Se questionner sur la place et l'identité des femmes tunisiennes dans un pays en total changement. Tel est le but du travail de Ghazi Zaghbani qui vient de mettre en scène son œuvre « La fuite » qui s'est jouée à guichet fermé dans la soirée du 11 juillet 2018 au centre culturel d'Hammamet . Un lit, une femme en nuisette rouge et un homme aux idées sombres: en Tunisie, une pièce de théâtre met en scène l'improbable dialogue entre une prostituée et un extrémiste islamiste, pour mettre la société face à ses contradictions. La pièce met en scène l'actrice Nadia Boussetta dans le rôle d'une prostituée, Mohamed Houcine Grayaa dans le rôle du client de la prostituée et Ghazi Zaghbani dans le rôle d'un extrémiste religieux. Ce dernier fuyant la police, entre se cacher dans une maison. Il se retrouve dans une maison close en face d'une prostituée dévêtue. S'en suit une rencontre du troisième type entre deux mondes opposés, une rencontre portée par l'humour: "La situation est en elle-même ironique. Le temps d'une nuit, deux personnages, deux corps, deux esprits vont se confronter verbalement. Débat d'idées, lutte des corps, et rencontre des âmes. La prostituée, maladroite parfois dans son langage, mais pas idiote, elle est crue et cruelle envers son visiteur, n'hésitant pas à le bousculer. Lui, tout habillé, la barbe fournie, ne porte pas de couleurs, le visage terne, et l'air effrayé. ll a fait des études en informatique, mais ignore les plaisirs de la chair et de la vie et n'a de paroles que pour prêcher l'interdit. Loin de n'être qu'un corps, Narjess finira par amener le jeune extrémiste à se remettre en question et à raser sa barbe "noire comme ses idées" .Le texte joué en dialecte est adapté du roman en français "La p... savante", de l'écrivain tunisien Hassen Mili. Narjess, la prostituée, analyse la situation sociale, parle de liberté, de sexe, etc. L'extrémiste n'arrive pas à dépasser ses préjugés. La pièce véhicule un bon message à une partie de la société tunisienne qui vit une douleur quotidienne entre quatre murs. C'est donc dans un monde où l'extrémisme est à son comble que le metteur en scène a choisi de camper ses personnages, les faisant évoluer autant dans son cœur que dans ses marges. À travers eux, il présente une réflexion sur l'extrémisme religieux ainsi que sur la relation à l'altérité.