L'affaire Karamosli a fait couler beaucoup d'encre. Et c'est une mauvaise affaire. Voilà un gosse auquel on fait miroiter,, du côté espérantiste, comme du côté étoilé une carrière galactique. L'Espérance veut reconstituer une section volley-ball forte et elle s'est mise à brasser large. Elle achète des jeunes à défaut de pouvoir les former. De son côté, l'Etoile est à l'affût. Elle tient, elle aussi, à rester sur l'avant-scène, toutes sections confondues et dans cette course aux titres, cette politique de recrutement de jeunes, l'Etoile et l'Espérance s'épient mutuellement, ne respectent pas un code d'éthique et cela fait que tous les coups sont bons. Sans doute, les grands clubs professionnels ne font-ils pas mieux! On sait ce qui se passe depuis des lustres dans les batailles rangées du mercato entre l'Inter et Milan, la Juventus et l'Inter, entre la Barça et le Real et on sait même que des hommes respectables tel M. Blatter se sont laissé aller à un jeu d'influence et le dernier en date a mis Sir Alex Fergusson en ébullition après que le président de la FIFA eut appuyé l'envie de Ronaldo d'aller à Madrid. Mais là il s'agit de concurrence dans les règles. Il s'agit d'un cadre professionnel, dans un contexte de libéralisme économique où la puissance de l'argent et la volonté des joueurs et de ses agents priment. A notre connaissance, nous n'avons jamais entendu parler de falsification de signature, de cachet de poste trafiqué, de détournement de joueurs mineurs (et même de joueurs seniors) ailleurs que chez nous. Le document de notre collègue Abderrahmane Bellakhdhar est édifiant: essayer de le lire entre les lignes et vous verrez que le "fait du prince" n'est pas révolu en football; vous verrez aussi que les transactions ne se sont jamais faites dans la transparence et dans cette reproduction des cas de transferts "rocambolesques", par pudeur, par respect aux protagonistes, nous avons tu les histoires de joueurs confinés quelque part dans une chambre d'hôtel, ceux qu'on engouffre dans une voiture banalisée au milieu de la nuit, et tous les ingrédients dignes de thrillers époustouflants . Impossible dès lors de ne pas mettre l'accent sur les deux pôles ayant été les protagonistes absolus de la campagne des transferts durant des décennies, à savoir l'Etoile et l'Espérance. La rivalité "chronique", séculaire s'est carrément mue en bipolarisation durant les années Chiboub-Jenayeh. Ces derniers ont été les artisans de ce que le sport a eu de meilleur et de ce qu'il a eu de mauvais aussi. Une vindicte exacerbée. Une rivalité poussée à l'extrême. La personnification inévitable chez l'un comme chez l'autre. Cela dit leurs prédécesseurs n'étaient pas des colombes, eux non plus. Azzouz Lasram et Hassen Belkhoja, alors membres du gouvernement feignaient de fermer les yeux sur les manipulations du mercato de leurs adjoints respectifs. Mais c'était amical. Et personne n'osait dire que c'était de bonne guerre. Aujourd'hui, on détourne des joueurs et on ne le cache plus. Et, suprême effronterie, on drape les manigances de "valeurs de l'éthique" et de "l'école de civisme" qu'est le club. Clichés désuets. Creux. Dépassés. Nos clubs ne sont plus que des bâtisses sans âmes, un faisceau de mensonges, le jardin où poussent les fleurs (épineuses) de la notoriété et finalement quelque chose de contradictoire et de ridicule. De quel professionnalisme parle-t-on dès lors que les clubs sont régis par des statuts "amateurs"? Peut-on gérer des professionnels et être soi-même amateur? C'est cette contradiction qui autorise toutes les manigances et d'immondes subterfuges.