Aujourd'hui, jeudi 21 mai, les membres de la commission administrative nationale en conclave à Hammamet. Objectif : faire sortir leur centrale du marasme dans lequel elle se débat ces derniers jours La direction actuelle de l'Ugtt maîtrise-t-elle réellement la situation syndicale, comme le prétendent certains membres du bureau exécutif, dont en premier lieu Bouali M'barki et Sami Tahri ? Hier, Bouali M'barki a martelé sur radio Mosaïque : «Le bureau exécutif tient la situation en main et ce ne sont pas les quatre secrétaires généraux de syndicats de base qui peuvent perturber la sérénité de la direction ou montrer à l'opinion publique nationale que la centrale a perdu le contrôle de ses bases et que ces bases n'en font, maintenant, qu'à leur tête au risque de mener le pays vers l'inconnu. D'ailleurs, ces éléments ont été sanctionnés et le département chargé du règlement intérieur est en train d'effectuer une enquête au bout de laquelle tous les fauteurs seront écartés des responsabilités syndicales. L'Ugtt compte quelque 7.500 responsables syndicaux à l'échelle locale, régionale, centrale et sectorielle, et ce ne sont pas ces quelques égarés qui vont porter atteinte à la solidité de l'Ugtt et à l'homogénéité de ses militants et cadres. Aujourd'hui, au sein de l'Ugtt, nous désapprouvons totalement les grèves anarchiques déclenchées sans que le bureau exécutif ne soit consulté et ne donne son accord». Il cite, dans ce contexte, la grève sauvage lancée par les cheminots, celle menée par les agents de la Steg et les grèves générales qui ont paralysé, hier, les villes du bassin minier. «Elles ont été décidées par les secrétaires généraux des unions locales des villes en question, ce qui est contraire au règlement intérieur de l'Ugtt, puisque ce sont les secrétaires généraux des unions régionales qui ont le droit de le faire. C'est la raison pour laquelle l'Ugtt dénonce ces grèves, qu'elle considère comme des grèves politiques dont les instigateurs sont connus de tout le monde et il n'est pas sorcier de savoir qui sont ces provocateurs». Voilà qui est dit et clairement dit : l'Ugtt désengage sa responsabilité des troubles et des grèves qui paralysent le pays et le cycle de ces grèves va se poursuivre entre grèves dites légales et avalisées par les structures syndicales et grèves anarchiques, sauvages et surprises non avalisées par l'Ugtt. «La nouveauté est que la centrale ouvrière ne va plus se taire quand les anarchistes font monter les enchères et entraînent les ouvriers dans leur agenda politique et viendra tôt ou tard le jour où nous dévoilerons les noms de ceux qui cherchent à semer la gabegie et le chaos», menace Bouali M'barki. L'Ugtt obligée de reculer Le discours développé par Bouali M'barki et soutenu par Sami Tahri, qui assure lui aussi que le bureau exécutif dénonce «les aventuriers et les instrus qui cherchent à monter le peuple contre l'Ugtt», est partagé, en partie, par Abderrazak Hammami, ancien syndicaliste de l'enseignement secondaire et actuel secrétaire général du Parti du travail patriotique démocratique. «Oui, confie-t-il à La Presse, la situation sociale dans le pays est inquiétante à plusieurs égards. Les grèves, qu'elles soient légales ou anarchiques, ont déjà produit leurs effets. Aujourd'hui, je me sens angoissé en découvrant que le taux de croissance enregistré au cours du premier trimestre 2015 est estimé à 1,7% alors qu'on promettait 4%, ce qui veut dire que plus de 20 mille postes d'emploi promis n'ont pas été créés, sans oublier les emplois perdus du fait des entreprises qui ont quitté le pays. Certes, la direction de l'Ugtt n'est pas responsable de cette situation catastrophique. C'est l'atmosphère générale qui en est responsable. Mais, il faut avoir le courage de reconnaître que l'Ugtt ne contrôle plus totalement ses bases et il est clair que les membres du bureau exécutif n'ont pas réussi à reprendre le contrôle des secteurs comme ils le voulaient lors du conseil national tenu les 4, 5 et 6 mai à Tozeur. La preuve, les décisions qui devaient sortir du conseil national ont été transférées au prochain congrès national prévu fin 2016. En plus clair, la direction actuelle de l'Ugtt se trouve dans une situation très délicate. Il faut qu'elle recule pour préserver sa crédibilité auprès de ses partenaires, principalement le gouvernement et l'Utica, avec lesquels elle s'apprête à entamer de nouvelles négociations salariales en prévision des années 2015 et 2016, les deux ans qui marqueront la fin du mandat du bureau exécutif actuel». En tout état de cause, l'on en saura plus, aujourd'hui, sur ce que les syndicalistes vont décider pour les semaines à venir. La commission administrative nationale se réunit, en effet, demain, à Hammamet, pour «examiner la situation syndicale générale et les derniers développements sur la scène nationale». Cette session intervient quinze jours après la réunion du Conseil national à Tozeur, ce qui montre que les syndicalistes sont déterminés, en dépit des discours de solidarité et d'unité, à en découdre avec tout ce qui se trame à la place Mohamed-Ali.