La Déclaration du 7 Novembre 1987 est un document exceptionnel. Un document-référence. Une sorte de charte venue compléter, corriger et, même, ennoblir certaines dispositions constitutionnelles. Quand on y lit qu'il n'y a guère de place à une présidence à vie, que la loi est au-dessus de tous et s'impose à eux ou que la Tunisie est un Etat de droit, avec la force de ses institutions, cette Déclaration jette, donc, depuis 21 ans, des bases institutionnelles pérennes. Sans institutions solides, il ne saurait y avoir de régime solide. La nuit du 6 au 7 novembre 1987, au saut du lit, les Tunisiens réalisaient que le Changement que tout un chacun espérait, sans oser y croire, était possible. Un Changement venu de l'intérieur par la force de la volonté d'un Tunisien téméraire, fils de ce pays, et dont le haut degré de civilité, de patriotisme et de reconnaissance envers le Père de la Nation aura consisté à ne pas donner celui-ci en pâture à l'Histoire, souvent cynique dans ses retours cruels. Reconnaissance pour la décolonisation pour laquelle auront lutté les grands militants. Respect pour le legs civilisationnel qu'hérite le régime de Ben Ali des réformistes. Remise en cohérence et une reconnaissance, quelque chose qui renaît dans les tripes d'une Tunisie meurtrie par le crépuscule de fin de règne de Bourguiba et par ceux, autour de lui, qui voulaient enfoncer le pays dans les pires dérives obscurantistes, sinon dans les insondables intrigues florentines. La Tunisie renaissait ainsi à la vie. On a dès lors sauvé et consolidé ce pour quoi avait travaillé Bourguiba (l'enseignement, la femme, l'ouverture sur les cultures) et ouvert de très grands chantiers, essentiellement économiques sous-tendus par l'excellence et qui nous ont fait faire des pas énormes sur la voie du progrès, de la stabilité et des équilibres socio-économiques. Ben Ali, on le sait, a insufflé la solidarité ; le tissu associatif ; les droits de l'Homme, à teneur économique. C'est énorme. C'est déterminant. Aujourd'hui, néanmoins, les Tunisiens espèrent une plus grande ouverture démocratique, le libre exercice du pluralisme politique, un dynamisme nouveau des associations affranchies de la langue de bois et, bien sûr, en ce qui nous concerne, une presse où la liberté d'expression responsable n'ait pas à subir certaines contingences. Et d'ailleurs, la Déclaration du 7 Novembre, le spécifie clairement : « notre peuple est en droit d'aspirer à une vie politique évoluée ». Et c'est pour cela qu'on est en droit de se sentir sécurisé en Tunisie. Mais, sans trop verser dans les jubilations de l'autosatisfaction.