Amin Mahfoudh : ajouter de nouvelles conditions pour la présidentielle est inacceptable !    Bénin : Le président Talon tient ses promesses, S&P relève la notation de crédit au même niveau que la 1e économie d'Afrique    La Tunisie et l'Italie renforcent leurs liens militaires    G-a-z-a: Le bilan humain passe à 34183 martyrs    La CNRPS approuve plus de 12 000 demandes de prêts    Migration clandestine: 19 corps repêchés pendant les dernières 24 heures    Festival International de Théâtre au Sahara : 4ème édition du 01 au 05 mai 2024 à kébili    La BH Leasing affiche une performance solide en 2023 avec une hausse du résultat à 3,2 MD    France-Israël : la Police convoque Mathilde Panot, Mélenchon bientôt réduit au silence?    match Al Ahly vs MS Bousalem : live de la finale du Championnat d'Afrique des clubs    Houssem Hammi : le code pénal ne respecte pas la dignité du citoyen !    Maghreb : 36 ans après, les dirigeants n'ont toujours rien compris    Pluies abondantes et chute brutale des températures pour les prochains jours    Marché de Béja: La viande de mouton commercialisée à 45 DT/Kg [Vidéo+Photos]    La prolifération prématurée des moustiques exacerbée par les changements climatiques    BNA Bank réalise un PNB en hausse de plus de 7% fin mars 2024    Vient de paraître - L'économie tunisienne à l'épreuve de la démocratie: Acteurs, Institutions et Politiques, des professeurs Abderrazak Zouari et Hamadi Fehri    Msaken: La première société communautaire voit le jour    Le développement annuel des institutions touristiques est en progression    Observatoire National du Sport – 9e congrès international : Les activités sportives entre la recherche scientifique et la réalité du terrain    Initiative « CFYE» en Tunisie : Création de 10.000 emplois décents et stables    Perspectives économiques 2024 dans la région : La fin de "deux Mena"    Orange Digital Center et Coursera offrent des formations certifiantes gratuites sur les métiers du numérique    ISIE : Pour la crédibilité et la transparence des élections    La CIN et le passeport biométrique attendus à partir du premier semestre de 2025    Déclaration finale de la première réunion consultative tripartite entre la Tunisie, l'Algérie et la Libye : Unifier les positions, protéger les frontières et faciliter la circulation des personnes et des biens    Les Indiscretions d'Elyssa    Nouvelle parution – «Al awj al facih» de Kamel Hilali, Sud Editions : Révélations et absences...    Séance de travail avec des experts chinois sur la rénovation du Stade d'El Menzah    Le CA écarte l'USBG et prend le grand huit : Au bout de l'effort    Abdelkader Nasri : pas de prélèvements inexpliqués au niveau des pensions de retraite    Malek Zahi: Ouverture à cette date du Centre de distribution de médicaments spécifiques à Kasserine    Ons Jabeur coachée par Verdasco à Madrid : Dur, dur, mais...    Un pôle d'équilibre nécessaire    Non, le patron de Pfizer n'a pas été arrêté    Dans un périple exploratoire et promotionnel pour les Chefs de Missions Diplomatiques accrédités en Tunisie : Les diplomates et leurs épouses découvrent le potentiel historique, civilisationnel, écologique et économique du Nord-Ouest tunisien    Chute de mur à Kairouan : Le tribunal rend son jugement    Royaume-Uni : Un projet de loi controversé pour l'expulsion de migrants vers le Rwanda adopté par le Parlement    Hommage à Bayrem Ettounsi dans le cadre de la Foire Internationale du livre de Tunis 2024    La galerie A.Gorgi propose une nouvelle exposition collective intitulée "Moving Figures"    Top 5 des pays arabes producteurs de riz en 2023/2024    Olivier Poivre d'Arvor présente à Al Kitab son dernier ouvrage « Deux étés par an »    Le fondateur de Tunisie Booking, Khaled Rojbi décédé    Top10 des pays africains par nombre de millionnaires en 2024    Béja: 1200 participants au semi-marathon "Vaga Run" [Photos+Vidéo]    Ali Zeramdini : la menace terroriste doit être au centre du sommet entre la Tunisie, la Libye et l'Algérie    Au Palais d'Ennejma Ezzahra à Sidi Bou Saïd : La romancière Kénizé Mourad raconte les souffrances d'un peuple spolié de ses droits    Adhésion de la Palestine à l'ONU : La Tunisie regrette le nouvel échec du Conseil de sécurité    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La compensation, ce mal non nécessaire
Publié dans Leaders le 07 - 04 - 2014

