- Agences- Le Parlement libyen a débuté hier une session cruciale consacrée au vote de confiance au nouveau gouvernement d'Abdel Hamid Dbeibah, désigné Premier ministre début février et qui devait contribuer à sortir le pays du chaos en menant une transition jusqu'à des élections générales en décembre. Les 188 députés de la Chambre des représentants se réunissent à Syrte, à mi-chemin entre la Tripolitaine (ouest) et la Cyrénaïque (est), deux des trois grandes régions libyennes à ce jour dirigées par des autorités distinctes sur fond d'ingérences étrangères. Il est néanmoins possible que le vote de confiance n'ait pas lieu : le gouvernement Dbeibah a jusqu'au 19 mars pour obtenir la confiance, et une seconde séance pourrait se tenir d'ici là. "J'appelle les députés à ne pas manquer l'occasion d'unifier le Parlement avec la réunion d'aujourd'hui (...), de permettre au gouvernement d'accomplir immédiatement ses tâches difficiles et de ne pas reporter le vote de confiance", a plaidé M. Dbeibah lundi dans un discours télévisé avant le début de la séance. Abdel Hamid Dbeibah, un milliardaire de 61 ans originaire de Misrata (ouest), a été désigné Premier ministre intérimaire le 5 février par 75 responsables libyens de tous bords réunis à Genève sous l'égide de l'ONU, en même temps qu'un Conseil présidentiel de trois membres dirigé par Mohamed Al-Manfi, originaire de l'Est. Le gouvernement proposé par M. Dbeibah, secondé par deux vice-Premiers ministres, un de Cyrénaïque et un du Fezzan (sud), la troisième région de Libye, est composé de 33 portefeuilles : 27 ministères, dont sept régaliens, et six ministres d'Etat. Leurs noms n'ont pas été dévoilés. S'il obtient la confiance des députés, M. Dbeibah devra unifier les institutions d'un riche pays pétrolier en proie au chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011 et mener la transition jusqu'aux élections du 24 décembre. Mais décrocher la confiance d'un Parlement profondément divisé s'apparente à un parcours du combattant : le Gouvernement d'union nationale (GNA), installé depuis 2016 à Tripoli et reconnu par l'ONU, ne l'a jamais obtenue. En cas d'échec, le vote reviendra aux délégués du dialogue inter-libyen, processus onusien lancé en novembre à Tunis et mis sur orbite à Genève. Khaled el-Montasser, professeur de relations internationales à Tripoli, évoque des "obstacles et des difficultés avant même le vote de confiance", le Premier ministre étant "entouré de soupçons". L'analyste politique Mahmoud Khalfallah confirme : "Ses rivaux politiques ont engagé des campagnes féroces de diffamation (...). Ils ont réussi à créer un climat de tension". Sur les réseaux sociaux, de nombreuses voix ont critiqué le nombre de portefeuilles jugé trop élevé pour un gouvernement censé rester neuf mois. Le ministère de l'Economie et de l'Industrie a été scindé en deux, celui de l'Enseignement en trois (Education, Enseignement supérieur et Enseignement technique), alors que certains organismes publics sont désormais doublés d'un ministère : la Compagnie nationale de pétrole avec un ministère du Pétrole et du Gaz, l'Autorité générale de l'Eau avec un ministère des Ressources hydriques... Les sept portefeuilles régaliens sont répartis entre les trois provinces : les Affaires étrangères pour l'Est ; l'Economie, le Commerce et la Justice pour l'Ouest; la Défense, l'Intérieur et les Finances pour le Sud. Le futur exécutif doit remplacer aussi bien le GNA de Fayez al-Sarraj que le pouvoir rival à l'Est. Le premier round du dialogue inter-libyen, qui a eu lieu un mois après la signature en octobre d'un accord de cessez-le-feu, a été entaché de faits de corruption, d'après le Comité d'experts de l'ONU dans l'annexe d'un rapport encore confidentiel obtenu fin février. La diffusion d'extraits a suscité un tollé en Libye, des députés appelant à reporter la séance du 8 mars en attendant la publication du rapport.