L'Union générale tunisienne du travail (UGTT) et les mouvements Ennahdha et Nidaa Tounes ont été les premiers à en parler ; le remaniement ministériel devient une nécessité pour le gouvernement de Youssef Chahed. Au-delà de l'évaluation du travail de cette équipe, c'est la vacance de deux de ses ministères, en l'occurrence le ministère de l'Education nationale et celui des Finances, qui impose qu'on y aille. Deux ministres, Slim Khalbous et Fadhel Abdelkafi, assurent ces tâches parallèlement avec leurs ministères respectifs (le ministère du Développement, de l'Investissement et de la Coopération Internationale et celui de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique) alors que le pays continue sa traversée du désert entre l'instabilité politique, sociale, économique et sécuritaire. Plus de trois mois depuis le limogeage de Lamia Zribi et de Néji Jalloul, les partis politiques, les analystes ainsi que le grand public commencent sérieusement à se poser des questions quant à cette vacance. Dans les coulisses, et avant l'arrestation de Chafik Jarraya et le déclenchement de la série des interrelations des impliqués dans des affaires de corruption, certains nous avaient expliqué que Youssef Chahed évitait la question du remaniement ministériel pour ne pas avoir à se présenter devant l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) au vu de la quasi absence du soutien partisan en sa faveur. Plus tard, la question a encore été retardée parce que, selon nos sources, le chef du gouvernement subissait des pressions importantes en ce qui concerne l'application du quota partisan pour le remaniement en question. Une pression à peine voilée puisque Nidaa Tounes par exemple, via son directeur-exécutfi Hafedh Caïd Essebsi, a fait clairement savoir que ‘ses cadres étaient frustrés de se voir écartés de l'exécutif'. De son côté, et même si ce n'est plus le sujet du moment, le mouvement islamiste n'a jamais rater une occasion pour exprimer son amertume du très petit nombre de postes qui lui sont accordés au sein du gouvernement d'union nationale. Bien que cette remarque ait toujours été faite par le camp anti Rached Ghannouchi (Abdelatif Mekki, Abdelhamid Jelassi et compagnie), il n'en demeure pas moins qu'Ennahdha se sent réellement fragilisé dans sa représentation ministérielle. Par ailleurs, la centrale syndicale – et contrairement à l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA) qui, elle, a certes validé le pacte de Carthage mais préfère toujours se placer en second rang lorsqu'il s'agit d'affaires purement politiques – a été très claire dans son appel : le secrétaire-général de l'UGTT, Noureddine Taboubi, a mis l'accent sur la nécessité d'un remaniement ministériel laissant les détails pour son secrétaire-général adjoint, Bouali Mbarki, qui a déclaré que pour les ministères ayant un lien direct avec les questions sociales, l'UGTT aura son mot à dire. Donc, Youssef Chahed est devant l'obligation de remanier son équipe tout en essayant de répondre aux exigences des signataires du pacte de Carthage sans qui rien n'est possible et ce ni au niveau du Parlement ni au niveau du terrain. Entre temps, la question devient de plus en plus pressante et l'équipe gouvernementale ne peut plus continuer à fonctionner à demi-régime.