"Je désapprouve la démarche de Youssef Chahed qui ne m'a pas accordé le temps nécessaire pour connaitre les nouveaux ministres". Le président de la République Béji Caïd Essebsi a affirmé hier au cours d'une conférence de presse au Palais de Carthage, n'avoir envoyé aucune correspondance au parlement à ce sujet ni déclaré qu'il boycottera la prestation de serment aux nouveaux membres du gouvernement dont certains appartiennent, selon lui, au mouvement Ennahdha bien que se disant indépendants. Caïd Essebsi a tenu à préciser qu'il n'a fait que transférer la liste des membres du nouveau gouvernement, à la demande du parlement. Selon lui, "la situation n'est pas bonne", regrettant ceux qui réduisent la mission du président de la République au travail de "facteur". En tant que président de la République "je suis au-dessus de tous et le seul élu directement par le peuple", a-t-il insisté. Mon rôle, a-t-il poursuivi, consiste à favoriser le bon fonctionnement de l'Etat. D'ailleurs, a-t-il dit " bien que favorable à la levée de l'Etat d'urgence, j'ai dû changer d'avis et décidé de le prolonger après m'être entretenu avec le chef du gouvernement". "Le chef du gouvernement n'est pas mon adversaire", a-t-il souligné s'interrogeant toutefois sur la précipitation dans l'annonce du remaniement. "Si le chef du gouvernement ou encore un gouvernement de l'ombre veut opérer un remaniement sans me consulter, c'est une autre affaire", a soutenu le président de la République, avant d'ajouter "j'exerce mes responsabilités en tant qu'homme d'Etat et je refuse de tomber dans la médiocrité". Il a affirmé ne jamais intervenir dans tout ce qui a trait aux questions procédurales comme le démontre sa neutralité lorsque le chef du gouvernement a décidé de supprimer le ministère de l'Energie sans passer par le conseil des ministres. Tant que le gouvernement aura la confiance du parlement, personne ne peut l'écarter mais dans l'exercice de la politique, il existe des traditions et du tact. Selon lui, "il ne faut pas donner l'impression qu'il y a un problème en Tunisie" et que les relations sont tendues avec le gouvernement comme tentent de le faire croire certains médias. Le président de la République, a déclaré, en outre, que "le sort du nouveau gouvernement annoncé dans le cadre du remaniement ministériel proposé est entre les mains de l'Assemblée des représentants du peuple", affirmant qu'il "agira conformément à la Constitution en cas d'obtention du vote de confiance au parlement". "Je ne serai pas contre cette décision", a-t-il affirmé. Le chef de l'Etat a tenu à préciser qu'"aucun différend ne l'oppose au chef du gouvernement, Youssef Chahed", rappelant que c'était lui-même qui avait proposé Chahed à ce poste pour ses compétences. "Le problème réside aujourd'hui dans la concrétisation car nul n'est valable pour toutes les périodes ni tous les lieux", a-t-il souligné. Le chef de l'Etat a, par ailleurs, critiqué certaines hypothèses le concernant relayées par les médias, en rapport avec le remaniement ministériel, notamment la possibilité de refuser que les nouveaux ministres prêtent serment devant lui ou encore ne pas promulguer le décret présidentiel relatif au remaniement. "Ces hypothèses sont en violation flagrante de la Constitution pouvant engendrer le retrait de confiance du président de la République si elles viennent à être exécutées", a-t-il fait remarquer. Caid Essebsi a, dans ce sens, rappelé qu'il a été élu par le peuple et que son principal rôle est de "garantir le respect de la Constitution et de veiller à la mise en application de ses dispositions". Il a, cependant, insisté sur la nécessité de respecter le poste du chef de l'Etat ainsi que les normes de l'action politique. Caïd Essebsi a, en outre, précisé qu'il n'est pas attaché au poste du président et qu'il est prêt à renoncer à ce poste si besoin. Il a fait savoir qu'il n'approuvait pas le remaniement ministériel opéré par le chef du gouvernement, le qualifiant de " précipité ". Il s'est dit consterné par la démarche entreprise qui n'a pas respecté les questions procédurales. Selon l'article 92 de la Constitution, a-t-il souligné, le président de la République doit être informé de tout remaniement ministériel. "J'ai demandé au chef du gouvernement de reporter la discussion sur ce remaniement après son retour de Mauritanie (le 6 novembre), mais Chahed a préféré annoncer la composition de ce nouveau gouvernement le jour même " (lundi 5 novembre), a ajouté le président. "Je désapprouve la démarche de Youssef Chahed dans la mesure où je ne connais pas la plupart des ministres proposés ", a-t-il poursuivi. Il a indiqué que sa rencontre avec Youssef Chahed avait porté sur la situation générale du pays et la prolongation de l'état d'urgence, en dépit de son opposition à cette question. Béji Caïd Essebsi a affirmé n'avoir adressé aucune correspondance au parlement sur le remaniement ministériel proposé, précisant que la présidence la République avait transféré, au parlement, la correspondance de la présidence du gouvernement à la demande de l'ARP.