notre travail, ni contre les citoyens. Cependant, ceux qui ont torturé, agressé, violé et tué travaillent encore. Pire, ils ont gagné des grades par-dessus le marché !», a commenté Mohamed d'un ton résigné. Selon lui, 90% des 306 agents révoqués l'ont été après la révolution dont 13 agents pénitenciaires, 2 de la Protection civile et le reste de la police et de la Garde nationale. Les motifs du renvoi sont multiples dont l'administratif à l'instar de la non-application des instructions, le comportement inadéquat. Mais l'adhésion aux syndicats a été aussi l'un de ces motifs pour certains agents. «Nous sommes à notre troisième jour de sit-in et demain nous entrerons en grève de la faim, ici même, devant le ministère qui ne nous écoute pas. On essaie d'étouffer l'affaire auprès des médias qui nous sont interdits, alors que certains ont repris leur travail». Danger et difficultés Plus jeune, Yassine qui n'a pas voulu dévoiler son identité, a critiqué les conseils d'honneur qui ont décidé ces licenciements. «Normalement, ces conseils doivent être élus, et ils ne le sont pas ! Il y a même des membres qui y figurent qui sont connus pour leur mauvaise réputation et leur implication dans des affaires de corruption. Parmi les licenciés, il existe des cadres qui ont été poussés à la retraite anticipée alors qu'ils ont un savoir-faire important. Désormais, ils sont la cible des groupes terroristes qui essaient de les attirer pour les intégrer dans leur nébuleuse. On a eu un cas auparavant, celui de Ezzeddine Abdellaoui qui a été impliqué dans l'affaire de Chokri Belaïd, a-t-il enchaîné. Pour sa part, Ouissal Ben Salem, agent de police, 34 ans, a appelé à la réouverture d'une enquête concernant son cas et bien d'autres licenciés pour avoir contrevenu aux consignes de son supérieur hiérarchique. «J'avais arrêté une voiture de laquelle on a retiré une plaque de cannabis d'un kilo au rond-point de Mhamedia-El Mourouj. Mon supérieur a présenté l'affaire comme si c'était lui qui avait fait le travail. Il y a eu une petite dispute entre nous, suite à laquelle on m'a arrêté puis licencié le 02 août 2012. Et voilà que je n'ai plus de ressources pour subvenir aux besoins de ma famille...», a-t-il expliqué. Deux autres agents, dont une femme, ont évoqué les difficultés financières par lesquelles ils passent, entre autres, à cause des prêts bancaires qu'ils ne parviennent plus à rembourser. Cette affaire des agents de la sécurité intérieure licenciés nous rappelle une autre, celle de leurs collègues emprisonnés après la révolution parce qu'ils sont accusés d'avoir fait usage de leurs armes lors des manifestations dès le 19 décembre 2010...