L'absentéisme des lycéens est devenu, de nos jours, un phénomène frappant qui attire de plus en plus l'attention de tous les acteurs scolaires, alors que certains continuent à le considérer comme un phénomène marginal. Il ne s'agit pas là bien entendu d'absences dues à une maladie (passagère ou longue) justifiée par un certificat médical en bonne et due forme ; mais plutôt des absences réitérées volontairement par la plupart des élèves du secondaire, souvent sans motif valable. Il suffit d'aller jeter un coup d'œil chaque matin devant l'administration pour voir la longue queue des élèves qui viennent de s'absenter pour une raison ou une autre, en quête d'un billet d'entrée, sans parler des retardataires qui viennent réclamer un billet de retard pour rejoindre le cours. Le nombre des billets livrés par l'administration peut atteindre quotidiennement sans exagération le chiffre cent ou même plus, cela dépend de l'effectif d'élèves inscrits dans le lycée en question. La démarche généralement souple et tolérante de l'administration envers ces absentéistes est peut-être derrière ce grand nombre d'absences constatées dans pas mal de nos lycées. Le règlement en vigueur stipule qu'en cas d'absences prolongées ou répétées, les parents sont avertis par lettre recommandée une première fois, et au cas où ils ne se présenteraient pas, une deuxième lettre leur est alors envoyée, après quoi l'établissement pourrait radier le nom de l'élève absent de la liste. Certains parents sont souvent surpris en recevant la convocation lui signalant la longue absence de leur enfant ; eux qui croient que leur enfant sort tous les matins pour aller étudier, alors qu'en réalité, il passe son temps à faire l'école buissonnière ! Celui-là est généralement un élève qui a une désaffection pour les études et l'école est pour lui une source d'ennui ! D'ailleurs, ce type d'élève ne tardera pas à décrocher de plein gré ou sera renvoyé pour manque de sérieux et d'assiduité.
Plusieurs formes d'absences Il y a plusieurs types d'absences chez ces lycéens dont les procédés et les objectifs diffèrent selon l'intérêt de chacun. D'abord, l'absence peut être sélective chez l'élève : il s'agit de choisir le moment de son absence selon la matière ou l'horaire. En effet, ce sont généralement les cours qui ont lieu de midi à une heure ou ceux de l'après-midi qui sont les plus séchés par la plupart des élèves, sous prétexte que la matière enseignée pendant ce temps n'est pas d'une importance capitale, comparée aux autres matières de base qui sont à fort coefficient. Pour les élèves de terminale (4ème année secondaire), c'est surtout dans les matières optionnelles qu'on enregistre un taux d'absence très élevé, le registre d'appel n'étant pas toujours disponible pendant ces séances, surtout quand les élèves de telle ou telle option proviennent de classes différentes, ou que ces matières à option se tiennent parfois dans un autre lycée généralement proche du lycée d'origine ! Certains élèves comptent parfois sur certains professeurs qui, par souci de gagner le temps, ou peut-être par complaisance, s'abstiennent de faire l'appel. Ensuite, il y a l'absence collective, c'est quand les élèves, solidaires et sûrs de ne pas risquer de punition collective, se mettent d'accord à s'absenter en bloc pendant une ou deux séances, en signe de mécontentement envers tel ou tel enseignant jugé « peu coopératif » ou pour contester un changement imprévu dans leur emploi de temps; c'est grâce aux « bons offices » de l'administration que les cours sont repris. Il y a aussi des absences ponctuelles qui ont lieu surtout pendant les après-midi lors d'un match de foot important programmé au cours de la semaine (Comme ils sont nombreux ces matchs !) que les élèves mordus de foot (surtout les garçons) veulent voir coûte que coûte, soit à la télé, soit en allant au stade. Pour les cours ratés, on peut toujours se les procurer chez les quelques élèves studieux toujours présents en les faisant photocopier ! Il y a un autre type d'absence qui est plutôt stratégique et pragmatique, à savoir l'absence délibérée de certains élèves aux devoirs de contrôle, souvent à l'insu des parents, histoire de gagner davantage quelques jours de révision et surtout d'avoir une idée sur le sujet proposé à ses camarades présents le jour de l'examen. C'est une tactique habile employée par certains élèves, devenue monnaie courante dans nos lycées, puisqu'ils ont le droit de passer le devoir ultérieurement ; il suffit de présenter un certificat médical justifiant l'absence, ce qui est une chose très facile. Cette pratique peu honnête (sauf en cas d'absence de force majeure) met en danger un principe très primordial dans l'enseignement, à savoir l'égalité des chances entre tous les élèves ! On trouve enfin des absences dues à des considérations relationnelles avec les enseignants. En effet, il y a des élèves qui n'entretiennent pas de bonnes relations avec un ou deux des enseignants pour une raison ou pour une autre ; alors la meilleure façon de les « éviter », c'est de sauter leurs cours. On se demande comment ils peuvent se procurer un billet d'entrée pour accéder à la séance suivante. A moins qu'ils soient marqués présents !
...Tout près des dérives.. L'absentéisme peut engendrer des problèmes énormes pour l'élève aussi bien sur le plan personnel que scolaire. Imaginez les risques courus par les élèves fréquemment absents. L'élève qui s'absente à l'insu de ses parents en passant son temps à flâner dans les rues ou à se marrer dans une salle de jeux ou dans un café est exposé souvent à tous les incidents fâcheux : s'il était à l'origine d'un accident de circulation ou s'il était auteur ou victime d'un accrochage ou d'un braquage, qui assumerait la responsabilité ? Les parents ? L'école ? S'il est à l'intérieur de l'établissement scolaire, évidemment, là on est dans un système juridique très précis qui le protège ; mais du moment qu'il est en dehors de l'établissement scolaire, c'est là que le bât blesse ! L'absentéisme a aussi des répercussions néfastes sur le parcours scolaire de l'enfant et sur sa formation. Il est évident que les élèves absentéistes risquent de perdre les cours faits en classe ; par conséquent, ils se trouvent en situation de ne pas avoir suivi autant d'enseignement que les autres. En séchant certains cours, ils sont sans doute privés de certaines opportunités d'apprentissage, ce qui aura automatiquement une incidence négative sur leurs résultats scolaires. Ni les cours particuliers ni les photocopies des cours ratés ne peuvent résoudre le problème, du fait que le programme a été interrompu plusieurs fois suite aux absences successives, et souvent rien ne vaut le cours assuré par le prof en classe. L'absentéisme est l'une des causes de la régression du niveau général des élèves et de l'échec scolaire. De toute façon, l'une des premières mesures à prendre pour amener les parents à accompagner en permanence la scolarité de leurs enfants, c'est de les informer immédiatement, dès la première journée d'absence de leur enfant, par téléphone portable dont le numéro doit être déposé à l'administration dès le début de l'année scolaire par chaque parent ou tuteur. Ainsi ces derniers peuvent intervenir au moment propice et dès la première absence injustifiée de leur enfant. De même, la visite d'un psychiatre ou d'une assistante sociale à nos collèges et lycées, au moins une fois par mois, serait d'un grand apport pour ces jeunes ; car derrière leurs absences fréquentes, il y a sûrement des causes profondes (personnelles, familiales, sociales...) qu'il faudrait dénicher pour trouver le remède adéquat.