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La malédiction
Opinions - Islam politique
Publié dans La Presse de Tunisie le 02 - 06 - 2014


Par Me Mohamed Laïd Ladeb(*)
La plus grande menace qui pèse sur le monde arabo-islamique et islamique en général est ce que certains appellent l'Islam politique à tort. Puisque l'Islam est une religion révélée, comme ses précédentes le judaïsme et le christianisme, véhiculant certaines règles morales et certains préceptes et usages comme les prières et l'aumône, et autres piliers dont le strict respect par les fidèles de ces religions cristallise et leur adhésion et leur foi, il faut dire que l'adjectif «politique» attribué à cette religion est un effort continu «d'idéologisation» dont l'histoire a montré et les limites et les désastres sur le monde islamique depuis la nuit des temps.
Sans entrer dans les détails, la dénomination «Islam politique» remonte au début du XXe siècle avec l'émergence d'un groupe religieux dont le chef est Hassen Al Banna, chef de la première confrérie des Frères musulmans. Ceux-ci, partant d'une approche historique qui leur est propre, pensent que le salut du monde islamique réside dans le retour au passé et notamment à la période du Prophète Mohamed et des cinq califes, faisant fi de toute l'évolution et des révolutions tant techniques que politiques qu'a connues l'histoire de l'humanité entière. A dessein, ils mettent entre parenthèses tous les assassinats «politiques» qui ont marqué l'histoire de la communauté musulmane, à commencer par celui du calife Othman en arrivant à celui d'Ali Ibn Abu Taleb.
La dislocation de l'Empire Ottoman, la perte de l'Andalousie, l'occupation de la Palestine, la désintégration actuelle de la Somalie, du Mali, de l'Afghanistan ne sont que quelques points ,noirs, tragiques même, de l'histoire arabo-islamique, amers fruits d'un impérialisme occidental rampant et d'une approche politique de la plupart des dirigeants, morts ou vivants où les valeurs de démocratie, de justice et de liberté font cruellement défaut.
Alors que l'Islam en tant que religion révélée encourage ces belles valeurs de liberté, de liberté de conscience, de justice sociale et de recherche scientifique, il se trouve que le monde islamique, avec tous ces pays arabes et d'autres, se trouve derrière tous les pays développés. Les valeurs de liberté, de justice et de développement y sont malheureusement encore étrangères.
Tant que l'Islam politique» avec ses adeptes, ses confréries, ses groupes de moujahidine et ses partis politiques n'a pas fait son autocensure en jetant les armes, en interdisant les attentats-suicide, en reniant cette approche de «jihad» étrangère au vrai islam celui de la fraternité, de l'amour et de la tolérance, le monde arabo-islamique ira de mal en pis.
Viendra un jour où le risque que nous soyons «les indiens» des temps modernes sera réel.
Cherchant à instaurer la «démocratie» et les «libertés» en Irak, Libye et Syrie, le monde occidental, notamment les Etats-Unis des Bush père et fils et de l'Angleterre de Tony Blair, n'a fait qu'instaurer le terrorisme, l'obscurantisme et la barbarie.
Quelle aubaine pour Israël et le sionisme ! L'Islam politique, sans le vouloir peut-être, mais sûrement sans le savoir, avec ses méthodes des attentats-suicide, de la terre brûlée, ne fait hélas que le jeu des impérialistes et du monde occidental.
Alors que le «terrorisme» nous était étranger en Tunisie, avec l'arrivée de la Troïka et notamment le parti d'Ennahdha au pouvoir, le voilà qui fait jour, se développe, sème ses racines et ses adeptes partout en Tunisie. L'histoire retiendra que le parti Ennahdha et son chef M. Rached Ghannouchi, en étaient les principaux instigateurs. Le laxisme dont ils ont fait preuve vis-à-vis des chefs des confréries religieuses du Qatar et autres, l'insouciance mortelle qui a marqué leurs discours vis-à-vis des groupes religieux fanatiques, leur accueil des dirigeants de quelques bandes fascistes dans le stade d'El Menzah et à Kairouan sont de multiples gestes encourageants pour les terroristes et fanatiques.
A l'heure où nous écrivons ces lignes, nous venons d'apprendre la mort de deux martyrs de notre chère armée. Cette armée qui a eu le privilège et la grâce de sauvegarder la révolution du 14-Janvier 2011 et de la prémunir contre l'effritement et l'anarchie. Que Dieu ait leur âme ! Qui est responsable de ces morts et des autres pertes humaines tant parmi les forces de l'ordre, nos vaillants soldats et nos dirigeants politiques les feu Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi, Lotfi Nagdh et Mohamed Belmufti ? Une question lancinante qui pèse essentiellement sur la conscience de quelques dirigeants d'Ennahdha.
