Les défenseurs de la concomitance campent sur leurs positions, prétextant que les bailleurs de fonds n'ouvriront les vannes qu'à cette condition Le débat sur l'ordre des élections législatives et présidentielles continue de plus belle, alors que l'Instance supérieure indépendante pour les élections presse les partis politiques de trancher la question, pour pouvoir fixer le calendrier final et entamer l'enregistrement des électeurs. «L'enregistrement des électeurs est une opération relativement simple, vu qu'il existe d'ores et dejà 4 millions d'électeurs inscrits. Il est en revanche très urgent aujourd'hui de fixer la ou les dates des scrutins pour mettre enfin en place un calendrier clair et connaître les citoyens qui, le jour du vote, seront aptes à voter», a déclaré Nebil Baffoun, membre du conseil de l'Isie, à l'occasion d'un débat organisé hier à Tunis par le Centre pour les études de l'Islam et la démocratie (Csid). Lors de ce débat, le parti Ennahdha, représenté par son porte-parole Zied Laâdhari, a défendu la concomitance des échéances présidentielles et législatives, invoquant des raisons budgétaires, sécuritaires et l'impératif de sortir au plus vite d'une phase transitoire qui n'a que trop duré. «La poursuite de la situation provisoire ne permet pas aux investisseurs, aux bailleurs de fonds et aux autres pays d'avoir une vision claire sur la politique que compte poursuivre la Tunisie», a expliqué Zied Laâdhari. Il craint également que la multiplication des échéances électorales sur les Tunisiens n'engendre une désertion des urnes par les électeurs. La Constitution doit être respectée De son côté, le porte-parole du parti Ettakatol, Mohamed Bannour, a estimé plus convenable de séparer les deux scrutins, et d'élire tout d'abord un président de la République. selon lui, une fois élu, il lui revient de charger le chef du parti victorieux aux élections législatives de former un gouvernement. «Je pense que les électeurs ne sont pas assez mûrs pour faire la différence, le jour du scrutin, entre une élection présidentielle et des élections législatives. Il faudrait donc les séparer, pour que leur choix soit plus réfléchi», a-t-il déclaré, avant d'ajouter que la question du moment est de savoir si les partis politiques croient encore à l'échéance fixée par la nouvelle Constitution, à savoir la tenue d'élections avant la fin de l'année 2014. A cela, l'ex-rapporteur général de la Constitution, Habib Khedhr, répond que la classe politique est condamnée à respecter ces délais. Selon lui, il n'existe aucune parade juridique pour dépasser la date du 31 décembre 2014. Le danger de la présidentielle C'est la crainte exprimée par le professeur de droit Chaker Houki au cas où l'élection présidentielle précèderait les législatives. Selon lui, ce cas de figure risque de faire chavirer l'ensemble du processus de transition démocratique. Il note ainsi que la querelle actuelle sur l'ordre des scrutins n'est que la reprise d'une querelle plus ancienne entre les partisans du régime présidentiel et ceux du régime parlementaire. «Or, notre Constitution ne supporterait pas la concentration des pouvoirs exécutif et législatif entre les mains d'un seul parti», a-t-il déclaré. Dans une analyse complotiste de la situation politique, le professeur Chaker Houki explique qu'en cas de victoire d'Ennahdha lors de la présidentielle, les élections législatives seront acquises au parti islamiste. Ce qui, selon lui, entraînerait une levée de boucliers de la part de l'opposition qui contesterait les résultats du scrutin. «Si, en revanche, le candidat de Nidaa Tounès remportait l'élection présidentielle, alors il risquerait de tout faire pour entraver et perturber l'échéance législative, acquise, selon toute vraisemblance, au parti islamiste», a-t-il ajouté. 220 jours nous séparent de la date du 31 décembre 2014, et toujours pas de réponse à la question qualifiée de «politique». Et comme pour l'ensemble des échéances passées, tout le monde veut croire que les élections se tiendront avant la fin de l'année en cours, mais personne ne daigne nous expliquer comment.