L'Union générale tunisienne du travail (UGTT) et l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA) peinent à accorder leurs violons au sujet des majorations salariales dans le secteur privé. «Aucun accord n'a été conclu entre les deux parties sur le taux des majorations salariales », a déclaré le secrétaire général adjoint de l'UGTT, Mohamed Ali Boughdiri, à l'issue d'une réunion tenue avec des représentants de l'UTICA au ministère des Affaires sociales. «Les points de vue restent très éloignés, mais nous espérons que les prochaines réunions apportent du nouveau dans ce chapitre», a-t-il ajouté. Lors de la réunion tenue mercredi, l'organisation patronale a jugé le taux d'augmentation de 10,3% réclamé par la centrale syndicale comme étant «excessif» et «inadapté à la conjoncture économique maussade qui prévaut dans le pays, ainsi qu'à la situation de nombreux secteurs sinistrés qui luttent pour se maintenir à flot». Suite à une précédente réunion tenue le 8 août dernier, le groupement du secteur privé relevant de l'UGTT avait dénoncé, dans un communiqué, le «manque de sérieux» de l'UTICA, en ce qui concerne le respect de ses engagements relatifs à la majoration des salaires dans le secteur privé. Le groupement a également fait état d'une «aggravation de la crise économique et politique que traverse le pays» et d'une «hausse vertigineuse de l'indice des prix à la consommation, ce qui a causé une importante détérioration du pouvoir d'achat des salariés», tout en réaffirmant la «prédisposition de la centrale syndicale à défendre les intérêts des travailleurs par tous les moyens légaux». L'UGTT avait annoncé en juillet dernier qu'elle réclamait des majorations de 10,3% des salaires du secteur privé, indiquant que ce taux a été fixé à la lumière de certains paramètres, dont le taux d'inflation, qui a dépassé les 7%, et celui de la croissance, annoncé par le gouvernement (plus de 2% en 2018). Le dernier round de négociations sociales dans le secteur privé, qui couvrait les années 2016 et 2017, avait abouti à un accord prévoyant une majoration de 6% du salaire de base et des primes. A noter que les deux organisations avaient décidé d'un commun accord de centraliser les négociations sur la majoration des salaires dans le secteur privé. La centrale syndicale ne souhaitait pas au départ des négociations centralisées puisque l'accord qui serait conclu au niveau central est susceptible d'être remis en cause à des échelons inférieurs (secteurs ou entreprises en difficultés) comme ce fut le cas lors du précédent round du dialogue social. L'accord initial conclu le 10 mars dernier entre les deux organisations prévoyait en effet des négociations sectorielles, qui devaient prendre en considération les spécificités et la situation de chaque secteur d'activité économique à travers la mise en place de commissions mixtes couvrant les 54 secteurs d'activités économiques régies par des conventions sectorielles (44 conventions collectives sectorielles ont été signées entre l'UGTT et l'UTICA et dix autres ont été signés avec des syndicats patronaux indépendants comme la Fédération tunisienne de l'hôtellerie et la fédération de l'enseignement privé). En plus de la majoration des salaires, les négociations centralisées toucheront aussi le volet réglementaire régissant les relations professionnelles à la lumière des mutations après la révolution, dont les nouvelles dispositions de la Constitution de 2014, le Pacte social et le programme national relatif au travail décent. Ainsi, la convention cadre régissant le dialogue social et les 54 conventions collectives sectorielles devraient être révisées pour englober de nouvelles dispositions relatives, entre autres, au classement professionnel, au droit syndical, aux mesures disciplinaires, à la prise en considération de l'expérience professionnelle antérieure, aux délais de titularisation et à la durée des stages et des périodes d'essai.