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L'incontournable transition économique
Publié dans Leaders le 18 - 11 - 2011

Qu'il s'agisse de résorber le chômage à l'horizon 2021 au rythme de la création de 150 000 emplois par an ou de porter le revenu par tête d'habitant à 12.000 dollars par an en 2040 pour répondre à la définition de la Banque mondiale des pays développés, l'effort national requis est gigantesque et signifie simplement un changement de trajectoire quel que soit le paramètre que l'on prendra en compte.
La tâche sera d'ailleurs d'autant plus hardie qu'elle inclura de réparer, dans une sorte phase « Ground Zéro », les dégâts que l'économie et la société dans leur ensemble ont subis au cours de décennies de dictature, et d'apporter les corrections appropriées aux dérives qui , malgré les succès incontestables ,et suffisamment célébrés pour qu' on s'y attarde encore, caractérisent toujours nos politiques et nos réalisations .
Ces préalables au niveau du Ground Zéro Round sont appelés surtout à faciliter «le raccordement à l'existant» de tous ces projets et programmes qui seront proposés dans les nouveaux plans de développement. L'effort requis implique une motivation nourrie et soutenue par les pouvoirs publics sur cinq pistes que nous privilégions :
1. Une vision commune de l'avenir ; «Vision Tunisie 2040»
C'est d'abord à la faveur d'une volonté politique réelle que le Pouvoir pourra faire que les Tunisiens aient ensemble la vision d'une Tunisie de 2040 « prospère et démocratique» où il fait bon de vivre : un rêve qui ne laisserait personne indifférent.et inciterait à l'effort : être soi-même trois fois plus riche ou assurer à ses enfants un niveau de vie trois fois plus élevé que le sien à un horizon raisonnable ! Un rêve qui a tant manqué à la jeunesse tunisienne. Dans les pays qui ont réussi à émerger réellement, l'Etat a joué ici un rôle déterminant .Il a été le promoteur de l'ambition, le porteur de la volonté et le planificateur du développement .Dans tous les cas, il a vu grand et loin et a su motiver les citoyens en leur expliquant où il leur propose d' aller, comment y aller , à quel coût et à quelles dates il prévoit l'arrivée.
2. Une «planification participative » du développement: sur le terrain, en effet, et particulièrement au niveau régional et local, les populations concernées, échaudées par les promesses non tenues ne seront intéressées, surtout depuis la Révolution, que par le court terme, voire l'immédiat et le concret. Les débats sur les modèles et les stratégies de développement ne les intéressent pas autant qu'ils intéressent l'élite de technocrates. Par expérience, ils considèrent que ce sont des discussions sur des schémas qui ne sont fournis, en définitive, qu'à titre indicatif. Au mieux et selon la tradition, on prendra la peine de leur expliquer pourquoi les objectifs n'ont pas été atteints. Aussi, et quel que soit le modèle adopté, ce n'est que lorsqu'ils seront persuadés que leurs besoins essentiels sont pris en compte que les citoyens croiront et adhéreront au rêve et aux efforts qu'il implique.
A cet égard, les citoyens ne seront pas faciles à convaincre par des projets conçus et mis en oeuvre par l'administration centrale, sans leur participation, et sans même leur consultation quelles que soient leurs retombées prévisionnelles par lesquelles elle cherchera à les convaincre. Aussi le rapport sur les ‘'10 Grandes idées proposées pour 2012- 2016 ‘'aurait gagné à être élaboré dans le cadre d'une grande consultation nationale et faire l'objet d'un consensus avant d'être soumis aux instances internationales et maintenant nationales. La première grande idée contenue dans le rapport évoque pourtant «une démocratie décentralisée et participative» !
