Le ministre chargé des relations avec le Parlement et porte-parole du gouvernement, Iyed Dahmani, a présenté, samedi dernier, sa démission de son parti Al Jomhouri. Une démission qui survient suite à un grand accrochage entre le parti et le mouvement de Nidaa Tounes. Alors qu'Issam Chebbi, secrétaire-général d'Al Jomhouri, pensait avoir l'avantage dans la querelle qu'il a lui-même initiée, cette démission vient couper court aux ambitions de ce parti abandonné par les siens. Un double discours et deux positions politiques contradictoires auraient coûté à Al Jomhouri la perte de l'une de ses figures phares. Faisant partie du gouvernement de l'union nationale et signataire du pacte de Carthage, Al Jomhouri n'a eu aucun problème à afficher une position totalement hostile à la loi de la réconciliation administrative et à la candidature de Hafedh Caïd Essebsi, fils du président de la République et directeur exécutif de Nidaa Tounes, aux élections législatives partielles en Allemagne. Lorsque Nidaa Tounes a publié un communiqué officiel annonçant un autre candidat pour lesdites élections, Al Jomhouri y a répondu par un texte où il se félicite d'avoir mené à bien cette mission en empêchant le novembriste (en allusion à Borhen Bssaies) de concrétiser sa promesse en présentant Hafedh Caïd Essebsi aux élections partielles. Dans le même communiqué, Al Jomhouri avait célébré la validation d'une seule partie de la réconciliation tout en expliquant qu'il s'est placé du côté de la nouvelle Tunisie, fière et démocratique. Répondant à ces propos, Nidaa Tounes a plutôt été clair en annonçant qu'il ne pouvait plus être placé sur la même lignée qu'Al Jomhouri . Le message était clair, Iyed Dahmani devait choisir entre son parti politique et entre son poste de ministre. Aujourd'hui, le porte-parole a pris sa décision en quittant son parti et rien ne pourrait l'empêcher de rejoindre Nidaa Tounes puisque, lors des faits, il avait pris position claire du côté de ce même mouvement en expliquant, lors d'un passage télévisé, qu'Al Jomhouri aurait dû choisir un autre discours pour exprimer ses positions. Certains considèrent que l'attitude de Nidaa Tounes, dans cette affaire, est la plus saine puisqu'Al Jomhouri ne peut se réclamer partie prenante au gouvernement tout en affichant des positions hostiles à ce dernier et aux autres parties concernées par le pacte de Carthage (comprendre la présidence de la République). Cette analyse aurait pu tenir si le principe était appliqué à tous les concernés. Or, le mouvement d'Ennahdha semble être épargné de cette règle. Les clivages au sein du mouvement islamiste sont un secret de polichinelle et c'est ce qui cause d'ailleurs des dérapages devenus presque banals. Lorsque Mohamed Ben Salem ou encore Abdelatif Mekki tiennent des propos hostiles à la réconciliation ou tout autre question, aucun dirigeant du mouvement de Nidaa Tounes ne semble s'en émouvoir. Pareil pour Afek Tounes qui, en ce moment même, continue de s'activer afin de concrétiser son projet du Front parlementaire républicain et modéré. Bien que Nidaa ait dénoncé ses députés qui comptent rejoindre ce Front, il reste toujours de marbre face aux déclarations des dirigeants d'Afek qui deviennent de plus en plus virulentes. Par ailleurs, et à notre connaissance, le pacte de Carthage ne comprend aucun point obligeant ses signataires de tenir un discours précis au niveau politique et médiatique. Force est de constater qu'Al Jomhouri est aujourd'hui dans une position peu confortable. Attaqué par ses ‘alliés' et abandonné par les siens, on se demande si ce parti – dont le fondateur s'apprête à lancer un nouveau projet politique – réussira à tenir encore longtemps. Entretemps, la scène politique entière continue à se chercher et à se retrouver autour de fausses alliances et de maudits rapprochements. *Titre emprunté de l'ouvrage de Simone de Beauvoir