Le projet de Loi de Finances 2018 (PLF) a suscité un grand débat et plusieurs acteurs appellent à sa refonte de manière à assurer sa conformité avec la conjoncture actuelle. Ils pointent du doigt la conjoncture dans laquelle il a été élaboré et insistent à réviser ses prévisions de manière à les rendre compatibles avec la conjoncture politique et économique actuelle, notamment le taux de croissance. Ce PLF ne pourrait pas passer sous sa forme actuelle comme attestent les différents intervenants lors de la conférence nationale organisée par l'association Kollouna Tounès sur le thème : « Le projet de la Loi de Finances 2018 : l'heure de vérité », en présence d'experts, de spécialistes du monde de l'économie et des finances, des représentants de la société civile et des partis politiques. Il est vrai que l'élaboration du PLF intervient dans un contexte caractérisé par des contraintes budgétaires aigües et un besoin urgent de relance économique. Plusieurs hommes d'affaires recommandent d'adopter une nouvelle approche dans la procédure de préparation des lois de finances mettant l'accent sur la nécessité de se concentrer sur la relance de l'économie, la promotion de l'investissement et la création d'emplois pour les jeunes et le rétablissement de la confiance, et de ne pas se limiter seulement à l'obsession de faire face aux déséquilibres des finances publiques au détriment de la croissance économique qui constitue le seul moyen d'augmenter les revenus de l'Etat. Cette approche adoptée par les gouvernements successifs post-révolution n'a pas abouti à des résultats positifs, ce qui a nécessité chaque année l'adoption de lois de finances complémentaires ces dernières années. Moez Attia le président de l'association Kollouna Tounès a, à cette occasion, rappelé l'importance du débat autour du PLF 2018, les divergences et les reproches à l'égard de cette loi considérée par certains comme un moyen pour reporter la crise et stopper les incendies. Il a souligné que des questions se posent aujourd'hui sur la vision socioéconomique adoptée dans la préparation du PLF notamment en matière de la relance économique, de l'investissement et de création de la richesse. Sauver l'économie nationale Mongi Rahoui, le président de la commission des finances à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) a précisé que la hausse de l'endettement aura certes un impact direct sur la croissance. «Entre 2011 et 2016, la dette a presque doublé, et ce, par rapport à son niveau depuis l'indépendance», a-t-il dit. Et d'ajouter que la hausse de la TVA et l'augmentation de l'impôt pour les salariés et la classe moyenne sont les principales défaillances du PLF 2018. Mongi Rahoui a, en outre, appelé à renforcer l'investissement public dans les régions et le rôle des banques dans le financement de l'investissement. Habiba Louati, ancienne secrétaire d'Etat chargée de la fiscalité et des prélèvements a souligné que les critiques adressées au PLF découlent essentiellement de l'instabilité politique. « Quatre ministres se sont succédé aux commandes du ministère des Finances durant un laps de temps très court. Cela a affaibli les différents projets des lois de finances basés souvent sur des prévisions optimistes avec recours à des lois de finances complémentaires ».Elle a, par ailleurs, insisté sur l'importance d'intégrer l'économie parallèle dans le circuit économique formel et organisé et a, dans ce contexte, rappelé l'impact négatif de l'économie informelle qui représente aujourd'hui 50% de l'ensemble l'économie organisée. L'expert en économie et président de la commission des affaires économiques de l'association Kollouna Tounes, Riadh Zaoui, a souligné que le PLF 2018 ne traduit pas un grand changement dans les politiques économiques. Une nouvelle surcharge fiscale de l'entreprise risquerait, a-t-il souligné, d'affaiblir les performances et la compétitivité des entreprises et se répercutera sur leur capacité à créer de nouveaux emplois. Il a appelé à contenir la pression fiscale à son niveau de 2016 ajoutant que cette instabilité fiscale peut porter préjudice à la promotion des investissements nationaux et étrangers et à la performance de l'entreprise en général. « Le gouvernement cherche des ressources financières pour renflouer les caisses de l'Etat sans pour autant mettre en place une vision économique claire pour les années à venir », a-t-il relevé. Au final, les participants ont appelé à protéger le pouvoir d'achat des groupes sociaux à faible revenu, de faire face à la hausse de la pression fiscale et de réviser plusieurs articles et mesures prévus par le PLF 2018 en tenant compte des propositions de toutes les parties prenantes pour une loi capable de sauver l'économie nationale