Par ailleurs, ce que certains partis politiques résument sous le concept global de « développement régional » devrait couvrir des projets et des programmes détaillés qui traceraient le contour d'un recentrage de la politique économique et sociale. Partant de l'état actuel des choses, il s'agirait d'une véritable révolution sociale qui rendrait au concept développement sa dimension sociale pour signifier prospérité et bien-être social pour tous les Tunisiens. Des pistes prioritaires devraient être empruntées:
3. La réduction des inégalités devant la qualité de la vie. Cette piste éclaire l'étendue de l'échec du modèle de développement qui a prévalu au cours de ces dernières années. Ce modèle s'est attaché à faire de la Tunisie une plateforme pour les investissements industriels le plus souvent étrangers mais sans tirer les conclusions d'une réalité évidente: l'industrie manufacturière ne peut pas à elle seule fournir tous les emplois attendus, et là ou ils sont attendus. Le schéma final d'implantation est subi. Les besoins élémentaires des populations là où l'industrie ne s'est pas implantée ne sont nullement pris en compte. Nous prenons aujourd'hui conscience de la profondeur de la fracture sociale et géographique qui marque le pays au point qu'il s'agit aujourd'hui :
• D'assurer l'accès à l'eau potable de toutes les populations qui n'y ont pas encore accès. Des Tunisiens sont parfois réduits à disputer à leurs bêtes l'eau disponible. Cela est intolérable.
A Hajeb Layoun, à Regueb, à Amdoun, dans tout le Nord-Ouest, le centre et le Sud, des communautés entières ont soif. Le Pr Chedly Ayari fait de leur souffrance une description dramatique et émouvante. Il est inexact de prétendre que 95 % de la population est alimentée en eau potable et quand bien même cela serait exact, les autres 5% correspondraient à 500 000 Tunisiens ! Il est urgent d'établir une carte de la soif et d'intervenir, surtout que le problème de l'eau qui se pose déjà avec acuité dans certaines régions risque de s'aggraver dangereusement au niveau national à la moindre sécheresse. Des arbitrages urgents sont attendus dans ces régions pour maîtriser l'utilisation de l'eau et sa répartition entre les secteurs tels que le tourisme, l'agriculture, et la consommation urbaine et éviter des catastrophes prévisibles;
• De réhabiliter l'infrastructure et les prestations des services de santé publique. Il s'agirait souvent de travaux de restauration, d'extension et de nouvelles implantations d'établissements de santé pour mettre fin aux souffrances des populations et à l'inégalité entre les ragions. Il suffira de rappeler à ce niveau que dans les gouvernorats de Kasserine et de Sidi Bouzid, on ne compte qu'un médecin pour 2.200 habitants contre une moyenne nationale d'un médecin pour 812 habitants et un médecin pour 521 habitants à Sousse !
• De réhabiliter l'infrastructure du système éducatif afin d'y rendre les conditions de travail décentes : une école primaire sans clôture, ou non équipée d'installations sanitaires, une vitre cassée, une porte qui ne ferme pas, une étanchéité défaillante, des laboratoires sans équipements où les expériences sont fictives, et enfin une enseignante contrainte de se procurer à ses frais les produits d'entretien pour assurer une hygiène minimum dans sa salle de classe et dans les sanitaires….
• De développer dans les régions déshéritées l'habitat pour les catégories mal logées ou sans logement et qui n'ont pas les moyens de s'en procurer !
Ces projets de « rattrapage, » sont urgents et importants en termes d'investissements mais ils sont aussi créateurs d'emplois, générateurs d'un sentiment d'équité sociale, et en définitive d'une certaine assurance contre l'instabilité. Ils constituent à notre sens le premier chapitre de tout programme de développement. Ces catégories sociales assoifées, mal soignées, mal logées et carrément pauvres ont du mal à comprendre qu'on leur propose de discuter de modèles de développement ! Dans ces régions, les interventions des candidats aux élections de la Constituante s'apparentent souvent à des appels au secours, à des cris de détresse et des lamentations.
4. La mise à niveau de la redistribution des revenus
La redistribution des revenus est un concept qui a pratiquement disparu de la littérature économique tunisienne! En fait, jamais l'insuffisance de redistribution n'a été aussi nette, l'exhibition des richesses des classes aisées aussi voyante et l'écart au niveau du pouvoir d'achat aussi flagrant. Partis d'une situation où une surtaxation quasi prohibitive des produits dits « de luxe » devait permettre d'alimenter une caisse de compensation temporaire des prix des produits de base, nous avons évolué vers un modèle de libéralisme effréné, au point que l'on parle de parcs d'avions personnels, de bateaux de plaisance et de résidences secondaires multiples par famille , et on étale les voitures les plus luxueuses comme signe de la réussite du pays. L'évasion fiscale accompagne la démarche.