Céder des produits de première nécessité à des prix stables et en dessous de leurs prix de revient, a été pratiqué par un grand nombre de pays, notamment ceux à économie centralisée et d'autres pays en développement et ce jusqu'au milieu des années 1990.
Le passage des pays de l'Est à l'économie libérale et l'adoption des plans d'ajustement structurels par les pays en développement ont fait que cette pratique s'est fortement réduite à travers le monde.
Actuellement, les couches les plus défavorisées des pays de l'Afrique subsaharienne ne bénéficient d'aucune subvention à la consommation.
Ainsi, la subvention généralisée à la consommation des produits de base est de nos jours un phénomène quasi exclusivement nord africain (de l'Egypte à la Mauritanie).
Dans cette région, ce sont les deux pays maghrébins pétroliers (Algérie et Libye) qui ont commencé à subventionner les produits alimentaires et à vendre à des prix très bas les produits énergétiques. L'objectif visé était de faire bénéficier l'ensemble de la population de la manne pétrolière.
Pourtant, décideurs et consommateurs s'accordent à croire qu'il s'agit d'un phénomène:
* Coûteux: Il porte sur des montants trop importants pouvant être consacrés à d'autres besoins prioritaires dont les infrastructures, la santé, et le développement régional;

* Injuste: Il bénéficie plus aux classes moyennes et aisées qu'aux classes les plus pauvres;

* Incitateur au gaspillage: Vendre des produits bien en dessous de leur prix de revient, ouvre la porte à leur détournement vers d'autres usages. A titre d'exemple, il revient moins cher en Tunisie d'aujourd'hui de nourrir les animaux, de pain ou de semoule, que d'orge ou de maïs;

* Favorise la malnutrition: Le consommateur s'oriente beaucoup plus vers les produits céréaliers dont les prix sont anormalement bas par rapport aux légumes, fruits et laitages. Ainsi, la consommation de céréales en Tunisie (blé dur et blé tendre), est parmi les plus élevées au monde avec près de 200 kg d'équivalent céréales par tête d'habitant;

* Permet l'enrichissement illicite de ceux qui osent: Etant donné les différences énormes de prix d'un produit pour un usage et un autre, la voie est ouverte à des détournements de toutes sortes. En effet, dans la pratique, la même farine destinée à la fabrication du gros pain, peut être utilisée pour la confection de Pizza ou de gâteaux traditionnels avec une différence au niveau du prix d'achat de …740% (de 6,089 d le quintal de farine PS à 51,200 dinars le quintal de farine PS-7);

* Ne favorise pas la diversité des produits et l'amélioration de la qualité: Puisque les prix des produits à forte demande sont fixés par les pouvoirs publics avec des marges bénéficiaires limitées, les opérateurs ne sont pas en mesure d'élargir la gamme et d'améliorer la qualité des produits. En effet, les prix des nouveaux produits proposés sans compensation, sont considérés comme trop élevés par le consommateur.
1- Genèse et alourdissement progressif des charges de la compensation en Tunisie
La Caisse Générale de Compensation (CGC) a été mise en place en 1970, dans un contexte politique et économique caractérisé par le passage à une économie plus libérale.

