Assainissement foncier et respect de l'environnement, les solutions urgentes exigées par les habitants de la région Le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (Ftdes) consacre, hier et aujourd'hui, deux journées d'étude pour débattre de la crise du bassin minier du point de vue social, foncier, sanitaire et environnemental. La région de Gafsa, site de l'exploitation du phosphate par excellence, ne cesse de payer la facture de ses richesses naturelles. Une poule aux œufs d'or, le bassin minier constitue aussi une source de maladies et un facteur hostile à l'environnement et à la santé de l'Homme, de la faune et de la flore. Ouvrant la conférence, M. Abderrahmen Hedhili, président du Ftdes, rappelle que la crise du bassin minier s'aggrave au fil du temps, faute notamment d'une intention politique affirmée d'apporter aux macro-problèmes les solutions appropriées. Outre les difficultés qu'encourt la Compagnie de phosphate, ce domaine présente une panoplie de problèmes ayant pour assise une confusion foncière, une offense colossale à l'environnement et une atteinte à la santé publique. Prenant la parole, Mme Lilya Rebaï, représentant le Réseau euro-méditerranéen des droits de l'Homme, fait part de l'intérêt accordé, cette année, par le Réseau aux questions relatives aux droits socioéconomique. Selon elle, le bassin minier intrigue par ses problématiques persistantes, touchant le volet sociologique et humanitaire. Prendre en considération l'ampleur de l'incidence des problèmes sur la vie des habitants de la région est essentiel. Près de 90% des délégations de la région de Gafsa reviennent à l'Etat Parmi les problèmes spécifiques à la région de Gafsa et qui empêchent les habitants de la région de mener une vie normale et de bénéficier pleinement de leurs droits en tant que citoyens tunisiens, figure celui des contraintes foncières. Me. Ridha Raddaoui, avocat engagé dans la cause du bassin minier, rappelle que les mines font partie des domaines de l'Etat et ce, selon le Code des mines. La loi en date du 28 avril 2003 qualifie les mines de « richesses nationales relevant du domaine de l'Etat ». Aussi, est-il de la responsabilité de l'Etat de protéger ces domaines et de veiller sur leur exploitation. L'orateur souligne la nécessité, désormais, de mener un dialogue national sur les mines et sur leur exploitation. Par ailleurs, d'autres hics fonciers caractérisent la région. En effet, près de 90% des délégations de Gafsa, notamment Essnad, Redayef et Métlaoui relèvent, selon des actes de propriété, des domaines de l'Etat. Bien qu'exploités par la population, ces domaines ne sont point commercialisables. Pis encore, certaines demeures se situent juste au-dessus des mines ce qui les rend fort risquées. S'agissant de l'impact de l'exploitation du bassin minier sur l'environnement, l'orateur cite à titre indicatif le nettoyage à l'eau du phosphate ; une technique élémentaire qui gaspille au bout d'une journée des quantités d'eau ahurissantes, à même de suffire à l'irrigation du quart de la forêt de Gafsa. Achevant son intervention, Me Raddaoui recommande la révision des critères relatifs à l'octroi d'une autorisation d'exploitation des mines et ce, suivant les exigences environnementales, forestières et hydriques. Gafsa suffoque sous les émissions chimiques Il suggère à l'Etat de procéder à l'assainissement foncier de la région de Gafsa en léguant, simplement, les domaines déjà exploités aux habitants. En 2008, M. Massaoud Romdhani, représentant le Ftdes s'était rendu à Gafsa où il a été sidéré par l'impact du phosphate sur les conditions de vie et sur la santé publique. Des habitations lézardées, une flore jaunie, une poussière phénoménale... La santé des habitants de Gafsa peine à résister aux émissions des gaz chimiques. L'orateur énumère les maladies prépondérantes, affectant l'état de santé des Gafsiens. De la fluorose dentaire à l'anémie des enfants, en passant par l'ostéoporose, les pathologies rénales, les maladies pulmonaires, l'asthme, les allergies, les cancers, etc. « D'après une étude publiée en 2013 par l'économiste et portant sur un échantillon de 100 personnes originaires de Mdhilla, 68 d'entre elles souffrent d'ostéoporose et 23 de leucémie. Ces maladies reviennent à la présence massive de l'oxyde d'azote et de l'oxyde de soufre dans l'air. Sans oublier le phosphogypse dont les résidus polluent et l'eau et le sol », souligne-t-il. Un environnement hautement pollué, favorable aux maladies chroniques les plus graves. L'orateur indique que la région du bassin minier compte le plus grand nombre de cancéreux. Le nombre d'enfants atteints d'anémie et d'ostéoporose est triple par rapport aux régions du nord. M. Romdhani appelle au recours aux nouvelles techniques d'exploitation du phosphate, des techniques respectant et préservant l'environnement. Il recommande, en outre, à la Compagnie tunisienne de phosphate de miser, désormais, sur la recherche scientifique pour trouver des solutions salvatrices, susceptibles de minimiser la pollution, préserver les nappes d'eau et rationnaliser l'utilisation des ressources hydriques. La santé des Gafsiens doit être prise au sérieux. Des études et des solutions adaptées à l'état des lieux sanitaire sont vivement exigées.