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L'ombre de la crise politique plane sur tous les indices: Chute vertigineuse de Béji Caïd Essebsi et de Youssef Chahed dans les sondages, avec une légère percée de Moncef Marzouki
Compte-rendu de Faouzi SNOUSSI Le constat est net et indiscutable et le dernier sondage d'opinion est le reflet de la crise politique qui sévit dans le pays. Le conflit entre le président de la République, Béji Caïd Essebsi, et le président du gouvernement, Youssef Chahed, a eu pour résultat une baisse de leur audience, auprès des électeurs, ainsi qu'une amélioration des taux des autres partenaires et adversaires politiques, sans que cela ait pour résultat, une augmentation de leurs sympathisants. Ainsi, la crise politique a desservi, en premier lieu Béji Caïd Essebsi qui, pourtant, améliorer ses scores, pour sortir par la grande porte, dans moins de 18 mois, et couronner une carrière politique des plus remarquables, lui qui a pu rassembler les Tunisiens, avec la création du mouvement Nidaa Tounès qui l'a porté au sommet de la hiérarchie de l'Etat et faire obstacle aux visées des islamistes. Ces derniers ont, aussi, perdu des points appréciables et cela a été reflété par les dernières élections municipales, avec la perte de près d'un demi-million d'électeurs. Le Baromètre Politique d'EMRHOD est une enquête quantitative réalisée chaque mois depuis la révolution du 14 Janvier 2011 auprès d'un échantillon représentatif de la population Tunisienne en âge de voter (18 ans et plus). Cette enquête a été réalisée du 18 au 20 Juillet 2018 auprès d'un échantillon représentatif de la population Tunisienne en âge de voter (18 ans et plus). Pour cette nouvelle vague, EMRHOD a interrogé 920 personnes, par téléphone dans les 24 Gouvernorats (zones urbaines et rurales). La Marge d'erreur est de +/- 3%. - Evaluation du travail du président de la République Question : Comment jugez vous le travail du Président de la République, vous êtes très satisfait, plutôt satisfait, plutôt insatisfait ou pas du tout satisfait ? Entre le 18 et le 20 juillet, 22,5% des personnes sondées se sont déclarées satisfaites ou plutôt satisfaites du travail du président de la République, ce qui représente un large écart, par rapport au mois de juin où Béji Caïd Essebsi où il était accrédité de 32,3%, soit une chute de près de 10 points, ce qui en dit large sur les errements du dernier mois où il n'a pas pu trancher dans le conflit qui oppose son fils Hafedh et le chef du gouvernement, Youssef Chahed. Cet écart est très important, par rapport à celui entre mars et juin, lorsqu'il n'avait perdu que 1,2 point. Le président de la République a, ainsi, payé le prix de son silence qui a laissé le pays, dans l'expectative, ce qui a provoqué le désespoir des citoyens qui ne croient plus à sa capacité légendaire de trancher dans tous les problèmes, même au prix de certains sacrifices. - Evaluation du travail du président du gouvernement Question : Comment jugez vous le travail du Président du Gouvernement, vous êtes très satisfait, plutôt satisfait, plutôt insatisfait ou pas du tout satisfait ? Le rythme ascendant de la progression du président du gouvernement, Youssef Chahed, a été stoppé net, à la suite de la crise politique qui ne l'a pas épargné et il en a payé le prix fort, avec une baisse de popularité de pas moins de 13,6 points en ne récoltant que 32,8% de satisfaits et de plutôt satisfaits, après sa montée, au mois de juin, lorsqu'il avait atteint les 48,8%. Les dissensions au sein de Nidaa Tounès sont la principale cause de cette chute, avec, en plus, les décisions impopulaires et douloureuses qui ont mécontenté le peuple tunisien ont ajouté de l'huile sur le feu. Par ailleurs, la mobilisation de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) pour avoir sa tête et obtenir la démission du gouvernement ont été, aussi, pour quelque chose, et beaucoup d'eau coulera sous les ponts avant qu'il puisse rétablir l'équilibre, surtout qu'il ne bénéficie, actuellement, que du soutien du mouvement Ennahdha qui risque de le lâcher à tout moment, en contrepartie d'avantages politiques. - Popularité des leaders politiques Question : Selon vous, si les élections présidentielles seraient pour demain, pour qui voteriez vous? Face à la baisse enregistrée par Caïd Essebsi, il y a tout un bouleversement au niveau des sondages relatifs à l'élection présidentielle, avec la montée de Mohamed Moncef Marzouki qui pointe à la première place avec 6,6% (5,2% en juin), alors que Youssef Chahed vient à la deuxième place, avec 6,3%, mais en régressant de 3,8%, suivi par Béji Caïd Essebsi, avec 5,1% (9% en juin), puis Safi Saïd qui monte à 3,7%, suivi, successivement, par Mehdi Jomaa, avec 2,9%, Samia Abbou 2,2%, Mohamed Abbou 1,8%, Rached Ghannouchi 1,8%, Mohsen Marzouk 1,8%, Hamma Hammami 1,5% et Néji Jalloul 1,5% Ainsi, parmi les potentiels candidats, la montée n'est pas vraiment consistante et ils n'ont pas pu occuper la place, malgré les errements du parti dominant, en l'occurrence Nidaa Tounès. Elle reflète, encore, si besoin est, que les