Le développement prévu des activités industrielles orientées vers l'exportation, nécessitait une meilleure compétitivité du site Tunisie, y compris à travers la maitrise des coûts de production et des salaires.
La compensation devait entre autres, permettre de mieux positionner la Tunisie par rapport à d'autres pays de la région Méditerranée et limiter les augmentations salariales.
Le coût été alors raisonnable étant donné que le budget alloué à la CGC représentait près de 0,2 % du PIB.
Au bout de quelques années, ce pourcentage passe à 3% du PIB et régressera par la suite au grès de l'évolution des cours des matières importées.
Au début des années 1980, les charges de la CGC dépassent de nouveau 3% du PIB dans une conjoncture économique nationale et internationale défavorable.
A la fin de l'année 1983, et suite à une longue stabilité des prix suivie par une hausse brutale des matières importées et une mauvaise conjoncture économique, la situation devient intenable.
Le Fond Monétaire International (FMI), recommande un certains nombre de réformes dont la réduction drastique de la compensation.
Les pouvoirs publics décident alors d'augmenter le prix du pain de 80%, tout en prenant des mesures d'accompagnement portant sur une aide financière directe au profit des familles les plus défavorisées.
Il en est résulté ce qui sera appelé plus tard : « les émeutes du pain de janvier 1984 », qui ont démarré à l'intérieur du pays pour gagner rapidement la Capitale.
Il a fallu l'intervention télévisée du Président Bourguiba qui a décidé la suppression des augmentations pour ramener le calme.
Plusieurs années plus tard, les pouvoirs publics adoptent une démarche qui a permis de réajuster progressivement les prix, sans nuire au pouvoir d'achat des consommateurs et ce à travers les deux mesures suivantes:
* Le Ministère des Affaires Sociales répertorie les familles et personnes dans le besoin et leur octroi une indemnité mensuelle qui sera réajustée à chaque augmentation des prix des produits subventionnés;
* Etablissement d'une convention entre les employeurs et la Centrale syndicale portant sur une augmentation annuelle des salaires permettant de réduire l'effet de l'inflation et des réajustements des prix des produits de base.
2- L'application de cette démarche n'a pas été systématique
La décision de réajustement des prix est toujours impopulaire et dépend de plusieurs départements ministériels. Ainsi, certains décideurs trouveront toujours des arguments pour retarder la prise de décision : mauvaise année agricole, baisse des prix sur les marchés internationaux, échéances électorales, etc.
Entretemps, le déficit se creuse, et il devient de plus en plus difficile de rattraper le temps perdu.
Ce scénario s'est répété à plusieurs reprises dans le passé et nous sommes en train de le vivre aujourd'hui.
Notons également qu'avant son départ, Ben Ali, a pris l'initiative – qui n'a pas eu l'effet attendu de sa part – de baisser les prix de certains produits alimentaires dont le pain, le sucre, le lait et le double concentré de tomate et ce afin de faire baisser la tension. Il est à signaler par ailleurs, que les deux derniers produits ne figuraient pas auparavant sur la liste des produits compensés.
Depuis, aucune augmentation de prix n'a eu lieu alors que les coûts ont beaucoup augmentés.
Des réajustements auraient dû pourtant avoir lieu après tous les changements qui ont eu lieu:
* Différentes augmentations de salaire dans tous les secteurs;
* L'intégration des travailleurs de la sous-traitance;
* Les nouveaux recrutements;
* L'augmentation importante du nombre des personnes travaillant dans les chantiers des régions intérieures;
* L'augmentation du nombre et des revenus des familles les plus pauvres.
Aujourd'hui la situation est plutôt préoccupante. Le montant global des subventions des produits alimentaires et pétroliers est passé de 1,5 milliard de dinars en 2010, à 4,3 milliards en 2012 et à 4,2 milliards en 2013. Il serait de 5,5 milliards de dinars en 2014 soit plus que 7% du PIB, qui pourraient être affectés à la création d'emplois ou à la réalisation de multiples infrastructures de développement.
A titre d'exemple, ce montant permettrait de réaliser plus de 1500 km d'autoroute.
Il y a lieu de signaler par ailleurs, que la situation sur les marchés internationaux des produits alimentaires et pétroliers est actuellement plutôt favorable. Un retournement des marchés qui est tout à fait dans la nature des choses -en raison de l'évolution cyclique des prix- peut se traduire par des déficits encore plus importants.
Signalons enfin que les situations des principaux organismes publics en charge des produits concernés sont extrêmement difficiles aussi bien au niveau financier qu'à celui des équipements et infrastructures.
3- Comment sortir du cercle infernal?
La situation actuelle ressemble au tonneau des Danaïdes de la mythologie grecque, qui se vide au fur et à mesure qu'il est rempli.
Tout le monde semble convaincu de la gravité de la situation mais le passage à l'acte reste hypothétique.
Nous considérons qu'à terme, et à l'instar de l'ensemble des pays démocratiques avancés, la Tunisie optera pour un modèle d'économie libre, et ouverte sur le reste du monde, le rôle de l'Etat se limitant à veiller au respect des règles du jeu.
Dans le cadre d'une telle optique, les propositions ci-après peuvent constituer un projet de démarche permettant de sortir de cette situation:
* Etablir un plan d'action d'une durée de trois à cinq ans pour abandonner définitivement le système de compensation. Ce plan devra être agréé par toutes les parties au dialogue national. Seront associés au programme aussi bien les professionnels que les syndicats et les composantes de la société civile;
* Soumettre le plan d'action au dialogue national et au consensus entre les partenaires politiques;
* Engager une campagne de communication de longue haleine auprès de toutes les couches sociales;
* Prendre les mesures nécessaires afin de préserver le pouvoir d'achat des moins favorisés et des classes moyennes.
* Consacrer les montants déduits de la CGC à l'investissement, aux infrastructures, et au développement régional.
Rappelons à ce propos, la dernière action de réajustement des prix du double concentré de tomate qui ont été augmentés de 28% en deux étapes et en l'espace de cinq mois. Il a fallu pour cela beaucoup de communication de la part des pouvoirs publics et de la profession dont le nombre d'entreprises en activité a diminué de moitié au cours des vingt dernières années.
A terme, le secteur privé gagnerait pour sa part à participer aux activités d'approvisionnement en céréales.
Il y a lieu de rappeler à cet effet l'expérience vécue au cours des années 1990, qui a porté sur la libéralisation des importations des aliments de volaille et de bétail et qui a abouti à:
* L'annulation pure et simple de toute compensation;
* Un faible impact sur les prix à la consommation.
Taoufik Ben Salah
Consultant en Commerce International

Tags : compensation Tunisie Ben Ali


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.