Alors qu'on le taxait de «despote éclairé» et même de «dictateur» le combattant suprême Bourguiba avait bien saisi — en revenant seulement à l'histoire islamique — les dangers de l'islam politique tant sur le peuple tunisien que sur l'Islam proprement dit.
En présentant l'Islam comme une «idéologie» où le spirituel et le temporel sont confondus, ces forces politiques cherchent à faire de lui un puissant instrument d'intégration politique brimant, au nom de l'Islam, la liberté de la pensée humaine.
En ce sens, M. Mohamed Talbi avait dit dans un vieil article, mais toujours d'actualité (l'Islam dans le monde moderne in Confluent 1963 n°34, p.751) que «là encore le visage de Dieu est oublié. Là encore le manque d'intégrité aboutit à des désastres spirituels et la religion qui accepte les compromissions politiques doit accepter aussi les épithètes dont l'affublent ses ennemis»(1).
Les trois années de disgrâce de la triste Troïka ont jeté la Tunisie et son vaillant peuple dans les labyrinthes du terrorisme et de l'obscurantisme.
Les cellules dormantes des extrémistes religieux n'attendent que le moment choisi pour semer la pagaille, le désordre et la mort dans notre pays. Alors que nous définissions le terrorisme et l'intégrisme du temps de l'ex-président Ben Ali comme l'exploitation de la misère humaine à des fins politiques (2), le terrorisme religieux prend aujourd'hui des allures de banditisme, mêlé à la contrebande et aux crimes crapuleux comme les assassinats collectifs, les rapts des filles à des fins bassement sexuelles et le commerce du haschich et de la drogue. Des procédés et des agissements qui n'ont rien à voir avec les valeurs de l'Islam en tant que religion révélée. Les vrais musulmans, outre qu'ils sont scandalisés par ces agissements inhumains, appellent à un véritable sursaut salvateur de toutes les forces démocratiques de notre pays et de tous les pays arabo-islamiques sur lesquels la menace terroriste est réelle.
Ce saut salvateur ne peut se réaliser que par une union sacrée de toutes les composantes de la société éprises de liberté, de démocratie et de justice sociale, loin des calculs bassement politiques et électoraux.
Une application stricte et ferme de la loi n°88-32 du 3 mai 1988 relative aux partis politiques est vivement recommandée, notamment dans son article 3 qui stipule qu'«un parti ne peut s'appuyer fondamentalement dans ses principes, activités et programmes sur une religion, une langue, une race, un sexe ou une région».
Qu'on le veuille ou pas, l'histoire nous le dira, le seul salut du monde arabo-islamique et ses véritables chances pour un développement politique humain résident, à notre avis, dans une ferme volonté de séparer tout ce qui est religieux du domaine de la vie citoyenne publique.
L'on ne cesse de le répéter, l'Islam est une foi, une religion révélée. Elle mérite notre respect et notre estime. C'est une affaire entre l'individu et son Créateur. Evitons-lui ces marmelades politico-politiciennes. Il y va de son salut et du salut du monde arabo-islamique.
Dans son ouvrage «Islam et politique, la modernité trahie» (3), Burhan Ghalioun pense qu'«à la stratégie de démocratisation se rattache la question de la laïcité. La redéfinition des domaines de compétences des religieux et des politiques ne doit pas cacher l'unité réelle de l'ensemble d'une formation sociale. Aucune société n'existe sans une historicité, sans culture, sans valeurs et sans respect de certains équilibres. La laïcité réside beaucoup moins dans la substitution de valeurs dites laïques aux valeurs culturelles nationales (ou traditionnelles) que dans la réinscription de ces mêmes valeurs nationales dans un registre nouveau, celui de la rationalité contemporaine».
«Cette rationalité contemporaine», pour être possible et effective, exige de tout le monde arabo-islamique, et notamment ses intellectuels et ses hommes politiques un sursaut salvateur qui ne peut se concrétiser que par une véritable révolution culturelle qui prend ses sources dans les fameuses déclarations universelles des droits de l'Homme et notamment celle de 1789, du 10 décembre 1948, les préambules de la Constitution du 1er juin 1959 et celle plus récente de 2013.