électeurs son déçus et n'ont plus aucun repère pour le choix du futur président, alors que les élections législatives et présidentielle pointent à l'horizon. La crise politique est très profonde et personne parmi les hommes politiques n'a l'envergure ou la carrure pour présenter des solutions convaincantes, pour l'opinion publique. - Intention de vote pour les partis politiques Question : Pour quel Parti Politique voteriez-vous, si les élections avaient lieu demain? Pour les partis politiques, c'est l'abstention qui est le maître-mot, avec une perte de crédibilité certaine, dans un pays qui compte, actuellement, 214 partis dont la majorité écrasante n'existe que sur le papier et n'a aucune audience. Les dernières élections municipales ont donné un aperçu clair sur l'état des lieux et cela a été confirmé par les sondages, avec 64,4% de personnes qui ne se prononcent pas. Dans cette rubrique et malgré ses déboires et ses scissions, Nidaa Tounès reste en tête, avec, simplement 15,3% de potentiels électeurs, perdant 1,3 points par rapport au 18 juin, suivi d'Ennahdha avec 12,7% contre 14,9% le mois précédent. Viennent, ensuite Tayar démocratique 3,3%, le Front populaire 2,2%, suivi par Afeq Tounès avec le misérable 1%. - Indice de la menace terroriste Question : A votre avis, la menace de terrorisme en Tunisie est très élevée, élevée, faible ou très faible ? Le dernier attentat terroriste qui a coûté la vie à six des valeureux gardes nationaux est venu raviver les craintes, surtout que la saison estivale commence et que les extrémistes vont chercher encore à faire parler d'eux, afin de torpiller tous les efforts entrepris, pour la relance du tourisme. Il y a, aussi, l'énigme du limogeage du ministre de l'Intérieur Lotfi Brahem qui demeure entourée de mystère, ont été à l'origine d'une montée des craintes, dans la population tunisienne. Ainsi le nombre des personnes qui pensent que cette menace terroriste est très élevée ou élevée a plus que doublé, passant de 16,6% en juin, à 34,1% dans ce sondage. Aux facteurs précités, s'ajoute l'instabilité politique, les problèmes sociaux et le marasme économique. - Perspectives économiques du pays Question : Vous pensez que la situation économique du pays est en train de .....? Dans ce secteur, le pessimisme est roi, chez les personnes sondées, avec une légère progression des pessimistes qui représentent un taux de 61,1%, contre une baisse de celui des optimistes qui représentent 28,2%, alors qu'ils étaient un peu plus nombreux, avec 29,4% en juin 2018.. Ce pessimisme est le reflet de ce qui se passe, dans le pays, avec la poursuite de la dégringolade du dinar, par rapport aux monnaies étrangères, malgré les promesses de stabilisation, l'augmentation du taux directeur de la Banque centrale de Tunisie, l'amincissement des réserves en devises qui sont au niveau de presque 70 jours, ce qui représente une cote alarmante. Les dernières directives du Fonds monétaire international avec la libération de la tranche de crédit provoquent, aussi, de nouvelles craintes. Toutefois, l'espoir est que les dernières estimations d'une relance économique se précisent, afin d'éviter la catastrophe. - Indice de la liberté d'expression Question : L'un des grands acquis de la révolution est la liberté d'expression. Pensez-vous, que cette liberté d'expression est aujourd'hui fortement menacée, relativement menacée ou n'est pas menacée ? Les craintes sont ravivées concernant la liberté d'expression qui est le principal acquis de la Révolution tunisienne, surtout la polémique autour de la copie de l'interview du président de la République à Nessma TV et à la radio Mosaïque FM. Cette radio, ainsi que la chaîne TV Al Hiwar Ettounsi ont refusé de diffuser cette interview, arguant que la copie a été modifié et qu'il y a eu un montage déplaisant qui fait perdre à l'entretien sa crédibilité. Il faut ajouter à cela, aussi, le choix d'une chaîne de télévision contestée et considérée comme hors-la-loi par la Haute autorité de l'audiovisuel. La prise de position du président Béji Caïd Essebsi pour son fils et la pauvreté du contenu de l'interview, avec une langue de bois flagrante, ont fait perdre beaucoup de crédibilité au palais de Carthage. Le résultat est que 49,4% des personnes sondées, contre 47,9% le 18 juin 2018, pensent que la liberté d'expression est fortement menacée ou menacée, ce qui n'augure rien de bon. - Optimisme & pessimisme des Tunisiens ou pessimiste pour les prochains jours? Conséquence de tous ces bouleversements, les personnes sondées sont loin d'être optimistes pour l'avenir et seulement 32,2% le sont, avec une légère augmentation, pourtant, par rapport au mois dernier où ils n'étaient que 29,5%. Le taux des pessimistes a, pour sa part, diminué sensiblement, peut-être en raison des prévisions de croissance émises par les instances internationales. Toutefois, la barre est placée très haut pour rétablir l'optimisme chez les deux tiers de la population, soit 59,7% qui ne voient rien de bon, en raison de la crise politique qui accapare l'attention de tous les dirigeants politiques du pays.