C'est une histoire tendre, violente et sombre à la fois. Momo un petit arabe vivant à Belleville dans les années 70 raconte son quotidien avec des mots simples, à son hauteur. Il est pris en charge par une vieille juive ancienne prostituée ayant pris sur elle d'accueillir sous son toit des enfants de prostituées pour les protéger de la vie et ses aléas. Un écrit à première vue naïf mais il est en tous les cas atypique car il sort de la bouche d'un petit narrateur... qui deviendra grand. L'enfant si attachant, lui aussi le narrateur émaille son roman de réflexions sur la vie. ‘'Il faut aimer'', la dernière phrase du roman sonne comme une prophétie sur le sens même d'une vie qui ne vaut rien sans Amour du prochain. L'écrit est à première vue sombre mais le lecteur se retrouve à chaque fois emporté par une certaine bonne humeur contagieuse. Momo qu'on nous montre au tout début du roman comme étant un petit garçon qui s'embrouillait dans la langue française en utilisant un vocabulaire fait d'amalgames amusants, grandit et mûrit. Le lecteur suit l'évolution de ce personnage et apprend avec lui le sens de la vie dans un beau condensé de sensations pures. Le petit garçon se retrouve projeté dans un mode d'adultes qu'il doit appréhender avant l'heure. Momo vit chez Madame Rosa depuis des années jusqu'au jour où celle-ci tombe malade alors il s'occupe d'elle et ne prend pas en considération les recommandations du médecin qui préfère qu'elle soit hospitalisée. « Romain Gary l'auteur de ce roman a reçu le prix Goncourt pour ce roman, sous le nom d'emprunt d'Emile Ajar. En effet Romain Gary s'est joué du Goncourt puisque le règlement n'autorise pas un auteur à recevoir le prestigieux prix deux fois, or il l'avait déjà obtenu en 1956 pour Les Racines du Ciel. Il voulait par cette mystification retrouver une certaine liberté d'expression, loin des critiques. L'affaire fut révélée à la mort de l'auteur en 1980. » Extraits du roman « Après j'ai essayé de me faire remarquer autrement. J'ai commencé à chaparder dans les magasins, une tomate ou un melon à l'étalage. J'attendais toujours que quelqu'un regarde pour que ça se voie. Lorsque le patron sortait et me donnait une claque je me mettais à hurler, mais il y avait quand même quelqu'un qui s'intéressait à moi. Une fois, j'étais devant une épicerie et j'ai volé un oeuf à l'étalage. La patronne était une femme et elle m'a vu. Je préférais voler là où il y avait une femme car la seule chose que j'étais sûr, c'est que ma mère était une femme, on ne peut pas autrement. J'ai pris un oeuf et je l'ai mis dans ma poche. La patronne est venue et j'attendais qu'elle me donne une gifle pour être bien remarqué. Mais elle s'est accroupie à côté de moi et elle m'a caressé la tête. Elle m'a même dit : - Qu'est-ce que tu es mignon, toi ! J'ai d'abord pensé qu'elle voulait ravoir son oeuf par les sentiments et je l'ai bien gardé dans ma main, au fond de ma poche. Elle n'avait qu'à me donner une claque pour me punir, c'est ce qu'une mère doit faire quand elle vous remarque. Mais elle s'est levée, elle est allée au comptoir et elle m'a donné encore un oeuf. Et puis elle m'a embrassé. J'ai eu un moment d'espoir que je ne peux pas vous décrire parce que ce n'est pas possible. Je suis resté toute la matinée devant le magasin à attendre. Je ne sais pas ce que j'attendais. Parfois la bonne femme me souriait et je restais là avec mon oeuf à la main. J'avais six ans ou dans les environs et je croyais que c'était pour la vie, alors que c'était seulement un oeuf. Je suis rentré chez moi et j'ai eu mal au ventre toute la journée. » M.B.G.