Après l'achèvement en mois de mars dernier des consultations au titre de l'article IV avec la Tunisie, le conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) a publié son rapport sur la Tunisie. Selon le FMI, la croissance économique a pratiquement doublé en 2017, pour atteindre 1,9%. Les investissements et les exportations sont toutefois restés médiocres. La croissance devrait atteindre 2,4 % en 2018 grâce aux bonnes récoltes et à l'embellie du secteur manufacturier et du tourisme. Le taux de chômage reste élevé, à 15 %, et touche en particulier les jeunes, les femmes et la population des régions intérieures. L'inflation a accéléré, s'établissant à un taux annualisé de 7,1 % en février 2018, en raison de la dépréciation du dinar (dépréciation réelle de 10 % en 2017), des augmentations de salaire dans les secteurs public et privé, et de la hausse des prix réglementés. Des exportations décevantes Le déficit des transactions courantes a atteint un niveau record de 10,1 % du PIB fin 2017. Les exportations sont restées décevantes, alors que les importations ont augmenté en raison des grands besoins énergétiques du pays, de la forte demande de biens de consommation alimentée par la croissance rapide du crédit, et des effets de la dépréciation du dinar sur les prix des importations. Les chiffres du commerce extérieur pour les premiers mois de 2018 font apparaître une hausse des exportations, tandis que la croissance des importations ralentit. Cette tendance positive devrait se poursuivre pendant le reste de l'année, grâce à un taux de change réel plus favorable. Les réserves internationales sont tombées à 2,5 mois d'importations en mars 2018, notamment en raison du niveau plus élevé que prévu des ventes de devises auxquelles a procédé la banque centrale et du retard accusé par les financements extérieurs. Stabilité du secteur bancaire Le secteur bancaire reste stable, mais il pâtit du niveau structurellement bas des liquidités, car l'épargne demeure peu élevée. Les inspections menées récemment dans les sept plus grandes banques privées n'ont révélé aucune vulnérabilité significative. Le risque de change reste faible dans le secteur bancaire, le risque de crédit est atténué par la reprise de la croissance et les marges d'intérêt restent confortables. Les perspectives Les perspectives à moyen terme pour l'économie tunisienne restent favorables, avec une croissance qui devrait atteindre 4 % d'ici 2022. Ces perspectives s'appuient sur l'hypothèse de l'application soutenue de réformes visant à améliorer la gouvernance et le climat des affaires, à élargir l'accès au financement, ainsi qu'à moderniser les institutions budgétaires pour en améliorer le fonctionnement et l'efficience. Les progrès enregistrés récemment, dont l'établissement de l'instance nationale de lutte contre la corruption, la création du guichet unique des investisseurs, les contrats de performance conclus avec les banques et les entreprises publiques, ainsi que les lois facilitant la réduction des prêts improductifs octroyés par les banques, vont dans ce sens. Corriger la hausse de l'inflation et la baisse des réserves Les membres du conseil d'administration reconnaissent que la Tunisie est confrontée à des difficultés économiques et sociopolitiques. Les chocs négatifs, les dérapages de la politique économique et les retards pris dans les réformes structurelles ont entravé la reprise économique et aggravé la vulnérabilité macroéconomique. Compte tenu de la mise en œuvre insuffisante du programme et des risques élevés qui pèsent sur celui-ci, les administrateurs exhortent les autorités à renforcer leur engagement à appliquer le programme et à prendre des mesures décisives et urgentes pour placer les finances publiques sur une trajectoire plus tenable, corriger la hausse de l'inflation et la baisse des réserves, et assurer la stabilité macroéconomique. Ils s'accordent de manière générale sur le fait que le recours à des revues trimestrielles faciliterait la mise en œuvre du programme appuyé par le FMI. Pour un durcissement de la politique monétaire Les administrateurs se félicitent également du récent relèvement du taux directeur. Ils indiquent qu'un nouveau durcissement de la politique monétaire sera nécessaire pour atténuer l'inflation. La réduction des interventions sur le marché de change et l'assouplissement du taux de change contribueraient à améliorer le solde des transactions courantes et à reconstituer les réserves internationales. Réforme du secteur de l'énergie Les administrateurs estiment que des réformes supplémentaires s'imposent dans le secteur financier. Ils encouragent les autorités à accélérer les initiatives telles que le guichet unique des investisseurs et l'adoption de lois facilitant la réduction des portefeuilles de prêts improductifs des banques. Les administrateurs prennent bonne note des progrès enregistrés dans l'application des réformes structurelles. Ils invitent les autorités à redoubler d'efforts pour achever la réforme de la fonction publique, optimiser la sélection et l'efficience des projets publics d'investissement, ainsi qu'améliorer la gestion des entreprises publiques. Ils rappellent également que l'accent doit être mis sur la réforme du secteur de l'énergie, pour régler notamment la question des subventions. Ils encouragent les autorités à progresser encore dans l'amélioration du climat des affaires, notamment en poursuivant la rationalisation du cadre réglementaire, ainsi qu'à promouvoir la bonne gestion publique et la transparence.