Ces textes ont insisté sur les droits inaliénables de l'Homme, à savoir le droit à la libre expression ou la liberté de conscience, de culte et à l'égalité de tous, hommes et femmes, devant la loi. Inspirée de la Déclaration universelle des droits de l'Homme du 10 décembre 1948, la loi n° 88-32 du 3 mai 1988 organisant les partis politiques a interdit toute discrimination de religion, de langue, de race, de sexe on de région.
Partout dans le monde arabo-islamique, la plupart des régimes politiques, «républiques ou monarchies, ne cessent de se référer à ces «déclarations universelles des droits de l'Homme», mais le praxis fait malheureusement défaut. Il ne suffit plus de se déclarer partisan de ces «droits» mais il est plus qu'urgent de les faire respecter et de les garantir dans la vie quotidienne. La Tunisie post-révolutionnaire vient de vivre avec la triste Troïka le grand écart entre les slogans de «légitimité» et des «droits de l'homme» et les pratiques de certains de ses dirigeants. Ô pouvoir quand tu nous tiens (4)! Sa fièvre leur a fait oublier et les serments publics et les idéaux qu'ils clamaient.
Cette révolution culturelle doit se pencher sur une relecture de notre histoire arabo-islamique depuis la mort du Prophète Mohamed jusqu'à nos jours. Une relecture des livres de Taha Hussein, de Ahmed Amine et autres dans une optique de clairvoyance, de lucidité et d'objectivité est nécessaire, loin de toute mystification. Elle n'est pas suffisante. Il est temps qu'on inculque à nos jeunes garçons et filles qui vont se faire exploser dans les souks de l'Irak, de Syrie et autres et qui vont se prostituer dans les montagnes lointaines de ces pays que l'Islam est une belle religion d'amour, de fraternité, de tolérance et d'humanisme.
Ils n'ont qu'à méditer les beaux préceptes et les beaux gestes de notre Prophète Mohamed, vis-à-vis des juifs, ses voisins et vis-à-vis des hommes «vaincus» de la Médina : «Allez, vous êtes libres» (Antom Attoulaka).
L'Islam répugne la violence et la tyrannie
Qu'ils se récitent chaque jour la sourate des infidèles «Al Kafiroun» et qu'ils se souviennent avant de penser à commettre un attentat-suicide ou un crime quel qu'il soit à cet énoncé du Coran dans la sourate Yunus : «Si Dieu l'avait voulu, l'univers tout entier embrasserait la vraie foi ! Voudrais-tu contraindre les hommes à se convertir ?»
Les «terroristes» se réclamant de l'Islam oublient malheureusement que par leurs crimes crapuleux, leur manque de tolérance et la haine de l'autre, ils ne font que desservir cette religion et rabaisser ses adeptes et ses fidèles au rang de «criminels».
J.J. Rousseau écrivait que «l'esprit humain est partout le même, les valeurs du bien sont aussi les mêmes par-delà la diversité des peuples et la pluralité des cultures (5). Le Prophète Mohamed ne disait-il pas qu'il n'y a de différence entre un non-Arabe (ajami) et un Arabe que par la piété.
La guerre des croisades est finie depuis belle lurette tant pour les communautés chrétiennes que pour les autres communautés.
Le dialogue entre membres de la communauté musulame entre eux et entre les autres adeptes des autres religions doit être encouragé, renforcé. Il y va de notre salut.
Le dialogue, la tolérance et l'amour de l'autre seront les trois piliers d'un véritable salut du monde arabo-islamique et de l'Islam lui-même.
Pour paraphraser Georges El Gozy dans un de ses écrits, il est bon de souligner qu'entre le nihilisme fasciste et l'obscurantisme religieux, une bissectrice pourrait tracer la direction d'une finalité nouvelle, une société humaine (6).
Pour la société musulmane, cette finalité nouvelle ne peut être que liberté, tolérance et justice, loin des partis pris et du complexe d'infériorité.
C'est seulement à ce prix que la malédiction qui pèse sur le monde islamique peut être relevée.
*(Avocat à la Cour de cassation)
––––––––––––––
(1) Voir notre mémoire sur l'Islam et le développement politique en Tunisie», p.195 disponible à la faculté de Droit de Tunis et à l'ENA.
(2) Voir notre livre «Une nouvelle stratégie de développement»
3) Voir Burhan Ghalioun : Islam et politique, la modernité trahie. Ed. La Découverte p. 247
4) Lire le livre de Saïd Safi: Fièvre 42, en arabe
5) J.J. Rousseau : œuvres complètes -
L'intégrale, .Ed.Seuil p. 324
6) G.El Gozy : Les damnés de l'opulence
Ed.Levy.1970. p. 17


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