La présidence de la République a publié, mercredi soir, un communiqué où elle a apporté des clarifications quant à la rencontre qui a réuni à Benghazi, le même jour, le secrétaire-général du Mouvement projet pour la Tunisie (Al Machroû), Mohsen Marzouk, et le général des forces terrestres libyennes, Khalifa Hafter. La présidence a expliqué qu'elle n'a chargé aucun chef de parti à négocier avec le général libyen et qu'elle n'a été informée de la rencontre que le jour même après qu'elle ait reçu un appel téléphonique de la Libye indiquant qu'il existe une rencontre entre une délégation partisane tunisienne et le général en question. Le communiqué indique que la présidence veille à ce que son initiative concernant la Libye se déroule comme il se doit, tout en insistant sur l'importance de communiquer avec les instances officielles de l'Etat avant d'entamer une action qui va dans ce sens. Réagissant à ce communiqué, le porte-parole d'Al Machroû, Hassouna Nassfi, a assuré que la rencontre Marzouk - Hafter ne s'oppose à aucun rite diplomatique. Il a qualifié le communiqué de la présidence de ridicule et d'indigne de l'Etat tunisien et de ce qu'il représente. Selon lui, Mohsen Marzouk aurait personnellement informé le chef de l'Etat, Béji Caïd Essebsi, de cette rencontre avant qu'il ne se rende en Libye. Quelques heures après la publication du texte, la conseillère auprès du président de la République, Saïda Garrach, est intervenue sur les ondes de Shems FM pour dire que le président de la République n'a été informé de la rencontre que quelques secondes avant son déroulement, ce qui est, toujours selon la concernée, contraire aux principes de la diplomatie. Elle a comparé l'incident de quelqu'un qui part aller faire des courses et qui demande à son ami s'il veut qu'il lui ramène quelque chose. Un incident ridicule selon la concernée qui a expliqué que la différence entre ce qu'a fait Mohsen Marzouk et ce qu'a fait le chef du mouvement d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, est que le second informe toujours le chef de l'Etat de ses activités à l'étranger avant de passer à l'acte. De son côté, le député Walid Jalled – qui a été, il y a quelques mois de cela, renvoyé du bloc d'Al Horra après avoir tenu un discours médiatique contraire à la ligne politique d'Al Machroû – a estimé que Mohsen Marzouk a commis une erreur stratégique fatale en imitant, négativement, les agissements de Rached Ghannouchi. Il ne s'agit pas de la première fois où l'on voit des chefs de partis politiques en train de mener des missions ‘diplomatiques' indépendantes de la présidence de la République et du ministère des Affaires étrangères. En août 2015, le fils du président, Hafedh Caïd Essebsi, avait été officiellement reçu par le président turc, Erdogan, sans que personne ne donne des explications claires sur cette rencontre. En Tunisie, il est devenu très courant, voire banal, de voir des présidents de partis se réunir avec des ambassadeurs pour parler des moyens de renforcement des liens diplomatiques de la Tunisie ce qui n'est pas du tout admissible indépendamment des raisons et des explications infondées qu'on nous sert à chaque fois. L'incident Marzouk nous renvoie, encore une fois, à un réel problème de cohérence en Tunisie. La présidence de la République se retrouve discréditée en publiant un communiqué pareil après avoir fermé l'œil sur « les missions à l'étranger » des autres acteurs politiques (à l'instar de Rached Ghannouchi ou encore de Hafedh Caïd Essebsi) et Al Machroû n'est pas du tout en meilleure position puisque ses dirigeants ont toujours dénoncé la diplomatie parallèle exercée par le chef du mouvement islamiste.