Par genre, ce sont les femmes qui emportent la mise, avec une participation de 81,77 contre 65,64 % pour les hommes Dans cet intervalle d'effervescence électorale, c'est le remue-ménage chez les partis. Il ne se passe pas une semaine sans qu'une formation politique ne publie une liste de ses candidats à la députation. Le fait de sélectionner les représentants du peuple et par là même les détenteurs du pouvoir législatif et de soumettre les listes au suffrage est en soi un signe de la bonne santé démocratique de la Tunisie. Toujours est-il que de grandes leçons sont à tirer de l'expérience récente de l'Assemblée nationale constituante (Anc). Si on passait outre les événements qui ont donné lieu à la revendication soi-disant populaire pour l'élaboration d'une nouvelle constitution, concentrons-nous davantage sur son résultat final. Un florilège de 217 députés qui ont meublé inégalement depuis fin 2011 à ce jour les bancs vert olive du Bardo. Fort heureusement, la transmission en direct a été assurée tout le long de cette législature retransmission qui touche à sa fin. Un acquis autorisant à tous de juger du rendement des locataires de l'auguste palais. Le public tunisien, les visiteurs du pays et les chancelleries, on l'imagine, ont pu suivre avec intérêt, amusement ou carrément avec effroi, les débats «agités» de l'Anc. Maintenant, la question qui se pose, si c'était à refaire, que faudrait-il éviter ? Beaucoup de choses en réalité. Au lendemain de la fièvre révolutionnaire et de ses répercussions immédiates ; une rotation de l'élite politique. Une idée persistante a fait son chemin, selon laquelle l'Assemblée doit jaillir des entrailles du peuple, d'où l'appellation assemblée du peuple «majless echaâb », alors qu'elle est forcément constitutive. Ainsi, grâce ou à cause de ce diktat, mais également faute de temps et de personnel politique approprié, l'Anc s'est trouvée flanquée de personnes qui n'avaient rien à y faire. Les anonymes et les illettrés Certain(e)s députés(e)s sont resté(e)s méconnu(e)s. Malgré le tapage médiatique orchestré autour d'eux, malgré la diffusion quasi quotidienne des plénières. Sages comme une image, ils sont convoqués par leurs partis respectifs pour voter selon des consignes strictes et se taire, sinon... C'est tout juste si après quatre à cinq mois, ils lisaient laborieusement une rédaction d'écolier pour défendre une thématique, un projet ou critiquer tel autre. Ce sont les anonymes de l'Anc. Leur lecture hésitante et saccadée des interventions vraisemblablement écrites par des tiers témoigne non seulement du niveau d'instruction réduit à sa plus simple expression, mais également de leur manque d'intérêt pour la chose. Ces échantillons remplissent, hélas, les rangées bondées du parti Ennahdha, mais pas seulement. Les C.-V. des élus publiés par le site de l'ANC ou par Marsad, l'observatoire de l'Assemblée, attestent de ces carences en matière d'instruction qui ont rejailli inévitablement sur le rendement des élus dans l'élaboration du texte fondateur, la Constitution, mais également au niveau du manque de compréhension des subtilités juridiques, trahis par les débats. Le comportement, affligeant, dans les médias, en public et sous la coupole témoignait alors de multiples failles également comportementales, et ce d'une partie non négligeable de ces élus. Les toujours présents et les grands absents L'absentéisme a été un problème récurrent de cette mandature. Combien de fois des séances sont reportées, faute de quorum, combien de plénières désertées et somnolentes sont retransmises à la TV ? Le taux de participation aux votes est un bon indicateur du pourcentage de présence des députés. D'évidence, le parti Ennahdha a des leçons à donner en matière d'assiduité et donc de discipline. Les élus islamistes emportent haut la main les vingt-neuf premières places du classement. Ils sont les plus réguliers de tous leurs collègues. Deux élus du parti majoritaire remportent ex aequo la première place avec la moyenne époustouflante de 98,79. Ils sont Mounir Ben Hnia et Mahmoud Gouia. Toujours selon les statistiques présentées par le site marsad.tn. En bas de l'échelle, se place Aymen Zouaghi, indépendant, après avoir été élu sur les listes de la Pétition populaire devenue depuis le Courant de Mahaba, il ouvre le palmarès des mauvais élèves avec un taux de 33,86, talonné par Ahmed Néjib Chebbi, dirigeant du parti Joumhouri, qui affiche une participation au vote de 32,83. Le cancre de la classe est incontestablement Mohamed Lotfi Ben Mesbah du Bloc démocrate avec un insignifiant taux de participation aux votes de 5,79. C'est à se demander si ce dernier a continué à percevoir ses rémunérations, à bénéficier de tous les attributs et avantages des élus en manifestant tant de dédain vis-à-vis des Tunisiens et des engagements qu'il n'a pas honorés. Par genre, ce sont les femmes qui emportent la mise, avec une participation de 81,77 contre 65,64% pour les hommes. Ce sont toujours les députées du parti Ennahdha qui se placent loin devant. Les instables Le nomadisme parlementaire a été également l'un des grands maux de cette Assemblée. Il ne se passait pratiquement pas une semaine sans qu'on ait annoncé du haut du perchoir la migration d'un député, voire de plusieurs, vers un parti, un bloc ou carrément vers les indépendants, sans attache aucune. Des scandales ont éclaté çà et là pour associer ces pérégrinations à des transactions commerciales fort juteuses. En l'absence de preuves et d'enquêtes impartiales diligentées par la justice, l'on ne peut que regretter ce genre de rumeurs persistantes qui ont terni l'image de l'Assemblée et la réputation des élus. De la catégorie des instables, plusieurs noms ont été retenus pour avoir changé de couleur de trois à quatre fois. La palme d'or est décernée à Gassas, Arbi Ben Salah-Abid, qui plus est dispose du titre de deuxième vice président de l'Assemblée, Tarek Bouaziz et Ali Houiji. Tous et bien d'autres font partie de la catégorie des députés « caméléons », qui ne se gênent nullement de défendre à chaque fois un parti, une idéologie et de se placer au gré des humeurs mais des ambitions aussi de gauche à droite de l'échiquier. La liste des anomalies est encore longue. Cela va de la plus comique à la plus tragique. Certains députés se sont fait remarquer par leur extrême agitation qui éclate parfois en crise de nerfs en pleine séance. A ce titre, Ibrahim Gassas tient le haut du pavé, compte tenu da la fréquence de ses crises. D'autres se sont fait remarquer par l'inconsistance de leurs interventions, telle Sonia Ben Toumia qui choisit de temps à autre de distraire son public avec sa production poétique ou ses analyses existentielles. Mais, il ne sert à rien maintenant de remuer le passé, juste un mot aux chefs des partis, il faudra tirer les leçons du passé, savoir qui favoriser pour représenter les Tunisiens, et ne pas oublier que le futur parlement durera un quinquennat.