Pendant ce temps, la caisse de compensation dont bénéficient les catégories aisées au moins autant que les autres, et qui permet de garder les salaires à un niveau très bas pour attirer l'investissement, sombre sous le poids des charges, dont la maîtrise est devenue un véritable problème d'ordre public. Pendant ce temps aussi, le chômage, le revenu saisonnier, l'absence ou l'insuffisance de couverture sociale laissent peu de marge de manoeuvre au pouvoir d'achat des catégories vivant dans la précarité.
Aussi, l'équité et la solidarité sociales qui ne sont plus que des slogans creux doivent être substantiellement réhabilitées dans leur contenu et dissociées de l'aumône. Il y va de la sécurité et de la stabilité du pays. La conciliation de la croissance économique et du progrès social, l'équilibre entre les régions et les générations sont les piliers du «centrisme» dont nous nous sommes toujours réclamés. La reforme fiscale, le développement des transferts sociaux et une répartition équitable des investissements y aideront sûrement.
Les développements qui précédent nourrissent chez moi, comme chez beaucoup d'observateurs attentifs, l'intime conviction que sans l'intervention immédiate d'un programme de rattrapage social, les plans de développement auront des difficultés pour atteindre leurs objectifs à moyen terme, quelle que soit l'envergure des projets de développement qu'ils pourront promouvoir, tout simplement parce qu'ils ne bénéficieraient pas de l'adhésion des citoyens et ne seraient pas significatifs pour les populations éternellement déshéritées !
Aux origines de la révolution du 14 Janvier, on ne peut pas ne pas déceler la volonté de voir émerger un programme de rattrapage des inégalités.
5. Un développement politique et culturel adapté, condition d'une prospérité économique durable.
Il importe de rappeler ici que dans notre pays, le développement politique et culturel a toujours été séparé du développement économique. Ces domaines ont toujours relevé du chef de l'Etat et du parti unique et ont souvent été soumis à la propagande et à l'improvisation. Les déphasages entre le politique et l'économique ont conduit aux crises qui ont jalonné les 50 années d'indépendance et cela a retardé, quand il n'a pas dévié, le développement économique.
Il est à cet égard établi que la « prospérité » n'est pas que création de richesses. C'est une plante qui ne s'épanouit que dans les sols fertiles. Une prospérité durable exige un environnement politico-social adéquat: il s'agit de la pratique des libertés et de la démocratie, et de toutes ces conditions nécessaires à l'épanouissement de l'individu. En dehors de ces conditions, le développement sera immanquablement caricatural et contesté et au final interrompu à un moment ou à un autre par l'instabilité: le pays oscillera entre émergent et immergent indéfiniment.!
Dans « la Vision Tunisie 2040 », tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle devront être coordonnes. Suivant l'exemple des pays qui ont déjà fait le parcours du développement rapide et volontaire, des indicateurs de performance devront être constamment, disons le plus souvent, «au vert», pour que nous nous assurions que nous «évoluerons vers » la réalisation de nos objectifs. Les batailles à engager contre la corruption, le régionalisme et le favoritisme revêtent une grande importance. Jamais en effet un pays où prévalent ces fléaux n'a pu se hisser au niveau des pays développés ni bénéficier du respect des autres nations. Nous n'avons pas la prétention de proposer un Plan de développement mais d'énumérer pour une étape préparatoire, que nous avons baptisée «Ground-zéro» pour signifier la reconstruction après le désastre, un certain nombre d'actions préalables à cette «longue marche» pour que Rêve devienne Réalité.
En plus de leur impact direct sur la création de richesses, ces mesures répondront à un besoin de dignité et de respect et réconcilieront le citoyen avec le discours politique. Il est fort à parier que les Tunisiens, motivés et mobilisés, sauront étonner le monde par leurs aptitudes au progrès.
N.K.
(*)(Ancien secrétaire d'Etat


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