Nul ne peut nier l'ampleur de la nébuleuse terroriste, gagnant de plus en plus du terrain, ni perdre de vue sa pesanteur sur le cours ordinaire de notre vie, jusque-là perturbé par des frappes meurtrières à l'encontre de nos forces armées et sécuritaires. Ainsi personne n'ose contredire l'évidence que ce phénomène ne pourrait être seulement l'affaire du gouvernement qui n'a fait que mettre en place une cellule de crise, étant constamment sur ses gardes, afin d'agir et gérer dans l'immédiat les renseignements et informations recueillis sur les camps des intégristes. Or, seul, le gouvernement ne peut aller très loin dans sa lutte contre ce fléau. Car, dans pareil combat aux manœuvres plurielles, dont les origines sont aussi multiples et méconnues, la mobilisation, à n'en point douter, semble de mise. De par sa responsabilité citoyenne, la société civile, elle aussi, s'est engagée dans la guerre contre le terrorisme. Par les solutions proposées, elle n'est pas restée les mains croisées. Et l'Observatoire national de lutte contre le terrorisme et le crime organisé a été aussi de la partie. Son président, M. Hatem Yahyaoui, a donné, hier matin, à la maison du barreau à Bab Bnet à Tunis, une conférence de presse dans laquelle il a tenu à exposer les grandes lignes d'une stratégie nationale de prise en charge des victimes du terrorisme. Que sont-ils réellement et comment les traiter ? Partant d'une définition encore imprécise du phénomène en soi et en l'absence jusqu'à maintenant d'assises juridiques le régissant, vu le retard accusé par l'examen en plénière de la loi antiterroriste et du blanchiment d'argent, le flou des qualifications condamné-victime persiste. Et pourtant, l'observatoire concerné semble être venu à bout de cette confusion conceptuelle, allant jusqu'à dissiper l'équivoque à sa manière. En fait, la stratégie présentée a été élaborée en quatre axes majeurs, formant ainsi un projet à motivation morale et matérielle fait pour récompenser, en hommage posthume, nos martyrs tombés sous les coups meurtriers des obscurantistes ennemis de la lumière. Premier point établi, la proposition à l'actuel gouvernement d'attribuer aux martyrs des forces armées et sécuritaires la qualité « morts pour la Tunisie » qui sera ainsi inscrite sur les extraits de décès. Ceux-ci seront qualifiés « d'enfants de la nation» au sens propre du terme. Tel fut le cas en France dont les martyrs de la patrie sont désignés ainsi. Deuxième point, déjà approuvé par le gouvernement, la récompense promise à celui qui fournirait des informations contribuant à l'arrestation de terroristes, la neutralisation d'un réseau ou d'une cellule terroriste ou le dévoilement de leurs desseins ou leurs complices ravitailleurs d'armes et de munitions. Cela, selon le conférencier, relève bel et bien d'un devoir citoyen. Et ce n'est pas tout, la stratégie comprend également l'appel à consacrer une institution publique destinée à prendre en charge des enfants nés hors du cadre du mariage, suite au prétendu « Jihad Nikah » dans lequel des jeunes filles tunisiennes sont impliquées. Un point fort contesté par les médias présents, du fait qu'il s'agit là d'un phénomène confus, bien entouré du plus grand secret. Proposition convaincante ou pas, cela demeure une autre paire de manches. La dernière idée consiste à créer un fonds de protection des victimes du terrorisme dont les prestations bénéficieront à leurs enfants et familles. Ainsi, affirme M. Yahyaoui, la gestion des fonds alloués, en guise de dons et donations, se fait dans le cadre d'une stratégie sociale bien précise basée sur la transparence totale. L'identité tant des bénéficiaires que des pourvoyeurs sera anonyme. Une fois appliquée, cette stratégie est en passe de conférer à l'Observatoire initiateur le privilège d'avoir la tutelle sur ces bénéficiaires, enfants des victimes des martyrs parmi les forces armées et sécuritaires. Et la loi numéro 27 datant du 4 mars 1958 l'autorise à avoir cette tutelle, tel un parent légitime. Quoi qu'il en soit, cette initiative, bien que salutaire, étant l'expression de l'appui à l'effort du pays dans sa bataille contre ces escadrons de la mort, la démarche qu'elle a adoptée est jugée trop sommaire et expéditive. Sans diagnostic préalable aucun, ni chiffres préliminaires vérifiés, ce goût d'inachevé, loin d'être édifiant, serait, peut-être, voué à l'échec.